Liturgie de la Parole 20e mardi TO-I
Ouverture
La liturgie de ce jour - est-ce par hasard ? – réunit deux textes qui expriment d’abord une perplexité. Au fond, la nôtre aujourd’hui : comment Dieu pourrait-il sauver le monde ? Qui peut être sauvé ?
Gédéon : comment Dieu pourrait-il nous sauver des Madianites ? Les disciples : s’il est vrai qu’il est plus facile à un chameau de passer par un trou d’aiguille qu’à un riche d’entrer dans le Royaume des cieux, qui dont peut être sauvé ? Les deux lectures de ce jour sont traversées par une même réponse : ce qui est impossible aux hommes est tout de même possible à Dieu. Mais cela nous demande de renverser les perspectives : les premiers seront derniers, les derniers seront premiers…
Résonances
L’évangile de ce jour est une charnière entre celui d’hier (la rencontre avec le jeune homme riche) et celui de demain (la parabole des ouvriers de la vigne) : cela forme un tout : la parabole est une réponse au questionnement du jeune homme riche et aussi au questionnement des disciples qui s’ensuit.
Le jeune homme riche avait demandé à Jésus : « que dois-je faire de bon pour avoir la vie éternelle ? » Et Jésus lui avait dit : « Celui qui est bon c’est Dieu, et lui seul ! ». La parabole des ouvriers de la vigne se termine par cette question : « ton regard est-il mauvais parce que je suis bon ? » Quelle est donc cette bonté de Dieu qui nous déconcerte ? Le jeune homme riche, comme les disciples, comme les ouvriers de la première heure, sont dans une logique du « faire pour avoir ». Ils attendent un salaire, une récompense. Pas nécessairement de l’argent, car le jeune homme riche dit bien « que dois-je faire pour avoir la vie éternelle ? » Et quand Pierre demande à Jésus : « quelle sera notre part ? », Jésus promet le centuple et la vie éternelle. Et Jésus conclut : « beaucoup de premiers seront derniers, beaucoup de derniers seront premiers ».
Pour expliciter ce qu’il veut dire par là, il raconte la parabole des ouvriers de la vigne. Je n’avais encore jamais remarqué à quel point cette parabole vient en fait comme une réponse à la fois à la question du jeune homme riche et à celle de Pierre et des disciples. Cette parabole illustre de façon limpide ce que Jésus veut dire par « derniers… premiers ». D’ailleurs, la parabole se termine en reprenant la même formule, légèrement modifiée : « c’est ainsi que les derniers seront premiers et les premiers seront derniers ».
La parabole raconte comment un propriétaire de vigne sort au petit matin pour embaucher. Il semble surtout préoccupé par l’idée d’embaucher, pas par l’idée de faire une belle vendange. Il sort plusieurs fois dans la journée pour s’assurer que personne ne reste sur le carreau, que tous trouvent un travail selon la mesure de leurs forces. Il bouleverse nos échelles de valeurs : ce qui compte pour lui, ce n’est pas la quantité de travail accompli, mais le fait de travailler.
Gédéon fait une expérience semblable. Il ne se sent pas digne. Il se voit comme le dernier des derniers, « le plus petit du clan de son père qui est le plus petit de la tribu de Manassé » … Mais c’est lui que le Seigneur envoie. Il lui faut du temps pour se laisser convaincre, tout cela le déconcerte.
Qu’en est-il de nous aujourd’hui ? Suis-je comme Gédéon, qui se diminue, ou comme le jeune homme riche qui se demande que faire de plus encore ? De quoi suis-je riche ? De quoi suis-je pauvre ? L’ouvrier de la dernière heure pourrait dire : « pourquoi m’embauches-tu ? que pourrais-je encore faire pour toi en si peu de temps ? Les autres ont accompli tout le travail, et tu voudrais me récompenser d’autant, moi qui n’ai rien fait ? » Et Dieu pourrait lui répondre : « C’est toi que j’envoie. Va avec la force qui est en toi. Je serai avec toi ».
Quel étrange vigneron !
Sœur Marie-Raphaël le 19 août 25
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire