Liturgie de la Parole fête de Ste Thérèse-Bénédicte de la Croix
Introduction
Nous voici rassemblés en communauté, en Église.
« Comme l’époux tardait, elles s’assoupirent toutes et s’endormirent. Au milieu de la nuit, il y eut un cri : ‘Voici l’époux ! Sortez à sa rencontre’ »
On reconnaît l’évangile du jour, la parabole où le royaume des cieux est comparé « à dix jeunes filles invitées à des noces ».
Celle que nous fêtons aujourd’hui a effectivement adopté la spiritualité nuptiale.
Il s’agit d’Édith Stein.
Elle est née à Breslau en Silésie (jadis allemande, aujourd’hui polonaise) en 1891.
Juive, philosophe, intellectuelle renommée et enseignante, elle découvre la « vérité » dans le catholicisme.
Le psaume 44 illustre son parcours : « Écoute, ma fille, regarde et tends l’oreille ; oublie ton peuple et la maison de ton père… »
Édith se convertit et entrera, une dizaine d’années plus tard, au Carmel de Cologne en 1933. Elle recevra le nom de sœur Thérèse-Bénédicte de la Croix.
Pressée par les événements politiques, elle quitte l’Allemagne et rejoint le Carmel d’Echt aux Pays-Bas en 1938.
Elle est arrêtée par la Gestapo en 1942 et déportée à Auschwitz.
Le convoi qui l’amène avec sa sœur Rosa traverse leur ville natale de Breslau.
Elles meurent toutes deux dans une chambre à gaz le 9 août.
Martyre, elle sera béatifiée en 1987 et canonisée en 1998. Elle est copatronne de l’Europe.
« Je ferai de toi mon épouse pour toujours »
La lecture du prophète Osée, que la liturgie nous présente en cette fête, exprime l’espérance qui découle de la vie d’Edith.
Un triptyque traverse son œuvre : connaissance de soi, connaissance de Dieu, relation au monde. Nous y reviendrons.
Recueillons à présent les intentions de notre monde, particulièrement ceux qui souffrent, les martyrs de notre temps, et présentons-les au Seigneur.
Avec les jeunes filles de la parabole, frappons à la porte du Seigneur par notre prière :
« Seigneur, Seigneur, ouvre-nous ! »
Méditation
Connaissance de soi, connaissance de Dieu, relation au monde, disais-je dans l’introduction.
Pour nous les faire découvrir et nous donner le goût de lire ses œuvres, glanons deux extraits.
Édith Stein commence par citer la réformatrice du Carmel, Ste Thérèse d’Avila :
« … Il existe sans doute un état singulier, voire pathologique, selon lequel personne ne connaît sa propre demeure. Mais en fait, beaucoup d’âmes sont ‘tellement malades, tellement habituées à s’occuper des choses extérieures… qu’il leur semble impossible de faire un retour sur elles-mêmes’ ».
Puis Édith poursuit :
« Ainsi ont-elles désappris à prier. C’est pourquoi la première demeure dans laquelle on parvient par la porte de la prière est la demeure de la connaissance de soi. Connaissance de Dieu et connaissance de soi se soutiennent mutuellement. Par la connaissance de soi nous nous rapprochons de Dieu. Cette connaissance de soi n’est donc jamais inutile, même si l’on est déjà parvenu dans les demeures intérieures. D’autre part ‘nous ne parviendrons jamais à la connaissance de soi parfaite, si nous n’apprenons pas aussi à connaître Dieu’. » [1]
Et Michel Dupuis de commenter :
« C’est un véritable tournant : il a fallu accepter de détourner les yeux des affaires quotidiennes, y compris les merveilles de la Nature, des belles choses humaines : les vallées, les outils, les œuvres, les étoiles, la musique… et risquer de plonger en soi, risquer de trouver le désordre, ‘le ménage pas fait’, sa pauvre vérité de créature en chemin, de pécheur… Et pourtant, si je le fais, c’est que j’y suis appelé obscurément… Je ne pars pas seul vers moi-même, l’Esprit m’appelle, l’Esprit me guide, Dieu m’attend… Et je me trouve ‘pré-occupé’, mais dans un sens tout nouveau : l’Autre est en moi, il m’habite et me soutient… mon Dieu est ici, attentif, patient, entêté… Édith Stein découvre grâce à Thérèse d’Avila cette vocation à n’être jamais seul… Rentrer en soi-même, accepter de se connaître, se mettre à l’écoute, balbutier quelques mots, se tenir devant Dieu. La prière ‘solitaire’ est tout sauf solitaire : elle est la voie royale pour faire la vraie communauté, la solidarité profonde avec toute l’Humanité. » [2]
Et cette prière solitaire et communautaire nous conduit plus loin, vers les autres, vers notre monde. C’est le 3e pôle.
Comme en témoigne Édith : « A l’époque de ma conversion, juste avant qu’elle se produisît et même longtemps après, je pensais que mener une vie religieuse signifiait renoncer à tout ce qui est terrestre pour ne vivre qu’en pensant aux choses divines. Mais peu à peu j’ai appris et compris qu’en ce monde c’est bien autre chose qui est exigé de nous et que même dans la vie la plus contemplative le lien avec le monde ne doit pas être rompu. Je vais jusqu’à croire que plus on est ‘attiré’ en Dieu, plus on doit en ce sens ‘sortir de soi’, c’est-à-dire s’offrir au monde, pour y porter la vie divine… » [3]
Notre Père
Avec les jeunes filles prévoyantes qui ont emporté l’huile de la vigilance, redisons la prière du Notre Père…
Oraison
Seigneur, nous avons parcouru le chemin de la connaissance de soi et de Toi, qui conduit au lien avec le monde. Comme tu le fis pour sainte Thérèse-Bénédicte de la Croix, « entraîne-nous jusqu’au désert et parle-nous cœur à cœur ». Alors, nous répondrons au vœu exprimé par ton prophète « nous connaîtrons le Seigneur », par Jésus-Christ, ton Fils Ressuscité, qui règne avec Toi et le Saint-Esprit, un seul Dieu pour les siècles des siècles.
Sr Marie-Jean la 9 août 2021
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[1] L’être fini et l’être éternel, p. 426.
[2] M. DUPUIS, Prier 15 jours avec Edith Stein, Montrouge, Nouvelle Cité, 2000, p. 25-29.
[3] La Puissance de la croix, p. 47-48.
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