mardi 14 juin 2016

quand bien même



Mais Noémi reprit : « Retournez chez vous, mes filles ! Pourquoi venir avec moi ? Pourrais-je encore avoir des fils à vous donner comme maris ?
Retournez, mes filles, allez ! Oui, je suis bien trop vieille pour avoir un mari. Quand bien même je dirais : “Il y a encore de l’espoir ; je vais appartenir à un homme cette nuit et j’aurai des fils”, même dans ce cas, auriez-vous la patience d’attendre qu’ils grandissent ? Pourriez-vous vous passer d’homme aussi longtemps ? Non, mes filles !
(Ruth 1, 11-13a traduction liturgique  )

Viens Esprit de Jésus, viens au cœur de nos vies tracer le chemin du Royaume. Viens Esprit ouvre-nous à l’écoute du cœur. 

Mais Noémi reprit : « Retournez chez vous, mes filles ! Pourquoi venir avec moi ?
Noémi résiste à la protestation de ses belles-filles. Elle leur demande de retourner vers leur pays, plutôt que de l’accompagner. Elle ne voit pas quel motif de vie, de joie ou de bonheur, pourrait motiver ses belles-filles à quitter leur pays. Noémi sait ce qu’il en coûte de vivre à l’étranger, loin des siens et elle ne voit pas quel bonheur, quelle vie ses belles-filles pourraient trouver en l’accompagnant.

 Pourrais-je encore avoir des fils à vous donner comme maris ?
Selon la loi du lévirat, une veuve recevait en mariage le frère de son mari défunt pour donner une descendance à son mari défunt. Noémi réfléchit et parle en fille du peuple d’Israël… à deux Moabites qui ne vivent pas nécessairement sous la même loi !

Retournez, mes filles, allez !
Le verbe « retourner » est vraiment verbe clé de tout ce chapitre, et il nous invite à nous interroger sur ce qu’il signifie, sur les divers « retours » envisageables, sur le niveau auquel ces retours se jouent. Tandis qu’elle leur enjoint de la quitter, elle les appelle « mes filles » … son discours est sans cesse dans l’hésitation, entre attachement et détachement.

Oui, je suis bien trop vieille pour avoir un mari.
Noémi ne peut s’imaginer à nouveau mariée, à nouveau enfantant, son âge est là. Elle ne se perçoit plus comme capable de donner vie, de transmettre vie, d’apporter un quelconque bonheur à ces belles-filles.

Quand bien même je dirais : “Il y a encore de l’espoir ; je vais appartenir à un homme cette nuit et j’aurai des fils”, même dans ce cas, auriez-vous la patience d’attendre qu’ils grandissent ? Pourriez-vous vous passer d’homme aussi longtemps ? Non, mes filles !
Noémi n’imagine qu’un seul scénario, celui où elle devrait être en mesure de donner de nouveaux fils qui soient maris pour ses belles-filles. Elle ne peut imaginer autre que le comblement du vide laissé par les décès, par une nouveauté qui ne soit que reproduction du passé. Retour à ce qui était. Ici elle introduit de plus l’idée que l’attente serait trop longue pour ses belles-filles, l’épreuve trop longue. Elle est sans espérance, et ne veut pas que ce désespoir soit partagé par ses belles-filles. Elle se sent aller vers la mort, et ne veut pas entraîner ses belles-filles sur ce chemin. Elle est face à son vide, à son veuvage et son désenfantement, elle ne peut plus avoir la moindre pensée pour une vie possible, pour une vie autre…

Seigneur, dans les situations de vide, de dépouillement, tu peux encore ouvrir une issue. Seigneur, garde nous de nous enfermer dans nos souffrances, apprendre nous à vivre nos manques, nos creux en tenant l’espérance.



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