Ct 5
(Elle) 2 Je dors, mais mon cœur
veille… C’est la voix de mon bien-aimé ! Il frappe !
(Lui) Ouvre-moi, ma sœur, mon amie, ma colombe, ma parfaite,
car ma tête est humide de rosée et mes boucles, des gouttes de la nuit.
(Elle) 3 J’ai ôté ma tunique : devrais-je la remettre ?
J’ai lavé mes pieds : devrais-je les salir ?
4 Mon bien-aimé a passé la main par la fente de la porte ;
mes entrailles ont frémi : c’était lui !
5 Je me suis levée pour ouvrir à mon bien-aimé, les mains
ruisselantes de myrrhe. Mes doigts répandaient cette myrrhe sur la barre du
verrou.
Viens Esprit Saint,
donne-nous des oreilles pour entendre ton appel, donne-nous la promptitude pour
y répondre tant qu’il est encore temps.
(Elle) Je dors, mais
mon cœur veille… : ce nouveau poème, le quatrième, débute sur le
passage le plus étonnant et le plus interpelant du Cantique. Nous la retrouvons
chez elle, seule, et endormie. Que l’amour humain ait des hauts et des bas,
nous ne le savons que trop. Mais le contraste est violent avec la fin du poème
précédent où le chant avait atteint un sommet : la bien-aimée s’était
donnée totalement, le bien-aimé était venu en son jardin, et avait invité le
monde entier au banquet de ses noces. Une vraie fin de roman ! Elle n’est
donc pas (encore) unifiée dans l’amour. « Son meilleur vin est (encore) coupé d’eau » comme disait Esaïe
(1,22). Comme les apôtres lors de la transfiguration, elle est prise par le
sommeil, et, comme eux, elle veut veiller… Ainsi son cœur est partagé, n’est
pas encore vraiment attentif.
C’est la voix de mon
bien-aimé ! Il frappe ! : cette fois, elle ne l’entend pas bondir de
loin, mais perçoit un simple coup contre sa porte. Il a de nouveau surgi aussi
discrètement que soudainement. C’est de nouveau sa voix qui l’émeut. Mais aussi
ce coup si proche contre sa porte : « Voici, je me tiens à la porte et je frappe. Si quelqu’un entend ma voix
et qu’il ouvre… (Ap 3,20)
(Lui) Ouvre-moi : c’est toujours la
première demande, la première condition.
ma sœur, mon amie, ma
colombe, ma parfaite : il lui chante les plus belles louanges, il ajoute
le possessif plein de tendresse, il va jusqu’à la voir « parfaite »…
car ma tête est humide
de rosée et mes boucles, des gouttes de la nuit : cela ne suffit
pas ! Elle ne bouge pas ! Alors il se plaint, il cherche à
l’attendrir, il fait appel à sa compassion, il s’abaisse comme pour se mettre à
sa hauteur, il supplie…
(Elle) J’ai ôté ma
tunique : devrais-je la remettre ? J’ai lavé mes pieds : devrais-je les salir ? :
réponse totalement inattendue et si décevante ! Plus les motifs
invoqués sont futiles et ridicules, mieux ils traduisent toute notre difficulté
à aimer qui se heurte sans cesse aux choses les plus banales. Demeurée inerte à
son appel, elle ne va pas chercher très loin des excuses si vaines.
Mon bien-aimé a passé
la main par la fente de la porte ; mes entrailles ont frémi : c’était lui ! :
il ne répond pas… sa voix se tait, mais il cherche encore à l’émouvoir et y
réussit, l’émotion la prend…
Je me suis levée pour
ouvrir à mon bien-aimé, les mains ruisselantes de myrrhe. Mes doigts
répandaient cette myrrhe sur la barre du verrou : le parfum est
témoignage de présence, mais il devient maintenant, sur la poignée, le signe
cruel de son absence. Il ne reste plus que la myrrhe…
Seigneur Jésus, tu es celui qui frappe à notre porte et qui
implore son ouverture avec respect et discrétion. Tu nous invites à ta table
mais tu veux aussi venir prendre place à la nôtre, prendre le repas avec nous.
Puissions-nous bondir pour t’ouvrir car tel est bien notre désir le plus
profond.
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