jeudi 28 avril 2022

Liturgie de la Parole, 2e jeudi du Temps Pascal

 (Danièle)

 Introduction

Des actes des apôtres, la lecture d'aujourd'hui nous montre le mécontentement du conseil suprême et du grand prêtre. Il voudrait que les apôtres se taisent, qu'ils cessent d'enseigner au nom de Jésus, « vous voulez faire retomber sur nous le sang de cet homme » dit-il.

Dans l’Évangile de Jean, il sera question du haut et du bas, du ciel et de la terre, du bien et du mal.

Dieu donne l'Esprit sans mesure, dès lors, pourquoi y aurait-il un conflit, un fossé  entre le haut et le bas ? Jésus, Parole de Dieu s'exprime en nous, il n'y a pas un instant où il n'est pas accessible. Le haut et le bas sont en nous.

Entrons dans cette célébration en chantant les psaumes.

Après l’Évangile

Dans cet Évangile assez court, on rencontre six  fois la phrase « celui qui » et une fois  « celui que ». Notre place véritable nous est donnée par ce leitmotiv « celui qui... »

Il y a le ciel et la terre. Le haut et le bas. Le ciel serait la demeure de Dieu. Ne dit-on pas « notre Père qui es aux cieux » ?  Quatre siècles avant Jésus-Christ, Aristote avait déjà soupçonné la rotondité de la terre mais dans l'Antiquité et au Moyen Age, des gens pensaient que la terre était plate. Au 20° siècle, depuis les photos prises à partir de la lune, il n'y a plus aucun doute. La terre est sphérique, alors si Dieu est au ciel, il est partout, tout autour.

Le ciel, le haut, serait le bien, le spirituel qui élève l'homme.

Au contraire, la terre, le bas, serait le mauvais, le matériel qui nous emprisonne... Haut, bas, devant, derrière etc. nous avons besoin de ces termes pour délimiter notre espace de vie. Et même si nos représentations de la terre ne sont plus celles de l'Antiquité, le haut et le bas restent pour nous « une puissance symbolique et même religieuse qui nous parle. Pourquoi regarder vers le haut ? Le texte de Jean veut faire entrer le lecteur dans le mouvement de l'envoyé... qui porte la lumière dans les ténèbres ».(Marc Wehrung, Bischeim)

L'amour de Dieu grandit le terrestre, Jésus en est le témoin. Il unit le mystère de Dieu et le devenir de l'homme. « Celui qui vient du ciel témoigne de ce qu'il a vu, il dit les paroles de Dieu » et nous ? Nous sommes de la terre et parlons en terrestre mais nous aurons la Vie éternelle parce que nous croyons au Fils, l'Esprit nous est donné sans mesure, à nous de le recevoir, il n'attend que notre consentement intime....

Jacob avait rêvé d'une échelle qui reliait la terre au ciel... Je pense que c'est un mouvement incessant du haut vers le bas et du bas vers le haut. Il y a un flux entre le Père, le Fils et l'Esprit « mais il y a aussi un autre flux, celui de l'homme, à l'intérieur » de notre cœur. Nous pouvons dire oui ou non pour recevoir le flux divin.

« Celui qui reçoit son témoignage, certifie par là que Dieu est vrai ».

« L'enjeu de chacune de nos vies à la lumière pascale, est bien de recevoir tous les faits et gestes de Jésus pour les écouter jusqu'au bout, pour les entendre vraiment, au point d'être mis en mouvement nous-mêmes » (Père Jean-Luc Fabre)

La dernière phrase est surprenante « celui qui refuse de croire, la colère de Dieu est sur lui » Dieu peut-Il se mettre en colère, lui qui est Amour.

Refuser l'Amour de Dieu, c'est refuser une attirance profonde vers Dieu et les autres, « c'est contrecarrer l'appel profond que son Esprit creuse en nous... c'est nous trouver dissociés, dans un mal-être qui peut nous faire signe qu'il y a quelque chose qui cloche dans la manière dont nous ordonnons notre vie. Nous pouvons ressentir cela comme une colère de Dieu, ou bien l'interpréter comme un appel qu'il nous fait à nous décider à marcher enfin vers la Vie ».(Père Joseph Lacretelle sj.)

Recevoir l'amour sans limite du Père qui est répandu sur nous par l'Esprit pour le donner aux autres, n'est-ce pas cette relation d'amour qui est décrite dans cet Évangile ? Ayons donc confiance !

Le haut, le bas, voyons plutôt cela comme  les étapes d'un voyage passionnant vers la vie éternelle.

Invitation au Notre Père

Comme Jésus nous l'a appris, prions notre Père !

Prière finale

« Celui qui croit au fils a la vie éternelle »

Seigneur, accorde-moi de croire en ton Fils, aide-moi à désirer la vie éternelle. Aide-moi à réaliser que ça commence aujourd'hui, maintenant.

Que l'exemple de ma vie invite les autres à croire en toi.

Quand je suis trop terre à terre, relève-moi !

mercredi 27 avril 2022

Liturgie de la Parole, 2e mercredi du Temps Pascal

 (Isabelle)

Introduction

Ce midi, nous allons entendre deux lectures dont je ne comprends pas bien le lien entre elles, sinon qu’elles annoncent toutes les deux la Bonne Nouvelle, ce qui en soi est réjouissant !

La première lecture, du chapitre 5 des Actes des Apôtres (Ac 5, 17-26), nous parle de l’emprisonnement des apôtres, de leur libération par un ange (parce qu’ils craignent Dieu, dit le psaume 33,8), et de leur intervention au temple pour enseigner « la parole de vie ».

L’évangile du jour est de Jean au chapitre 3 (Jn 3, 16-21). Certains versets de la bible sont tellement populaires qu’ils deviennent des phrases « culte ». Elles « font le buzz ». On les imprime sur des T-shirts, on en fait des magnets, on se les fait même tatouer sur le corps.  (Jn 3, 16) est un verset de ce type. Et pour cause : il résume à lui tout seul le thème central du christianisme : « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle ». Faut-il encore le réexpliquer alors que nous sortons des fêtes de Pâques ?

Les versets suivants nous parlent de ténèbres, de lumière, de jugement. Je vous propose de méditer la fin de cet évangile : « Celui qui fait la vérité vient à la lumière pour qu’il soit manifeste que ses œuvres ont été accomplies en union avec Dieu » (Jn 3, 21).

Méditation

« Celui qui fait la vérité vient à la lumière pour qu’il soit manifeste que ses œuvres ont été accomplies en union avec Dieu ».  Faire la vérité - la vérité de Dieu. En passant des ténèbres à la lumière - la lumière, c’est le Christ. Accomplir des œuvres en union avec Dieu – réaliser l’œuvre de Dieu. Ce verset m’a fait penser aux icônes, à la manière dont on les réalise, à la prière et l’exercice spirituel de l’iconographe.

Pour les orthodoxes, l’icône n’est pas une œuvre picturale que l’on contemple et qui aide à prier. L’icône est un objet sacré, qui manifeste la présence du Christ ressuscité et la plénitude de l’Esprit saint. Quel que soit le sujet représenté : un Christ, une vierge, un saint, une scène biblique, un épisode de la vie de Jésus.

L’iconographe, dans la tradition russe, après avoir dessiné les contours, peint d’abord les vêtements avec des couleurs foncées, suivant un canon défini, puis il couvre le visage et les parties du corps avec du « sankir », la couleur terreuse de la peau. Le fond sombre, « ténébreux », s’éclaircit par application de couches de plus en plus claires, en zones de plus en plus étroites ; la lumière apparaît ainsi progressivement, jusqu’au nimbe et au regard. Il y a là derrière une tradition et une symbolique fortes : la sainteté[1] passe, durant l’existence terrestre, des ténèbres à la lumière. L’icône nous le montre. L’iconographe le vit.

Quand on se dit la première fois qu’on peindrait bien une icône, c’est souvent parce qu’on a été saisi en en contemplant une. On souhaite entrer dans ce « mystère » et « écrire[2] » sa propre icône. Il faut du temps et de la patience : la tempera à l’œuf est une technique délicate, qui demande de poser des dizaines de couches minces, et de bien les laisser sécher, l’une après l’autre. On se sent souvent maladroit, démuni mais surtout impatient du résultat. Certains ne peindront qu’une seule icône, d’autres recommenceront. Ils disent entamer un chemin personnel vers Dieu. Ils y consacrent du temps : du temps pour la peinture, du temps pour la lecture, du temps pour la méditation, qui ouvre à la connaissance du sujet représenté, à la connaissance de soi-même et des autres, à la connaissance de Dieu. Vivre ce temps « donné » conduit à une transformation progressive de soi, avec prise de conscience de ses zones d’ombres, de ses zones de lumière, de son engagement à la suite du Christ.

Je peux dire aujourd’hui que la pratique régulière de l’iconographie a changé ma manière de prier, et sans doute aussi ma manière d’être. Cela me permet de m’ouvrir à l’œuvre de Dieu, c’est-à-dire, à ce que Dieu opère en moi. Des parties de ma vie, de mon quotidien, re-font surface. Elles ne sont toujours roses, elles me mettent parfois en tension. Je laisse alors un peu les pinceaux de côté, je me mets en présence du Seigneur puis je reviens, quand je peux « faire la vérité ». Le cœur se transforme petit à petit. Un peu comme si l’icône se plaçait à un niveau existentiel « juste », que son authenticité se trouvait dans le face-à-face entre elle et moi. Je suis souvent surprise de la résonnance en moi d’un sujet que j’ai choisi je ne sais pas trop pourquoi. La résonnance est amplifiée quand je peins à la demande d’un ami. C’est une expérience pacifiante et à la fois bouleversante. On dit que l’« on écrit comme on respire ». On respire aussi comme on écrit l’icône.

Quand le travail est terminé, il n’y a plus l’angoisse des défauts et des traits maladroits. Il y a la joie de la lumière, la joie du chemin parcouru « en union avec Dieu » et la joie de l’avenir qui se profile. L’icône donnée illuminera d’autres personnes, inconnues, anonymes, de tout horizon, de tout âge. « Il est manifeste que l’œuvre de Dieu a été accomplie en union avec Dieu ».

Je vous ai apporté une planche représentant le Christ Pantocrator[3], qui en est à l’étape des aplats, de l’ombre, des ténèbres. Il reste, pour la rendre icône, à en faire émaner la lumière, comme le montre la seconde.  En la contemplant, nous bénéficions du regard posé par le Christ sur nous, de sa lumière, de son rayonnement. Il nous invite à le suivre, en vérité. Osons dépasser l’objet : entrons dans la lumière, dans la prière, dans la joie du Ressuscité. « Celui qui fait la vérité vient à la lumière pour qu’il soit manifeste que ses œuvres ont été accomplies en union avec Dieu ». C’est vrai pour l’iconographie, c’est vrai aussi pour autre tout moment de notre vie de témoin, de chrétien !

 Oraison

Seigneur Dieu, tu as tant aimé le monde que tu as donné ton fils unique pour nous sauver. Nous essayons de marcher à sa suite et de nous inscrire dans ton dessein en nous ajustant à toi dans les différentes dimensions de notre existence. Cela nous demande en permanence de nous convertir, d’utiliser nos ressources, nos dons, nos charismes et de les mettre à la disposition des autres, de ta création, de ton Eglise. Tu nous donnes la grâce pour y arriver. Donne-nous de l’accueillir chaque jour que tu fais. Nous te le demandons par Jésus-Christ, ton fils, notre Seigneur, qui vit et règne avec toi et le Saint Esprit pour les siècles des siècles.


[1] Etre saint, ce n’est pas atteindre un idéal de perfection, mais consentir joyeusement à ce que nous sommes et nous laisser transformer par Dieu. La sainteté jaillit de la vie. Dieu nous y invite chacun et chacune. (Jacques Gauthier, 2019, Devenir saint, Ed. Emmanuel)

[2] Peindre ou écrire une icône ? Je n’entre pas dans le purisme des mots, rejoignant en cela Elisabeth Lamour (https://iconeslamour.wordpress.com/2021/01/08/ecrire-ou-peindre-une-icone/).

[3] Le « Pantocrator » est une représentation du Christ en gloire, en buste, tenant le livre des Saintes Ecritures dans la main gauche et levant la droite dans un geste de bénédiction. Voir les photos jointes.

samedi 23 avril 2022

Liturgie de la Parole, samedi de l'octave de Pâques

 (sœur Marie Raphaël)

Ouverture

Quel contraste entre les deux lectures de ce jour ! Dans le récit des Actes, nous voyons Pierre et Jean pleins d’assurance devant le Conseil suprême : « Est-il juste devant Dieu de vous écouter plutôt que d’écouter Dieu ? à vous de juger. Quant à nous, il nous est impossible de nous taire sur ce que nous avons vu et entendu ». Et d’autre part, dans l’évangile, comme ils ont de la peine à croire ceux qui leur disent que Jésus est vivant ! L’évangile de Marc ne se termine pas en apothéose, comme un chant triomphal. Il insiste plutôt sur le doute, la perplexité, la peur, le mutisme, la difficulté de croire. Cela nous rejoint dans notre quête de la vérité.

Résonances

Dans ces six versets d’évangile que nous venons d’entendre, nous avons rencontré 4 fois l’expression « ne pas croire » ou « refuser de croire ». Quand Marie-Madeleine vient leur dire que Jésus est vivant et qu’elle l’a vu, ils refusent de croire. On pourrait dire : voilà encore un bel exemple de misogynie. C’est parce qu’elle est une femme qu’ils refusent de lui accorder leur confiance. Mais tout de suite après, il est question de deux disciples qui leur font le même témoignage. Et ils ne les croient pas non plus. Vient ensuite Jésus lui-même : il commence par leur reprocher leur manque de foi, leur dureté de cœur. Puis il les envoie à leur tour proclamer l’évangile à toute la création.

Cette fin de l’évangile de Marc est frappante par son insistance sur la difficulté de croire et le défi de témoigner. Vraiment, il semble que le témoignage ne suffit pas, qu’il y faut quelque chose de plus, qui serait l’expérience d’une rencontre personnelle avec le Ressuscité. Le témoignage est tout juste là pour préparer le terrain à cette rencontre.

Alors, croire, c’est quoi ? Voici une piste que nous donne l’évangile : Jésus leur reproche leur « dureté de cœur », leur sclérocardie. La foi se situe là : non dans l’intelligence, dans notre désir de comprendre, de saisir les choses par la faculté d’intelligence, mais dans le cœur. Et quand le cœur est dur, l’expérience ne peut se faire. Le cœur n’est pas le sentimentalisme, mais le centre de l’être. Il s’agit de percevoir els choses avec le cœur.

Autre piste : il n’est pas dit que Jésus vient à eux et puis repart, il est dit que Jésus se manifeste à eux, se fait voir. Autrement dit, il est déjà là, il est toujours déjà là, mais on ne le voit pas nécessairement. Plutôt que d’apparition, il faudrait parler de « transparition ». Il transparaît à travers une expérience, un événement, une parole, et soudain sa présence devient manifeste, alors qu’avant elle ne l’était pas. Pour percevoir cela, il faut les yeux du cœur. « L’essentiel est invisible pour les yeux, on ne voit bien qu’avec le cœur », disait quelqu’un de célèbre… D’où cette insistance sur la sclérocardie : le contraire de la foi, ce n’est pas le doute, mais la dureté du cœur.

Pour venir à bout de cette dureté de cœur, il suffirait peut-être de déverrouiller la porte, de l’entrouvrir pour laisser passer la lumière. La lumière est là, mais si notre porte est close, elle n’entrera pas, elle ne force rien. Si nous ouvrons la porte, la lumière entrera sans rien forcer et rendra visible les choses qui étaient déjà là, mais que nous ne pouvions pas voir.

Seigneur, donne-nous de regarder toute chose dans cette lumière-là : la lumière de la résurrection.

Prière.

Seigneur Jésus, manifeste-toi à nous, donne-nous de voir par transparence ta présence vivante et vivifiante au cœur du monde. Et donne-nous d’en témoigner sans crainte, non seulement en paroles, mais par toute notre vie. Une vie qui se nourrit de ta vie pour la donner en partage.

jeudi 21 avril 2022

Liturgie de la Parole, jeudi de l'octave de Pâques

 (Danièle)

 Introduction

 Dans le livre des actes des apôtres, après avoir guéri un infirme, Pierre s'adresse au peuple dans un long discours :  « ce n'est pas en vertu de notre puissance que nous l'avons fait marcher... Vous avez tué le Prince de la vie, lui que Dieu a ressuscité des morts ». Pierre invite les gens, nous invite, à nous convertir et à nous tourner vers Dieu.

Dans l’Évangile d'hier, les disciples d'Emmaüs ont reconnu Jésus à la fraction du pain, alors, ils sont vite retournés à Jérusalem pour raconter cette rencontre aux apôtres et c'est alors que Jésus s'est  trouvé au milieu d'eux.

Le cœur des disciples était brûlant quand Jésus leur parlait des Écritures.

Soyons dans la joie !  Christ est vivant ! Chantons les psaumes et laissons la Parole brûler notre cœur ! Il est vraiment ressuscité !

 Après l’Évangile

Jésus rassure ses amis, « la paix soit avec vous , ne soyez pas bouleversés, c'est bien moi, touchez-moi ! » Il vient en consolateur, avec des paroles de paix. Il montre ses plaies et mange avec eux. Il n'est pas un fantôme, il est le même qu'avant, bien que dans un nouvel état. Ses blessures sont la meilleure preuve de son identité. La mort et la vie sont étroitement liées, mais la Vie a le dernier mot. (1.)

Celui qui est là, bien vivant, c'est bien lui que les apôtres ont vu mourir sur la croix. La vérité sur Pâques, les frappe. Jésus leur rappelle les paroles qu'il leur avait dites « Il est écrit que le Christ souffrirait, qu'il ressusciterait d'entre les morts, le troisième jour »

Les évangélistes nous présentent, lors de ces rencontres, un Jésus tout simple, accessible. Rien de spectaculaire ou tapageur. « La stupeur des disciples, leurs craintes, leurs hésitations à croire soulignent la difficulté qu'ils éprouvent à entrer dans cette manière inédite de rencontrer désormais le Christ. Il faut un cœur attentif et une âme ouverte à sa présence, soudaine et inattendue parfois, pour le reconnaître» (2)

Les apôtres dans leur joie, n'osaient pas encore y croire... Dans une homélie, le pape François a déclaré « Nous avons peur de la joie, et Jésus, par sa résurrection, nous donne la joie : la joie d'être chrétien, la joie de le suivre de près, la joie de prendre la route des béatitudes, la joie d'être avec lui. Cette peur de la joie est comme une maladie du chrétien »...

Non, la résurrection n'est pas un fantasme. Ce n'est pas un Jésus évanescent, mais un Christ pleinement corporel qui mange et que l'on peut toucher. L'incarnation et la résurrection ne peuvent être séparées. Jésus est à la fois pleinement homme et pleinement Dieu. (3)

« Jésus, arraché à notre condition mortelle , n'arrête pas de nous donner des signes discrets et des moyens nécessaires pour se faire reconnaître ». (4)

Ce soir-là, les apôtres auraient pu être nous : inquiets, incrédules, déçus, désespérés avec si peu de confiance en la Parole « comment ne pas s'y reconnaître ? Pourtant voici que le Christ se tient au milieu de nous et dit « la Paix soit avec vous ! (5)

Soyez les témoins de ma résurrection, portez aux hommes le pardon et la paix du ressuscité! »

Invitation au Notre Père

Dans la joie de la résurrection, adressons-nous à notre Père avec la prière des  chrétiens du monde entier.

Prière de conclusion

Seigneur, tu nous dis « ne soyez pas bouleversés ». Dans cette joie de Pâques, malgré les questions que nous nous posons parfois, aide-nous  à avoir une confiance absolue en toi et à être des témoins de ta Bonne Nouvelle.

Ouvres notre esprit et fais-nous comprendre que tu es une réalité vivante, que tu es avec nous et que tu nous accompagnes.

Nous te rendons grâce encore pour ton amour infini et ta miséricorde, à toi qui vis et règnes avec le Père et l'Esprit pour les siècles des siècles.


(1)   Jésuites d'Irlande

(2)   Homélie Abbé Gillet

(3)   Pasteur Bernard Mourou, France

(4)   Blog Cath. Ch

(5) Carmel saint Joseph

mercredi 20 avril 2022

Liturgie de la Parole, mercredi de Pâques

 SMJn Noville

 Introduction

Nous voici rassemblés en communauté, en Eglise.

En ce mercredi de Pâques, la liturgie nous offre deux beaux récits.

Dans les Actes des Apôtres, nous écouterons la démarche des deux disciples Pierre et Jean à la « Belle-Porte » du Temple. Ils y rencontrent un infirme qui, grâce au nom de Jésus, peut se relever.

Dans l’évangile, un autre relèvement nous est raconté.

Il s’agit du très célèbre cheminement des disciples d’Emmaüs, rejoints par Jésus sur la route de leur désespérance. Une rencontre pascale dont on n’épuisera jamais la fécondité.

Ces deux récits, nous les avons déjà maintes fois écoutés et réécoutés.

Et pourtant, aujourd’hui, Dieu nous parle à neuf à travers eux.

C’est à des cœurs nouveaux que Dieu s’adresse, en ces fêtes pascales de 2022.

Par ces deux récits, le Seigneur frappe à la porte de nos cœurs.

Il désire être rencontré par nous. Il a soif de se faire reconnaître.

Rejoignons l’invitation du psalmiste :

« Cherchez le Seigneur et sa puissance, recherchez sans trêve sa face… »

Méditation

La rencontre de Jésus par les disciples d’Emmaüs est extraordinaire…

On peut contempler l’approche si délicate de Jésus, son écoute attentive de leurs confidences, sa relecture des événements à la lumière des Ecritures et la liberté qu’il leur laisse de le retenir avant d’aller plus loin.

Jésus est un modèle de compagnonnage sur le chemin de nos vies.

En face de lui, deux disciples, dont les yeux sont « empêchés de le reconnaître » ; et qui, grâce à leur accueil de Jésus, « s’ouvrent ».

Deux disciples qui peuvent alors, pleins d’enthousiasme, repartir à Jérusalem, tandis que « le soir approche et (que) le jour baisse » ; qui peuvent s’élancer pour retrouver les autres disciples et leur annoncer la Bonne Nouvelle : « Le Seigneur est réellement ressuscité ! ».

Et nous ?

Accepterons-nous de cheminer avec Jésus pour recevoir, de Lui, des yeux qui puissent le reconnaître, qui puissent percevoir les traits de son visage en Sa Parole, en nos frères et sœurs, en notre monde, dans notre actualité, dans les événements ?

Allons encore plus loin… Pouvons-nous découvrir en filigrane, en ce repas pris avec Jésus, la rencontre ultime, les agapes éternelles ?

Pouvons-nous renouveler en nos cœurs le désir de cette rencontre, du face-à-face avec Lui ?

Comme l’écrit le Père Bruno Chenu : Emmaüs est comme « le rendez-vous à venir du croyant, qui sera comme la table du Royaume de Dieu »[1].

Pour savourer cette perspective et disposer nos cœurs à la prière, je voudrais vous citer un poème de Georges Haldas, auteur contemporain de la littérature Suisse romande (décédé en 2010). Son poème est intitulé « Maison du soir » :

« À pas lents nous irons

vers la maison du soir

où brillent les olives

où les poissons eux-mêmes

après leur mort revivent

où l’huile a la douceur

et l’éclat de l’enfance.

On reverra ceux-là

qu’on avait tant aimés

partager le repas.

La nappe sera blanche

le pain sera coupé

par des mains fraternelles

le vin par toi versé.

On entendra dans l’ombre

les cigales se taire

un oiseau bleu voler.
Et le sel de la nuit

versera sur nos plaies

un peu d’éternité »[2]

 

Temps de silence

Notre Père : 

Dans la joie pascale, redisons la prière des enfants de Dieu…

Oraison :

Seigneur, ton Fils ressuscité s’est fait reconnaître des disciples sur la route d’Emmaüs. Aujourd’hui encore, il désire notre rencontre. Accorde-nous de cheminer avec Lui, afin que nous puissions reconnaître en notre aujourd’hui et en notre monde, Celui qui « nous parle sur la route et nous ouvre les Ecritures ». Seigneur, en ce jour, que Sa présence brûle nos cœurs ! Nous te le demandons par Jésus-Christ, ton Fils ressuscité, qui règnes avec Toi et le Saint-Esprit, un seul Dieu pour les siècles des siècles.

Bénédiction :

Que le Seigneur nous bénisse et nous garde…



[1] Br. Chenu, Disciples d’Emmaüs, Paris, Bayard, 2003, p. 26.

[2] Dans Croire (mensuel des paroisses de l’Eglise évangélique du canton de Vaud), n° 55 (mars 1986), p. 1.

mercredi 13 avril 2022

Liturgie de la Parole, mercredi de la Semaine sainte

 (Isabelle)

 Introduction

 Nous allons entendre une première lecture du livre d’Isaïe, au chapitre 50 (Is 50, 4-9a). Avec ce verset 4 qui en a inspiré plus d’un : « Chaque matin, le Seigneur éveille, il éveille mon oreille pour qu’en disciple, j’écoute ». C’est très bénédictin, ça !

 L’évangile du jour est de Matthieu, au chapitre 26. Il nous parle de Judas. Nous en avons entendu parler hier, par deux fois. Vous savez que les titres donnés aux lectures de l’évangile, reprennent en général un verset significatif du texte. Aujourd’hui, l’AELF donne : « Le Fils de l’homme s’en va, comme il est écrit ; mais malheureux celui par qui il est livré ! » (Mt 26, 14-25). En effet, malheureux ce Judas, qui laisse à la postérité l’image d’un traître, possédé du démon.

 Chantons les psaumes et entrons en prière.

 

Méditation

 Si nous nous contentons d'une lecture au premier degré de ce passage de l’évangile de Matthieu, nous ne verrons en Judas que celui qui a livré le Christ et que l'on nous présente souvent comme un traître.

 Ne cherchons pas à comprendre la personnalité de ce disciple dont l'évangile ne nous dit pas grand-chose finalement, sinon que pendant plus de trois ans, il a été un proche de Jésus. Jésus l’appelait « mon ami ». C’est tout dire ! N'essayons pas non plus de tirer une leçon morale de ce texte, mais méditons-le dans une perspective théologique, pour nous plonger dans le mystère pascal et le triduum qui s'annonce. Nous y verrons alors un "Judas Soleil" comme l’appelle Anne Soupa[1].

 Judas, de la Tribu de Juda, le seul non galiléen des douze. L’ancêtre, Juda (sans « s »), rappelez-vous Gn 37, avait réussi, sans le vouloir directement, à transformer le projet de mort de ses frères en une source de vie, en s'interposant pour que Joseph ne soit pas tué. Joseph a été vendu à une caravane de passage. Il sortira les Hébreux d’Egypte. Joseph dira (c’est tout à la fin du livre de la Genèse - Gn 50, 20) : « Le mal que vous aviez dessein de me faire, le dessein de Dieu l’a tourné en bien afin d’accomplir ce qui se réalise aujourd’hui : sauver la vie à un peuple nombreux ».

 Ce Judas-ci (avec un « s ») va livrer Jésus. Jésus n'est pas mort parce que Judas l'a livré ! Jésus est mort parce que le dessein salutaire de Dieu s'accomplit par sa mort. Il s'accomplit à travers cette « livraison » par Judas, qui a presque le sens de « donné ». « Corps du Christ livré pour nous. Sang du Christ versé pour nous. », chantons-nous lors de l’eucharistie. « Corps du Christ livré pour nous ». Jésus se révèle Sauveur de l’humanité,  humanité dans laquelle le mal existe, un mal que Judas est sans doute incapable de combattre, un mal avec lequel il faut apprendre à vivre, sans le gommer.

 Dans cet évangile, Matthieu nous parle de celui qui est « le déclencheur » de la Passion du Christ : Judas. Tout ce que le christianisme apporte d’original sur le mal se lit dans ce texte, à travers le respect de Jésus envers Judas, de la liberté qu’il lui laisse, alors qu’il sait qu’il va le livrer. Cet évangile nous parle de foi, de cette possibilité que nous avons de choisir la vie, l’alliance avec un Dieu qui appelle à la liberté et au bonheur. De la liberté que nous avons de dire « oui » ou « non » à l’invitation à suivre le Christ. Judas semble avoir opté pour le « non ».

 « Malheureux celui par qui il est livré ». Malheureux Judas ! Humain trop humain, qui n’arrive pas à faire vivre cette amitié du Christ et qui, déçu sans doute et désespéré, n’a pas compris que le Christ l’a considéré comme un homme libre, un sujet à part entière – ne lui lavera-t-il pas les pieds, ne l’invitera-t-il pas à son dernier repas ? –. Malheureux Judas qui n’a pas compris que Jésus entend son malheur, le plaint de ce qu’il va endurer (« il vaudrait mieux pour lui qu’il ne soit pas né »), ne le condamne pas et l’aimera, comme les autres, jusqu’au bout. Malheureux Judas qui n’a pas écouté la parole de Jésus.

 Et en même temps, Heureux Judas ! Heureux Judas qui n’est pas exclu. Heureux Judas dont Jésus prend sur lui le mal, Judas qui bénéficie, même s’il ne s’en rend pas compte, du pardon accordé à la multitude.  

 « Judas », lui dit Anne Soupa en conclusion de son livre, « nous autres, lecteurs des évangiles, nous t’avons accompagné et nous t’accompagnerons encore, de Semaine sainte et Semaine sainte, en silence et en paroles, car ton histoire pénètre jusqu’à la moelle de nos os. Et à chaque fois, il nous reviendra de transformer ce que nous aurons appris de toi, à cause de toi et avec toi, en une leçon de sagesse et de vie ».

 Notre Père

Nous nous tournons vers Toi, Seigneur, et avec Jésus, Ton fils, nous redisons la prière qu’il nous a enseignée : …

 Oraison

Seigneur, nous te prions avec les chrétiens d’Ukraine, en utilisant les paroles de la divine liturgie de Saint Jean Chrysostome :

Seigneur notre Dieu, toi dont la force est incomparable, la gloire incompréhensible, la miséricorde infinie et l’amour pour les hommes ineffable, toi, selon ta miséricorde, jette ton regard sur nous et sur cette sainte maison. Répands sur nous et sur ceux qui prient avec nous, l’abondance de ta miséricorde et de ta tendresse. Parce que Tu es un Dieu bon et ami de tous les hommes, nous te rendons gloire, Père, Fils et Saint-Esprit, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles.



[1] Anne Soupa, « Judas, le coupable idéal », Albin Michel, 2018, 232 p.

lundi 11 avril 2022

Liturgie de la Parole, lundi saint

 (sœur Marie-Christine)

 Introduction :

Bonjour et bienvenue à cette célébration de la Parole en ce Lundi Saint.

Le si beau texte d’Isaïe est comme un portrait de Jésus : nous ne pouvons que le ruminer en notre cœur.

L’évangile nous raconte l’onction de Jésus par Marie de Béthanie, six jours avant la Pâque. Pour cette onction Marie utilise un parfum très précieux et de très grande valeur que la traduction liturgique ne nomme pas mais qui est le « nard ». Nous méditerons sur ce parfum.

« je fais de toi l’alliance du peuple, la lumière des nations » dit le Seigneur à son Serviteur : chantons, au moyen des Psaumes, le Christ Lumière des nations.

 Méditation :

Autour de la Pentecôte nous avons eu la chance d’avoir une retraite prêchée en vidéo conférence par Sœur Anne Lécu « des parfums et des fruits ». Lors de la 1ère conférence elle a commenté l’onction à Béthanie d’abord chez Marc (14,1-11) puis chez Jean (12,1-7) : je vous en donne la transcription.

Ce qu’elle dit peut nous nourrir en ces premiers jours de la Semaine Sainte.

 « Le nard est très peu évoqué dans les textes bibliques. C’est une essence très singulière qui n’est mentionnée que dans le Cantique des cantiques, l’Onction à Béthanie chez Marc et Jean… Son odeur très forte ferait penser à la putréfaction des feuilles de la forêt. Elle a toujours été considérée comme une plante exotique archi précieuse.

L’essence de ce qu’est un parfum depuis toujours dans nos cultures, c’est que le parfum est là pour recouvrir l’odeur de la mort. Le nard est spécialement prisé pour embaumer les cadavres…

Grâce à cette femme le corps de Jésus est par avance préservé de la dégradation de la mort. À minima c’est une forme de proclamation de la résurrection de la chair, faite à son insu peut-être, par une inconnue dont on ne sait rien. (cf. Marc).

Lorsque la femme verse un nard pur, fiable, sur la tête de Jésus, les hommes qui sont présents évaluent ce parfum à 300 deniers. Le dernier est le salaire d’une journée, le parfum est très cher, presque un an de salaire.…

Lorsque Jésus sera livré on dira dans un autre évangile (Matthieu 26,15) qu’on peut en tirer 30 pièces d’argent (soit en gros 120 deniers, le prix fixé par la loi pour la vie d’un esclave). Ce parfum vaut 3 fois plus que la vie de Jésus !

Le nard pur versé ici est hors de prix. Quand on dit hors de prix, il s’agit de bien comprendre qu’on veut dire hors de toute valeur, hors du champ d’évaluation. Il nous indique que lorsque nous touchons aux graves questions de l’existence, la vie, la mort, l’amour, nous ne sommes plus dans le champ du quantifiable ou de l’évaluable, nous sommes ailleurs, hors valeur.

 En Marc le flacon est brisé. La femme joue par avance la scène que l'on découvre en son chapitre 14 dans la Passion du Christ : le véritable flacon brisé c'est le corps du Christ ; le véritable nard pur, l'unique nard fiable, c'est sa vie livrée : Il ne pourra embaumer qu'une fois vidé de lui-même (cf. Philippiens 2,6-11)

 Jean lui insiste sur l’odeur qui emplit la maison et son récit se situe lui aussi juste avant la Passion :

 Il semble que Jean s'inspire beaucoup du Cantique des cantiques comme dans de nombreux autres passages. En effet le seul autre endroit où il est question de nard c'est le Cantique.

La seule fois où, dans l'évangile de Jean, Jésus reçoit une onction, où il est reconnu comme Messie par une onction c'est de la part de cette femme Marie. D'une certaine manière, Marie, en oignant Jésus de parfum, le fait Christ ». [1] (Christ = celui qui a reçu l’onction)

 Laissons-nous pénétrer par la bonne odeur du Christ, et que cette odeur remplisse la maison, l’Église, la famille humaine.

 Prière d’envoi :

Seigneur Jésus, Prince de la vie, tu donneras ta vie librement par amour, comme un nard très pur et très fiable versé pour que les hommes aient la vie et qu’ils l’aient en abondance. Libère notre cœur de tout ce qui l’entrave et donne-nous de répondre avec largesse et sans compter à ton mystère d’amour.

Toi le nard précieux du Père qui veut embaumer nos existences et nous conduire, dans l’Esprit, à la Vie avec Dieu dès maintenant et pour toujours.



[1] Sœur Anne Lécu « Des parfums et des fruits » retraite en vidéo conférence. 1ère conférence, Hurtebise 22 mai 2021

mercredi 6 avril 2022

Liturgie de la Parole, 5e mercredi de carême

(sœur Marie Raphaël)

Ouverture.

« La vérité vous rendra libres ». Liberté, vérité. Ces deux mots nous parlent à travers les lectures d’aujourd’hui. Qu’est-ce que la liberté ? la vérité ? La question est brûlante : aujourd’hui, la guerre est aussi la guerre de la communication. Les images que nous voyons, sont-elles vraies ou truquées ? trafiquées ? La communication est lieu de manipulation. La vérité ne va absolument pas de soi. Qui croire ? Car oui, il semble bien que la vérité soit de l’ordre de la foi, et donc d’un témoignage fiable.

 Résonances

Pour commenter ces textes, le missel de Clervaux propose une citation de Gustave Thibon : « L’homme n’est pas libre dans la mesure où il ne dépend de rien ni de personne : il est libre dans la mesure où il dépend de ce qu’il aime, et il est captif dans l’exacte mesure où il dépend de ce qu’il ne peut aimer. Ainsi, le problème de la liberté ne se pose pas en termes d’indépendance, il se pose en termes d’amour. Notre puissance d’attachement détermine notre capacité de liberté »[1].

La liberté est donc à la fois attachement et détachement. Le juste attachement et le juste détachement. Sidrac, Misac et Abdénago, les trois jeunes gens dans la fournaise, sont tellement attachés à leur Dieu qu’ils sont détachés de leur propre vie. Nabuchodonosor, au début, est prisonnier de sa colère, et aussi de son propre pouvoir et prestige. Il apprécie ces trois jeunes gens, mais il est pris au piège de sa propre parole et risquerait de perdre la face devant ses sujets s’il leur faisait grâce.  Mais il se laisse bouleverser par leur liberté intérieure. Une liberté qui les fait bénir Dieu au cœur de la fournaise. Et il acquiert lui-même la liberté de se remettre en question, d’aller à l’encontre de sa propre décision, de les délivrer et de bénir leur Dieu. Nabuchodonosor, roi cruel qui a provoqué la ruine de Jérusalem, apparaît dans le livre du prophète Daniel comme le modèle d’un roi païen capable de se convertir par rapport à sa propre violence et son attachement au pouvoir. Et cela, par la grâce de la liberté des autres.

C’est au nom de ce Dieu de liberté que Jésus invite ses interlocuteurs à croire en lui, à s’attacher à lui. « Si vous demeurez fidèles à ma parole, vous êtes vraiment mes disciples. Alors, vous connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libres ». Thibon : « notre puissance d’attachement détermine notre capacité de liberté ». Jésus suggère que notre attachement à la vérité nous rendra de plus en plus libres. Mais qu’est-ce que la vérité ?

Le thème de la vérité parcourt tout l’évangile de Jean et culminera dans la question de Pilate : « qu’est-ce que la vérité ? » Pilate n’est pas libre, même s’il a le pouvoir. Il est prisonnier de son pouvoir, de son attachement au pouvoir. Jésus en paiera le prix. Jésus, lui, sera libre jusqu’au bout : « ma vie, nul ne la prend, c’est moi qui la donne ». Et par sa liberté, il nous délivrera tous. Il nous délivrera de nos attachements mortifères, du mensonge, du goût du pouvoir, de la colère et de la jalousie. Engageons-nous à sa suite sur ce chemin de liberté et de vérité. Sur ce chemin de foi.

 Prière.

Seigneur, délivre-nous du mensonge, attache-nous à la vérité qui nous rendra libres. Marche dans la fournaise aux côtés de ceux qui témoignent de leur foi jusqu’à en mourir. Marche dans la fournaise aux côtés de ceux qui s’engagent pour la paix et résistent au mensonge. Avec eux, donne-nous de chanter ce cantique : « à toi, louange et gloire éternellement ».



[1] G. Thibon, cité par C. Chabanis, Gustave Thibon, témoin de la lumière, Paris, Beauchesne, 1967, p. 145

samedi 2 avril 2022

Liturgie de la Parole, 4e samedi de carême

 (sœur Marie Raphaël)

Ouverture

Dans la première lecture, le prophète Jérémie comprend qu’il y a un complot contre lui, qu’on en veut à sa vie. Il le dit à Dieu et lui remet sa cause. Au chapitre 7 de l’évangile de Jean, nous voyons que Jésus lui aussi est conscient du fait qu’on veut le tuer. C’est pour cela qu’il hésite à se rendre à la fête des Tentes. Comme nous l’avons vu hier, finalement, il s’y rend quand même, discrètement. Puis il va enseigner dans le temple. On voit que les avis, autour de lui, sont partagés. Ça discute beaucoup. Puis, le dernier jour de la fête, il prend la parole de façon plus solennelle : « Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi et qu’il boive ». L’extrait de l’évangile que nous allons entendre vient juste après. Mais commençons par chanter les Psaumes.

Résonances

Il en faut du courage à Nicodème pour sortir de l’ombre et prendre le contrepied des autres Pharisiens. Eux, ils ont trouvé l’argument choc : l’Ecriture dit que le Messie doit venir de Bethléem et de la descendance de David. Or, Jésus vient de Galilée. Il ne peut donc ni être prophète, ni messie. Point final. Voilà une belle façon de mettre l’Ecriture au service de ce qui nous arrange.

Nicodème part aussi de l’Ecriture, et même de la Loi : « notre Loi permet-elle de juger un homme sans l’entendre d’abord pour savoir ce qu’il a fait ? à cette question pleine de bon sens, les autres opposent une fin de non-recevoir, sur le ton de l’ironie : « cherche bien et tu verras que jamais aucun prophète ne surgit de Galilée ! C’est l’argument du « cela ne s’est jamais vu, donc cela ne se verra jamais ». Cet argument est très faible. Il révèle seulement leur mauvaise foi, leur préjugé, leur refus de se laisser instruire. Comme s’ils craignaient de se laisser séduire…

La peur, nous l’avons appris, est un puissant moteur d’action (ou d’inaction). Aussi puissant que la colère. Mais la peur n’est jamais bonne conseillère. Un autre moteur d’action est la curiosité, la décision consciente de se laisser étonner. Nicodème ose ouvrir cette porte. Nicodème apparaît trois fois dans l’évangile de Jean. Au chapitre 3, il montre sa curiosité, mais c’est encore de nuit. Au chapitre 7, sa curiosité se transforme en audace d’aller à contrecourant de ses confrères. Nous le retrouverons au chapitre 19 quand, après la mort de Jésus, cette audace le fera avancer vers la lumière et prendre l’initiative, avec Joseph d’Arimathie, d’offrir l’hommage dû au corps mort de Jésus.

Face à Jésus, chacun de nous fait un chemin de foi personnel. Puissions-nous cultiver la curiosité et le désir d’apprendre, puis sortir de l’ombre et remonter le courant des opinions méprisantes, puis affirmer clairement notre foi, quand l’occasion se présente, en offrant comme Nicodème les aromates d’une vie accordée à la grâce de notre nouvelle naissance.

Prière

Seigneur Jésus, devant ta Parole bouleversante, tu nous demandes de prendre position. Éveille notre curiosité, fais-nous cheminer vers toi, fais grandir notre foi. Ainsi, nous créerons une brèche pour que ton mystère pascal se prolonge dans notre monde et que ton salut advienne pour nous et pour l’humanité.