jeudi 30 mars 2023

Liturgie de la Parole, 5e jeudi de Carême

Jn 8, 51-59

(Danièle)

Introduction

Dans la Lecture du livre de la Genèse, Abram devient Abraham. Dieu dit « voici l'alliance que je fais avec toi, tu deviendras le père d'une multitude de nations ».

Et cette alliance sera établie de génération en génération, entre Dieu et nous, une alliance éternelle. Dieu est le Dieu sûr. Il ne revient pas sur ses promesses.

J'avais commenté une lecture qui parlait de malédiction, de punition, et une affirmation de Dieu « l'homme est incurable » Sur le document reçu le mercredi des Cendres, j'ai lu une phrase qui a résolu mon questionnement sur la grande miséricorde de Dieu... C'était écrit, « grande est sa miséricorde, il est même prêt à changer d'avis, se repentant d'avoir menacé de punir »...

Dans l'évangile de Jean, Jésus parle aux Juifs. Il leur dit «si quelqu'un garde ma parole, jamais il ne verra la mort...  Ma gloire n'est rien, c'est mon Père qui me glorifie »... Chantons les psaumes en lui rendant grâce !


Après l'évangile

Abraham a marqué notre histoire. Il a cru à la promesse que Dieu lui a faite, il a entrepris le voyage vers la terre promise... Il y a quatre mille ans ! Aujourd'hui, les promesses de Dieu sont faites pour chacune de nous et Dieu est avec nous à chaque étape du voyage. Le désert est un lieu de passage et de purification. A l'intérieur de nous-mêmes, c'est notre désert, c'est le lieu de rencontre avec nous-mêmes et avec Dieu, dans le silence. « Si quelqu'un garde ma parole, dit Jésus, jamais il ne verra la mort ». Les Juifs ne comprennent pas. Tous les humains meurent. Abraham est mort. Ils ne comprennent pas que Jésus appartient à un monde plus haut qu'eux. Sa déclaration « avant qu'Abraham ait été, je suis » souligne cette différence. Les Juifs n'acceptent pas les paroles de Jésus mais ils ne lui demandent pas d'explications. Ils s'opposent à lui, ils le trouvent dangereux et veulent le détruire en le lapidant ; pourtant, Jésus propose un chemin , une relation étroite avec lui.

« Si quelqu'un garde ma parole »... Nous portons en nous cette histoire depuis des siècles. Le but, pour nous, c'est de l'écouter réellement, de faire ce qu'il propose, alors, nous recevrons tout en lien avec lui.

Mais, Jésus n'a pas dit « si quelqu'un écoute ma parole », il a dit « si quelqu'un garde ma parole », donc, encore faut-il la garder, comme on garde une lampe pour la nuit et  laisser cette parole agir dans notre vie, nous interpeller.

« Jamais il ne connaîtra la mort » Cette promesse paraît impossible, lui aussi connaîtra la mort, alors de quelle  mort parle t-il ? « Si nous vivons en relation avec lui, si nous lui laissons une place dans notre quotidien,  si nous ramenons à lui ce que nous faisons, ce que nous subissons, ce que nous espérons, alors oui, nous ne voyons pas la mort, une autre vie est en nous, une vie qui donne la force d'aimer, de continuer à s'ouvrir, de continuer à espérer et qui pose les possibilités d'une nouveauté. Avec lui, nous vivons notre quotidien, nous le vivons en couleurs, et non selon un « a priori ». De la rencontre naissent les idées, les réponses. Se réveille en chacun de nous l'enfant... ce germe sera toujours vivant, il traversera l'épreuve. Toujours il se tournera vers la lumière de son créateur ». (Jean Luc Fabre)

Dans cet évangile, Jésus dit des choses que nous devons essayer d'entendre vraiment « Amen, amen, je vous le dis »


Invitation au Notre Père

Dieu a fait alliance avec nous. Prions-le avec les paroles apprises par Jésus !

 

Prière finale

Seigneur, à qui irions-nous, tu as les paroles de la vie.

Toi qui fais entendre les sourds,  fais nous entendre tes paroles, aide-nous à les garder.

Toi qui es lumière, éclaire nos pas chaque jour, afin que nous nous rapprochions  de toi.

Parce que tu es amour, miséricorde et pardon, nous te rendons grâce et nous te bénissons pour les siècles des siècles !

Sources

Père Jean-Luc Fabre

Jésuites d'Irlande

mardi 28 mars 2023

Liturgie de la Parole, 5e mardi de Carême

(sœur Marie Christine)

Introduction

Bonjour et bienvenue à cette célébration où le Seigneur nous invite à nous nourrir de la Parole quotidienne. Écoutons, ouvrons notre cœur et laissons-la agir en nous.

« Heureux qui cherche Dieu de tout son cœur et marche dans sa loi », allons-nous chanter avec l’antienne du Psaume 118. Avec ce Psaume, cherchons le Seigneur de tout cœur et portons dans notre prière tous ceux qui le cherchent et cherchent un chemin de vie.

 Méditation

Le livre des Nombres nous rapporte une étape où : « en chemin, le peuple perdit courage. Il récrimina contre Dieu et contre Moïse ». Dès que je perds courage, je suis tentée de récriminer comme le peuple au désert et d’accuser les autres de mon mal-être. Ce serpent de la récrimination est mortel ! Mais l’Écriture me montre le chemin de la guérison : reconnaître mon péché, le dire et demander l’intercession, car seule je ne peux pas m’en sortir. Enfin me tourner résolument vers le Seigneur : « Quand un homme était mordu par un serpent, et qu’il regardait vers le serpent de bronze, il restait en vie ! »

Spontanément monte en moi ce verset du Psaume 33(34),6 : « Qui regarde vers Lui resplendira, sans ombre ni trouble au visage » !

Qui regarde vers Lui, vers celui qui est vrai, et qui se laisse regarder et transformer par Lui, resplendira ; le serpent de la récrimination s’éloigne, son poison n’a plus prise sur moi.

Sur le Seigneur, je peux m’appuyer solidement, il est le Roc solide qui fonde ma vie et la Lumière qui désire resplendir en moi et me transformer.

Jésus nous le rappelle : Celui qui m’a envoyé dit la vérité : est vrai traduit le Père Simoens. La vérité, au sens biblique, est ce sur quoi on peut s’appuyer solidement pour construire sa vie, le roc stable, qui ne fera pas défaut. Tout comme la connaissance, elle n’est pas intellectuelle, elle est existentielle, de l’ordre d’une expérience de vie. Quand Jésus parle, il dit ce qu’il a entendu au plus profond de lui-même dans le cœur à cœur avec son Père. « Je ne fais rien de moi-même ; ce que je dis là, je le dis comme le Père me l’a enseigné. » Jésus tout enseignable, Jésus qui se reçoit en permanence du Père, qui se sait envoyé. Le Père est avec lui, il ne l’a pas laissé seul.

 Prenons un temps de silence et regardons Celui qui nous donne la Vie, le Roc de notre existence, Celui qui nous illumine et nous transforme par sa Présence.

 Invitation au Notre Père

« Fils de l’homme, élevé sur la croix, tu attires à toi tous les hommes. » (cf. Jn 12, 32.34) : par Toi, en Toi et avec Toi nous osons chanter…

 Prière d’envoi : (Psaume 101 (102), 2-3

Seigneur, entends ma prière :
que mon cri parvienne jusqu’à toi !
Ne me cache pas ton visage
le jour où je suis en détresse !
Le jour où j’appelle, écoute- moi ;
viens vite, réponds- moi !

Que mon cœur reste tourné vers Toi et se laisse transformer par Toi. Nous te le demandons en notre nom et au nom de toute l’humanité.

Par Jésus Christ notre Seigneur et notre Dieu qui nous illumine et nous conduit à Toi dans l’Esprit Saint dès maintenant et pour toujours.

mercredi 22 mars 2023

Liturgie de la Parole, 4e mercredi de Carême

(Isabelle Halleux)

 Introduction

Je n’ai pas demandé à Céleste où on en est en nombre de jours, mais nous continuons à préparer notre cœur, et nous en sommes à ce moment du carême où notre effort de conversion se tourne de plus en plus vers la contemplation du Seigneur, sur la manière dont Jésus reçoit la vie, la donne, nous la transmet et nous invite à sa suite.

Dans l’évangile de Jean (Jn 5, 17-30), c’est Jésus qui nous parle et nous montre le lien, la relation forte entre lui et son Père : « Amen, amen, je vous le dis : le Fils ne peut rien faire de lui-même, il fait seulement ce qu'il voit faire par le Père ». « Car le Père aime le Fils ». « Comme le Père, le Fils fait vivre ». « Je ne cherche pas à faire ma volonté mais la volonté de Celui qui m’a envoyé ». « Celui qui écoute ma parole et croit au Père qui m'a envoyé obtient la vie éternelle ».

A un autre chapitre de l’évangile de Jean (Jn 11, 25a-26), dont un verset nous sera proposé en acclamation, Jésus dit : « Je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi vivra, même s’il meurt, et quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais. »  Il est donc question de vie éternelle !

Isaïe, lui, parle au nom du Seigneur. Dieu dit au peuple qu’il libère des babyloniens : « Au temps favorable, je t’ai exaucé, je t’ai secouru. Je t’ai façonné, établi, pour que tu sois l’alliance du peuple ». « Lui les guidera, les conduira vers les eaux vives. » (Is 49, 8-15). Cela nous fait bien entendu penser à Jésus, même si le contexte est différent.

Avec Isaïe et avec Jean, acclamons notre Dieu, crions de joie, exultons : « Gloire à toi, Seigneur, honneur, puissance et majesté ! » Et ­chantons les psaumes…

 


Méditation

En entendant ce texte d’évangile parlant de vie éternelle et de jugement, m’est venue à l’esprit une magnifique fresque que j’ai vue au monastère de Sucevița, au Nord de la Moldavie roumaine, à la frontière de l’Ukraine. Peinte à la fin du XVIe siècle sur le mur extérieur de l’église du monastère consacrée à la Résurrection, elle fait de l’ordre de 6 mètres de haut et autant en largeur ; elle  est très bien conservée. La fresque représente l’ « échelle sainte » ou « échelle des vertus » [1]  de saint Jean Climaque.

Des moines gravissent une échelle vers Dieu qui les accueille avec les saints, dans son paradis blanc. Un cortège d’anges ouvre les portes du paradis. Mais à chaque échelon, des moines peuvent chuter, faute d’humilité, et sont tirés vers l’enfer, dans le chaos. Une scène de jugement dernier… pour moines et moniales ! Mais pour tout homme aussi !

Cette échelle est un itinéraire d’ascension vers Dieu proposé par ce Père du Désert[2] contemporain de St Benoît, un itinéraire centré sur la croissance spirituelle personnelle et la transformation intérieure progressive par la pratique de la vertu. « Comme dans la règle de Saint Benoît »[3], me direz-vous ! Oui et non : une idée d’échelle des vertus, certes, mais en trente étapes, avec un chemin totalement linéaire et surtout moins communautaire ! Une culture assez orientale du monachisme…

Le lien avec notre évangile ? La vie éternelle, le jugement, mais surtout ce verset qui m’a interpellée : « L’heure vient – et c’est maintenant - où tous ceux qui sont dans les tombeaux entendront sa voix (la voix du fils de Dieu) alors ceux qui ont fait le bien sortiront pour ressusciter et vivre, ceux qui ont fait le mal, pour être ressuscités et être jugés. » L’heure vient, et c’est maintenant. Ce n’est pas dans un avenir plus ou moins lointain. La vie éternelle, la résurrection, c’est ce que vient apporter le Christ, juge juste institué par le Père, tourné vers le modèle qu’est son Père. C’est un point déterminant pour nous, chrétiens : le jugement du Christ crée une situation nouvelle, tournée vers le modèle de miséricorde et d’amour qu’est le Père. Par la mort et la résurrection de Jésus, la vie éternelle est une réalité pour chacun.e d’entre nous: « Dieu nous a donné la vie éternelle et cette vie est en son Fils. Celui qui a le Fils a la vie » (1 Jean 5, 11).

Et la résurrection, elle est pour tous : tous sont ressuscités ! Certains « ressuscitent de vie »[4] et d’autres, ceux qui se sont écartés du chemin de Dieu « ressuscitent de jugement »[5] Un jugement qui est appel à la conversion - ici, et maintenant -, un appel à entendre. Une invitation qui donne à chacun la vie, aussi ici et maintenant, comme on peut le lire ailleurs dans Saint Jean (Jn 3, 16) : « Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu'il ait la vie éternelle ».  Jésus est la résurrection et la vie. Il est le chemin qui mène à la vie éternelle, à la résurrection, à la présence de Dieu.

Alors, en est-il fini de ces petits moines qui tombent en enfer ??? En tout cas, étonnamment, cette partie « chaos » s’efface de la fresque avec le temps, comme pour laisser notre attention se focaliser sur le chemin et le lieu de la vie éternelle où le Père nous accueille. Avec les anges qui chantent… N’est-ce pas cela, notre chemin de chrétiens, notre chemin de carême ?

 

Notre Père 

Avec Jésus, redisons les paroles à son Père, à Notre Père.

 

Prière finale

Seigneur, tu nous appelles encore et toujours à contempler ta gloire et à concentrer toute notre attention sur ton Fils. Tu lui as donné la vie. Il a donné sa sienne. Nous sommes tous sauvés par lui et nous sortons tous de nos tombeaux, ressuscités.

Ce don d’éternité, c’est à nous d’y être attentifs, de le transmettre, par nos vies, par notre relation aux autres, par notre relation à toi. Affermis-nous dans notre démarche de carême, pour te contempler, pour nous laisser contempler par toi. Seigneur, notre Dieu, nous te le demandons par Jésus, le Christ, notre chemin, notre vie, uni à toi et au St Esprit, pour les siècles des siècles. Amen.



[1] La métaphore de l’échelle est inspirée du songe de Jacob (Genèse 28, 11-19)

[3] RSB, Chapitre VII

[4] Ce que le français traduit du grec par « ressusciter et vivre »

[5] Ce que le français traduit du grec par « ressusciter et être jugés »

jeudi 16 mars 2023

Liturgie de la Parole, 3e jeudi du Carême

(Sr Marie-Raphaël)

 Ouverture

Les mots-clés des lectures de ce jour : écouter, mais aussi parler.

 

Résonances

Je m’attarde au premier verset de l’évangile : Jésus expulsait un démon qui rendait un homme muet. Lorsque le démon fut sorti, le muet se mit à parler, et les foules furent dans l’admiration.

Qu’est-ce qui rend muet ? Qu’est-ce qui empêche de parler ? On ne peut pas parler, ou on ne veut pas, ou on n’ose pas, ? Un traumatisme qui rend muet, une forte émotion qui nous laisse sans voix, la peur de parler ? Les cordes vocales forment un nœud dans la gorge. On étouffe. Parfois on se tait parce que personne n’écoute, parce qu’on n’a pas voix au chapitre, parce que personne ne nous donne la parole.

Quelle belle expression française : « je te donne la parole ». L’être humain est un être de relation, et donc de communication. L’homme qui ne parle pas est en quelque sorte inachevé. Mais pour apprendre à parler, il faut que quelqu’un lui parle. Un enfant à qui ses parents ne parlent pas restera enfermé dans sa bulle et n’évoluera pas. Au contraire, si ses parents lui parlent, alors même qu’ils savent très bien que l’enfant ne comprend pas encore les mots qu’ils disent, ils le baignent dans un océan de paroles qui vont peu à peu le structurer, qui vont faire sens pour lui. Et un jour, il va leur répondre.

N'est-ce pas aussi ce qui se passe pour nous dans notre relation avec la Parole de Dieu ? Au commencement était le Verbe. Dieu nous parle. Il attend notre réponse, mais nous ne pourrons pas lui répondre clairement aussi longtemps que nous ne sommes pas entrés dans son langage. Et pour cela, nous devons commencer par beaucoup l’écouter. Nager dans l’océan de ses paroles. À force de la fréquenter, nous découvrons peu à peu sa cohérence interne, sa beauté.

Écouter : pas seulement percevoir le son des mots, mais entrer dans le sens des mots. Écouter vraiment, c’est tenter d’entrer dans ce que l’autre a voulu dire, et donc de se mettre à sa place, de se placer de son point de vue. Dieu attend de nous que nous l’écoutions, c’est-à-dire que nous nous mettions à sa place pour comprendre, comme de l’intérieur de lui, le sens de ses paroles.

Dieu veut entrer en dialogue avec nous. Il veut que la parole circule. En cela, il nous fait exister. Il sort de son silence et nous sort du nôtre. C’est le chemin de l’alliance. Jésus guérit un muet : il lui permet de vivre, d’être en relation.

et les foules furent dans l’admiration. L’admiration, c’est une attitude d’ouverture. Une reconnaissance qu’il y a là quelque chose d’admirable, de merveilleux, d’incompréhensible, de beau. L’admiration est liée à l’humilité. C’est accepter de ne pas tout comprendre, mais reconnaître un désir de comprendre. Cette attitude est au point de départ de l’aventure scientifique. Un questionnement insatiable devant le réel. C’est aussi le point de départ de la foi : un dialogue incessant avec Celui qui donne sens au réel. Entrons dans cette admiration, dans ce dialogue. Dieu nous donne la parole !

 

Prière

Seigneur, quand tu passes dans nos vies, les sourds entendent et les aveugles voient : ce sont les signes que le Royaume de ton Père s’est approché de nous. Libère-nous de nos peurs et de nos préjugés, afin que nous entrions pleinement dans ce dialogue et que nous répondions à ton amour par une vie de plus en plus fraternelle.

mercredi 15 mars 2023

Liturgie de la Parole, 3e mercredi du Carême

 (sœur Marie-Christine)

Introduction

Bonjour. Le Seigneur nous a réunis pour écouter sa Parole et nous laisser enseigner par elle.

Deux mots ont retenus mon attention : grand et petit !

Mais je vous en dirai d’avantage tout à l’heure.

Laissons-nous enseigner par le chant du Psaume 118 qui proclame sur tous les tons que la Loi du Seigneur est chemin de vie, et par l’écoute des textes de ce jour.

 

Méditation

Le Seigneur a de l’humour ! Dans ce passage du Deutéronome, il dit : quand tous les peuples entendrons parler de tous les décrets du Seigneur « ils s’écrieront : “Il n’y a pas un peuple sage et intelligent comme cette grande nation !” » Or Israël a toujours été un petit peuple devant la puissance et la grandeur de ses voisins, l’Égypte, l’Assyrie, Babylone !

Un peu plus loin dans le Deutéronome, au chapitre 7, Moïse affirme[1] : «Si le Seigneur s’est attaché à vous, s’il vous a choisis, ce n’est pas que vous soyez le plus nombreux de tous les peuples, car vous êtes le plus petit de tous. C’est par amour pour vous, et pour tenir le serment fait à vos pères, que le Seigneur vous a fait sortir par la force de sa main, et vous a rachetés de la maison d’esclavage et de la main de Pharaon, roi d’Égypte. Tu sauras donc que c’est le Seigneur ton Dieu qui est Dieu, le Dieu vrai qui garde son Alliance et sa fidélité pour mille générations à ceux qui l’aiment et gardent ses commandements.(…) Tu garderas donc le commandement, les décrets et les ordonnances que je te prescris aujourd’hui de mettre en pratique. »

La grandeur d’Israël c’est d’écouter, garder et mettre en pratique ces décrets et ces ordonnances. En même temps c‘est une mission, une responsabilité : cela suscitera l’admiration et le désir de tous les peuples.

Jésus n’est pas venu abolir cela, ni la Loi (ces décrets et ordonnances) ni les Prophètes (leur mise en pratique concrète) mais les accomplir, leur donner leur dimension la plus profonde, la plus authentique. Celle qui vient du cœur et non d’une mise en pratique seulement extérieure, celle qui va jusqu’au bout du don de soi par amour.

Tout cela est un don gratuit de Dieu, un don offert « par amour pour vous » comme le dit le Deutéronome.

Saint Paul ira dans le même sens : « Qui donc t’a mis à part ? As-tu quelque chose sans l’avoir reçu ? Et si tu l’as reçu, pourquoi te vanter comme si tu ne l’avais pas reçu ? »[2]

Ce don est une responsabilité « les mettre en pratique » concrètement de tout notre cœur.

La vraie grandeur, c’est peut-être de se savoir petits, mais choisis, aimés ; d’entrer dans la sagesse et l’intelligence des décrets et des ordonnances du Seigneur, dans la sagesse de l’Évangile, avec notre tête, mais surtout avec notre cœur et avec nos mains pour les mettre en pratique.

Nous sommes petits devant la grandeur de notre vocation chrétienne, mais que cela ne nous trouble pas, ce n’est pas notre œuvre : « Ce trésor, nous le portons comme dans des vases d’argile ; ainsi on voit bien que cette puissance extraordinaire appartient à Dieu et ne vient pas de nous »[3], comme l’écrit encore saint Paul aux Corinthiens.

Sans nous préoccuper de notre petitesse, rendons grâce au Seigneur qui nous a choisis par amour.

Que la Parole du Seigneur soit et demeure la nourriture de nos vies, qu’elle façonne peu à peu notre cœur, nos actes, nos relations.

Que la vie des disciples de Jésus donne envie de Le connaître, de connaître l’Évangile, et d’en vivre.

 

Invitation au Notre Père

Seigneur tu nous as offert le trésor de ta prière, avec toi nous osons dire :

 

Prière d’envoi 

Seigneur, Dieu de miséricorde, tu nous as choisis et enseignés par amour. Nous sommes petits devant cet appel. La vraie grandeur vient de toi, de ton œuvre en nous et à travers nous.

Que ta Parole soit la lampe de nos pas, qu’elle travaille nos cœurs, les transforme, pour que nos vies soient contagieuses de toi.

Nous te le demandons pour nous et pour tous les baptisés.

Par Jésus le Christ, notre Seigneur qui nous conduit à la vie avec Toi dans l’Esprit Saint dès maintenant et pour toujours.



[1] Deutéronome 7,7-9.11

[2] 1 Corinthiens 4,7

[3] 2 Corinthiens 4,7

lundi 13 mars 2023

Liturgie de la Parole, 3e lundi de Carême

 (Sr Marie-Jean Noville)

Introduction

Nous voici rassemblés en communauté, en Eglise.

L’Ecriture Sainte nous rejoint, là où nous sommes, et dans nos côtés les plus sombres.

Dans les deux lectures qui nous sont proposées en ce 3e lundi de Carême, la colère est bien présente !

Dans l’extrait du 2e livre des Rois, un homme, en espérance de guérison de sa lèpre, Naaman, reçoit une prescription médicale de la part du prophète Élisée : « Va te baigner sept fois dans le Jourdain, et ta chair redeviendra nette, tu seras purifié ».

Mais le remède lui paraît trop simple… Il part en colère.


Dans l’évangile, Jésus fait allusion à deux récits du Premier Testament : d’abord, la visite d’Élie auprès de la veuve de Sarepta ; ensuite, le récit d’Élisée que nous allons entendre. Mais à l’écoute de la parole de Jésus, les auditeurs ne sont pas convaincus. La colère s’empare d’eux et ils veulent précipiter Jésus en bas de leur ville.

 

Que faire de la colère qui peut nous habiter ?

Nous pourrons initier une piste de réflexion, après avoir reçu la Parole de Dieu.

Pour nous y préparer, recueillons les intentions des hommes et femmes de notre temps, par le chant des psaumes…

 

Méditation

J’énonçais ce fil rouge un peu inhabituel qu’est la colère, qui unit les deux lectures de ce jour.

Vous avez entendu que le traitement de la colère dans les deux récits n’est pas identique.

Dans le 2e livre des Rois, le général Naaman ne s’en rend pas prisonnier.

Lorsque ses serviteurs tâchent de lui démontrer la facilité de ce qui lui est demandé, il ne se laisse pas prier, il obéit… et est guéri de sa maladie.

Dans l’évangile par contre, le discours de Jésus ne persuade pas ses détracteurs. Ils s’enlisent dans la colère, qui les pousse à menacer Jésus de mort.

 Et nous, comment pouvons-nous réagir lorsque ce sentiment nous atteint ?

Un apophtegme des Pères du désert peut nous aider à réfléchir.

 « Abba Ammonas disait : ‘J’ai passé 14 ans (dans le désert de) Scété priant Dieu nuit et jour qu’il m’accorde de vaincre la colère’ » (Abba 263).

 Je vous partage le commentaire du Père Lucien Regnault, de l’abbaye de Solesmes :

« Il est réconfortant d’entendre un Père du désert nous faire cet aveu. Les Pères n’étaient pas des chiffes, ils avaient du caractère et ne le maîtrisaient pas toujours. Sans doute avaient-ils parfois de bons prétextes pour s’irriter. Mais l’un d’eux déclarait qu’il n’y a absolument pas de raisons pour justifier la colère contre le prochain. Ces vaillants lutteurs qu’étaient les ermites du désert ne désertaient pas le combat, mais ils comptaient avant tout sur l’aide de Dieu. Ils ne demandaient pas de grâces mystiques extraordinaires, mais ce qu’ils jugeaient plus important : la maîtrise de leurs passions, afin que la charité en eux soit vraiment souveraine.

Quand nous sommes tentés de nous laisser aller à la colère, nous devrions prier d’abord comme Ammonas, sans jamais nous décourager, des années durant. Ammonas est devenu évêque après ses 14 années passées à Scété dans ce combat contre la colère. Il était finalement le plus doux et le plus miséricordieux des hommes.

Que nous soyons moines, évêques (ou) prêtres, ou… laïcs, la colère est toujours de notre part un contre-témoignage à la patience et à la douceur du Christ »[1].

 Prenons un temps de silence pour nous laisser interpeller, en notre être et en notre vie.

 

Temps de silence

 

Notre Père

Entrons dans la prière que Jésus nous a enseignée…

 

Prière

Dieu notre Père, lorsque les passions nous assaillent, nous voulons t’appeler, afin que la charité soit en nous la plus forte. Envoie ton Esprit, afin que ce temps de Carême nous inspire la conversion qui te plaise et nous tourne résolument vers Toi et nos frères et sœurs. Nous te le demandons par Jésus-Christ, ton Fils, qui règnes avec Toi et le Saint-Esprit, maintenant et pour les siècles des siècles.

 

Bénédiction

Que le Seigneur nous bénisse et nous garde…

 


[1] L. Regnault, L’Evangile vécu au désert. Paroles des Pères du désert traduites et commentées, Tournai, Arthème Fayard, 1990, p. 139-140.

jeudi 9 mars 2023

Liturgie de la Parole, 2e jeudi du Carême

(Danièle)

Introduction

Dans la lecture du livre du prophète Jérémie, on reconnaît les paroles du premier psaume.

« Heureux est l'homme qui n'entre pas au conseil des méchants ». A première vue ce psaume et cette lecture font peur, il vaut mieux être juste avec ce Dieu qui punit les méchants. Et à la fin de la lecture, le Seigneur dit « Rien n'est plus faux que le cœur de l'homme, il est incurable »... voilà des paroles dures qui donneraient envie de se dire, alors, à quoi bon ? Je suis incurable... Ou au contraire reconnaître devant Dieu mes faiblesses et lui dire «et bien, je ne comprends pas ces paroles, mais je compte sur toi pour m'aider »... Le Seigneur pénètre les cœurs, il connaît le chemin des justes.

Dans l'évangile de Luc, on redécouvre l'histoire de l'homme riche et de Lazare... que j'avais commentée l'an dernier. Me considérant plutôt riche, je rappelais une parole du pape François « Ouvrons les yeux sur toute vie qui vient à notre rencontre surtout si elle est faible, c'est un don qui mérite accueil, respect et amour »... Cette année, j'ai découvert autre chose, je peux être riche mais aussi parfois être pauvre devant Dieu avec mes doutes et mes faiblesses.

Quand nous sommes pauvres, nous sommes invitées à nous laisser pétrir par l'amour de Dieu et, riches de l'amour de Dieu qui nous porte, nous sommes invité(e)s à aider notre prochain dans les moments difficiles, maintenant, encore davantage pendant ce carême : « la fermeture sur soi n'engendre pas la vie » dit  Emmanuelle Billoteau.

En rendant grâce avec les psaumes, nous allons chanter « garde-moi mon Dieu, j'ai fait de toi mon refuge, de toi dépend mon sort »...

Après l'évangile

Aujourd'hui, j'ai approfondi le texte de Jérémie et le psaume 1, le commencement du livre des psaumes, il transforme la parabole de Jérémie qui contient des paroles dures, le méchant n'est plus un buisson desséché sur une terre inhabitable, désertique...

Malgré tout, je disais donc en introduction « ce psaume fait peur ». Cette pédagogie de la peur, promesse d'abondance ou au contraire de catastrophes, c'était pour essayer de rendre les humains dociles. Il y a quinze jours, dans le Deutéronome, il était question de bénédiction ou de malédiction.

- « ce psaume fait peur , et pourtant, c'est un témoignage d'amour de Dieu pour nous », dit  Marc Pernot dans « marcher en humanité ». Cette affirmation est étonnante. C'est une hypothèse, J'ai donc essayé de la comprendre.

- Ce psaume transforme la parabole de Jérémie « maudit soit l'homme » et « béni soit l'homme ». Maintenant, le méchant est comme la paille balayée par le vent.

La paille, c'est la tige qui soutient l'épi, le cultivateur ne la coupe pas, il patiente en attendant le grain. Quand il moissonne, bien sûr il ne garde pas la paille pour le pain, mais  il ne la détruit pas... Dieu ne massacre pas les méchants, il cherche à éliminer la méchanceté.

- Ce psaume peut vouloir dire qu'il n'y a pas d'un côté les justes qui seront sauvés et de l'autre côté les « méchants », les mauvais, les non-baptisés. Ça peut signifier  que tous et toutes sommes des personnes que Dieu est en train de soigner...

Alors qui a raison ? L'interprétation littérale de Jérémie et du Deutéronome ou bien le psaume 1 ? Dieu est-il un terrible juge ou bien un seigneur plein d'attentions pour chaque jeune pousse ?Jésus nous l'a fait connaître, Dieu est Père.

 Je reviens à la phrase « les méchants sont comme la paille balayée par le vent ». La définition du verbe « balayer », c'est enlever la poussière. Et à propos du vent, il suffit d'un pas pour considérer que c'est l'Esprit de Dieu, ce pas, je l'ai franchi. Le vent souffle où il veut. Ça voudrait donc dire que l'Esprit enlève les poussières de la paille, les sources de méchanceté, autrement dit, Dieu Amour veut sauver tous les hommes, il pardonne et patiente en attendant que la paille porte le fruit.

Ce psaume est donc bien un témoignage d'amour de Dieu pour nous.

« Heureux est l'homme » dit le psaume et Jésus dit  « heureux les pauvres en Esprit », il nous montre ce qu'il attend de nous. Il emploie le pluriel parce qu'on ne peut pas être heureux(se) seul(e).

Le psaume nous invite à nous réjouir de l'action de Dieu sur nous par son Esprit et Jésus nous invite à nous considérer maintenant comme  « pauvre en esprit ». Se savoir pauvre en Esprit, c'est prendre conscience que l'on a déjà un peu l'Esprit de Dieu en nous, s'en réjouir et espérer en avoir plus. C'est un bonheur : Dieu est déjà à l’œuvre en nous.

Invitation au Notre Père

En communion avec tous nos frères et sœurs, pauvres ou riches, redisons la prière que Jésus nous a apprise.

Prière finale

Seigneur, nous te bénissons et nous te rendons grâce pour ta Parole qui nous montre le chemin à suivre et qui nous fait comprendre combien tu nous aimes.

Nous sommes la paille, par ton Esprit d'amour balaie nos fautes, purifie-nous !

Que ce temps de Carême nous aide à nous convertir, à nous débarrasser du superflu afin de nous rapprocher davantage de toi et de notre prochain.

Fais grandir notre foi.

Nous te le demandons à toi qui vis et règnes aujourd'hui et pour les siècles des siècles.

 

Inspiration : Marc Pernot « marcher en humanité »

lundi 6 mars 2023

Liturgie de la Parole, 2e lundi de Cârême

Sœur Marie-Raphaël

 Introduction

Un mot qui m’a touchée dans la première lecture : la honte.

L’année dernière, Benoît Lejeune a organisé avec la pastorale de la santé du diocèse de Liège un colloque psychiatrie et pastorale sur le thème de la honte. Il en ressort notamment que la honte a à voir avec le regard de l’autre. Le regard de Dieu sur moi, mais aussi mon propre regard sur moi. Il y a une honte existentielle, qui colle à la peau, parfois de génération en génération (« tu n’as pas le droit d’exister, tu aurais mieux fait de ne pas naître »), et une honte fonctionnelle, qui fonctionne comme un moteur de résilience. La Bible aussi parle de plusieurs sortes de hontes. Il y a la mauvaise honte, celle qui vient de l’humiliation. Et il y a la bonne honte, celle qui vient de la prise de conscience de mon péché. Le pape François a dit un jour qu’il nous faut être attentif à ne pas laisser de côté « la bonne honte ».

Le prophète Daniel déclare : « à nous la honte au visage, car nous avons péché… » Il parle au nom d’une collectivité, son peuple, plusieurs générations. Il y a donc ici la reconnaissance de ce qu’aujourd’hui on appelle un « péché systémique ». On peut transposer sur l’actualité de l’église : le péché systémique des abus nous couvre tous de honte. Ne craignons pas cette honte-là, dirait le pape François, car elle peut être thérapeutique…

Résonances

Les deux lectures parlent de pardon et de miséricorde. Dans la lecture de Daniel, c’est le pardon de Dieu qu’on invoque, sur un collectif qui prend conscience de sa faute. On l’invoque parce qu’on sait qu’un des attributs majeurs de Dieu, c’est sa miséricorde. On reconnaît que la miséricorde ne peut venir que de Dieu.

Lien avec l’évangile : « soyez miséricordieux, comme votre Père est miséricordieux ». On commence par reconnaître que la miséricorde vient de Dieu, mais on ajoute qu’elle peut rebondir sur nous, puisque nous devons ressembler à notre Père. Du coup, on donne des exemples de comment mettre cela en œuvre et on promet une réciprocité (« donnez, on vous donnera, etc »). Cet extrait d’évangile nous invite à entrer dans la dynamique de la générosité de Dieu. C’est très beau…

Mais c’est très dangereux, si on fait de ces versets une injonction moralisatrice : « parce que tu es un bon chrétien, tu dois être généreux, tu dois donner, tu dois pardonner… », sous-entendu : « si tu ne pardonnes pas, tu n’es pas un bon chrétien » … Perversion de la formule évangélique ! Et qui, dans le cadre des abus, a été utilisée comme une arme de soumission. Que de vies détruites ! Il y a bien là un péché systémique, collectif, une honte que nous devons assumer ensemble.

Au quotidien, le pardon comme habitude à prendre au cœur de nos relations agit rapidement et empêche que les blessures s’encroûtent. Mais il y a parfois des blessures et des traumatismes qui affectent l’être même de la personne. Le pardon, alors, est parfois tout simplement impossible, il ne peut jamais être exigé. Il ne peut y avoir de pardon sans justice et vérité. Le pardon peut survenir comme une grâce au bout d’un long chemin. Il passe par la grâce de la croix du Christ. Nous le verrons mercredi.

Prière

Père de toute miséricorde, en toi, le don est sans mesure. Apprends-nous à te ressembler. Ouvre nos yeux sur la réalité de notre péché et sur la grâce du pardon à recevoir et à donner. Fais-nous entrer dans la dynamique de ta générosité, afin que la grâce touche les cœurs et se propage à tous les niveaux de nos relations.

 

samedi 4 mars 2023

Liturgie de la Parole, 1er samedi de Carême

 

« Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait »

(Isabelle Halleux)

Introduction

En ce début de semaine, j'ai eu la grande joie de partager quelques jours avec mes petits-enfants de 10, 8 ans et 5 ans. « Challenge », écrivait Céleste dimanche sur son dessin : « Vous avez 40 jours pour préparer votre cœur … ». Et elle complète : « Comme on est au jour 4, parce que les dimanches ne comptent pas, il n’y en a plus que 36 ».  Et ce samedi, nous pouvons dire qu’il n’en reste que 30 !

La liturgie nous propose ce matin le livre du Deutéronome (Dt 26, 16-19) : Moïse y exhorte  à mettre en pratique, de tout son cœur et de toute son âme, les décrets et ordonnances commandés par Dieu, car Israël est le peuple élu, consacré au Seigneur.

Jésus va bien plus loin dans son Sermon sur la Montagne (Mt 5, 43-38). Il donne la vision essentielle de la vie chrétienne, qui défie les normes et les conventions de l’époque : il enseigne à ses disciples l’importance de l’amour et de la compassion envers les autres, même envers ceux qui sont considérés comme des ennemis. Une fameuse étape sur notre chemin de conversion, sur notre chemin de carême…

Avant de réécouter ces lectures, entrons en prière avec le chant des psaumes.

 

Témoignage

40 30 jours pour préparer notre coeur...

 Au programme ce mardi avec mes zèbres : le musée Ludwig à Cologne. C'est un musée d'art contemporain, choisi par Céleste (8 ans) qui va au cours de dessin et s'est trouvée une passion pour l'art. Je ne sais plus comment notre conversation a commencé dans la voiture, mais...

 

« Tu vois », me dit-elle, « on nous dit qu'il faut être parfait, qu'on ne peut pas faire de péché, qu'on doit pardonner à ceux qui nous font du mal, et patati et patata… Moi ça me met la pression et je crois que je n'y arriverai pas... Alors je préfère dire au Seigneur que je regrette mais que ce n'est pas possible pour moi de vivre ainsi. Alors, je ne veux pas faire ma première communion, c’est plus cohérent. Et ça pose problème à mes parents. »

 

Puisque les liens étaient évidents avec l'évangile du jour, je le lui ai raconté. Zoé a piqué du nez dans son livre, et Mathias qui jouait à l’avion de chasse s’est tu.

 

J’ai expliqué qu' « être parfait » ne signifie pas être irréprochable ou sans défaut : c'est chercher à toujours s'améliorer dans sa relation avec les autres et avec Dieu, comme Jésus nous l'a dit dans son Sermon sur la Montagne. C'est ça être « fils (ou fille) de Dieu ». On peut dire « qu’on s’accomplit dans son humanité par son amour pour les autres ». Jésus est accompli à 100 %. Il est parfait comme son Père est parfait. Un modèle pour nous.

 

J'ai aussi expliqué que « saluer ceux qui ne sont pas ses frères », ses amis, ce n'est pas une question de politesse, mais c'est une question d'accueil vrai de l'autre. Le mot grec qui a été utilisé par les apôtres veut dire aussi "embrasser". A Liège, on sait ça, on fait ça : on embrasse tout le monde ! Pense-t-on que c’est un signe d'accueil de l'autre comme il est ? Et cela nous apporte-t-il la paix et la joie ? Jésus nous encourage à être aimables et bienveillants envers tous, sans exception, même si on a des émotions complexes en les saluant.

 

« Et si tu n’as pas envie de pardonner ? », me demande Zoé.

 

Alors, il faut être patient, trouver la paix en toi et ça viendra. Tu parles à Dieu de tes émotions, de tes pensées, de ta colère même. Tu peux lui demander de l'aide ou de la force. C’est ça, prier ! Dieu t'écoute toujours. Cela peut produire un changement dans ton cœur et dans ton attitude envers ceux qui te font du mal. Cela peut t'aider aussi à les voir sous un autre angle, et à être prête à te réconcilier. Cela peut aussi parfois aider les autres à réfléchir à votre relation, rien que parce que tu les respectes mieux…

 

Vous savez ce que faisait Nelson Mandela quand il était en prison ? Dans son autobiographie, il écrit qu'il a prié pour ses geôliers et pour ses ennemis politiques, malgré les tortures et les mauvais traitements qu'il a subis. Il a trouvé en paix. « Comme Gandhi », ajoute Mathias qui sort de son silence.

Et la conversation est partie sur Mandela, sur l’apartheid, sur Gandhi… et sur l’intérêt de tenir un journal intime pour écrire son autobiographie !

 

A la sortie du musée, nous sommes repassés à la cathédrale juste à côté, et j'ai laissé Mathias les mains jointes dans une petite chapelle latérale. Il m'a rejointe quelques minutes après, en disant : « J'ai été dire une petite prière pour ceux qui m'agacent ».

 

Profitons de la fraîcheur des enfants pour nous rappeler que le chemin de carême passe par l’amour et par des « petites prières pour ceux qui nous agacent ».

 

Invitation au Notre Père

Avec Jésus, redisons la prière à son père…

 

Prière finale

« Cher Dieu, aide-nous à voir les autres comme tu les vois : avec amour et gentillesse. Nous voulons suivre ton exemple et être des amis pour tous ceux que nous rencontrons. Aide-nous à être des lumières pour les autres, à répandre ton amour et ta paix partout où nous allons. Merci pour ton amour envers nous. Au nom de Jésus, avec le Saint Esprit. Amen » (Zoé)