Liturgie de la Parole 3 juillet fête de saint Thomas
Ouverture
En cette fête de saint Thomas, nous entendrons un extrait de la lettre aux Éphésiens qui dit que nous faisons partie de la construction qui a pour fondement les apôtres et les prophètes, et pour pierre angulaire le Christ Jésus. Toute la lettre aux Éphésiens est construite sur le contraste entre un « vous » et un « nous ». Le « nous », ce sont les judéo-chrétiens, le « vous », représenté par les Éphésiens, ce sont tous les autres. Donc nous aussi. Tout l’argument de la lettre consiste à montrer que cette rencontre, cette « réconciliation » entre le vous et le nous, se trouve dans la croix du Christ : la lettre insiste là-dessus : c’est par la croix du Christ que nous avons été réconciliés, c’est par sa mort qu’il a tué la haine. Cet aspect-là se retrouvera aussi dans l’évangile. Thomas est l’un des ces apôtres sur qui repose l’Église, et s’il n’était pas là, il manquerait une pierre à l’édifice !
Résonances
Thomas – mais pourquoi donc n’était-il pas là le premier soir ? - reçoit de plein fouet la parole des autres : « nous avons vu le Seigneur ! ». Thomas n’est pas nécessairement l’incrédule de service, qui doute de tout. Il est plutôt l’homme raisonnable, qui nous ramène les pieds sur terre. Et si c’était une « fake news » ? De la poudre aux yeux ? Du toc ? Qu’est-ce que me dit que vous n’êtes pas tous ensemble victimes d’une hallucination collective ? Enfermés que vous êtes derrière vos portes verrouillées, confinés dans votre peur, vous laissez se matérialiser vos fantasmes… Moi, j’ai besoin de vérification.
Voilà bien l’attitude que nous devons avoir devant les informations qui nous sont données et dont nous soupçonnons qu’elles sont manipulées pour nous embobiner. Premier réflexe : vérifier (si c’est possible). Ensuite, se poser la question : « d’où parlez-vous ? Que cherchez-vous en disant cela ? quelles sont les valeurs que vous cherchez à défendre ? quel est votre intérêt de dire cela ? » Enfin, choisir à qui je veux donner sa confiance, car on ne peut pas tout savoir, tout vérifier.
Thomas, donc, veut vérifier. Ce qui est beau, c’est qu’il choisit comme critère de vérification les signes de la Passion, la marque des clous.
Au premier degré, on peut dire, c’est très concret : c’est la meilleure façon de vérifier qu’il s’agit bien de Jésus. Au 2ème degré, au-delà de la matérialité du geste, ce que cela symbolise : Thomas ne veut pas, ne peut pas passer outre de la Passion. Pour lui, le Ressuscité est indissociable du Crucifié. Il veut toucher les plaies de Jésus et ce côté d’où ont jailli l’eau et le sang.
Ensuite, 8 jours se passent. Que se passe-t-il durant ces 8 jours ? Un mûrissement peut-être, un questionnement. Mais aussi, une humble reprise de la vie quotidienne, dans sa chair concrète. Et la décision de Thomas de rester avec les autres, de ne pas se dissocier du groupe.
Vient alors la rencontre du 8ème jour, et Jésus qui s’adresse directement à Thomas, devançant ses réticences. Et cette formule : « cesse d’être incrédule, sois croyant ». Que l’on pourrait aussi traduire : « ne deviens pas incroyant, deviens croyant ». En effet, voir et toucher les plaies de Jésus, ce peut être une pierre de fondation de la foi, mais ce peut être aussi une pierre d’achoppement. On se trouve là à un point de rupture. Pour beaucoup, les plaies du crucifié sont précisément le signe que Jésus n’est pas Dieu. Comment Dieu pourrait-il souffrir ? Face aux plaies du Christ, il y a un choix radical à faire : choisir de croire ou de ne pas croire. Choisir de croire en un Dieu qui nous aime tant qu’il en est mort ! Refuser de gommer les plaies de la Passion.
La réponse de Thomas jaillit alors du fond de ses entrailles : « mon Seigneur et mon Dieu ! » Cette profession de foi, c’est l’élan de son cœur. Lui qui est si raisonnable, il a compris que le plus raisonnable est la folie d’y croire. Il choisit de mettre sa confiance dans le Ressuscité, grâce aux plaies de sa passion, plaies désormais transfigurées, mais pas effacées.
Si notre foi repose sur celle des apôtres, c’est aussi pour cela. Ce qu’ils ont vu de leurs yeux a résonné au plus profond de leur intuition. C’est dans le cœur que cela se passe, le cœur qui est le siège des pensées et des sentiments. La foi et la raison.
Prière
Jésus-Christ, pierre angulaire, en toi la construction s’élève : donne-nous de grandir dans la foi. Les plaies de ta passion, transfigurées dans la lumière de la résurrection, témoignent de ton amour plus fort que toute mort. Aide-nous à ouvrir les portes verrouillées de nos doutes, afin de porter au monde la bonne nouvelle : pour ceux qui croient en toi, ceux qui t’ont vu et ceux qui croient sans avoir vu, tu es notre Seigneur et notre Dieu, pour les siècles des siècles
Sr Marie-Raphaël écrit le 3 juillet 2024