(sœur Marie-Raphaël)
Ouverture.
« Dieu ne se laisse pas vaincre en
générosité ». Tel pourrait être le titre de cette célébration. En effet,
dans la première lecture, nous entendrons que Dieu donne le septuple, et dans
l’évangile il sera question du centuple. Mais est-ce bien pour avoir le
centuple que nous avons tout quitté pour suivre Jésus ? Est-ce pour
avoir le septuple que nous offrons à Dieu de belles offrandes ?
L’homme riche de l’évangile d’hier voulait savoir ce qu’il devait faire pour
avoir la vie éternelle…
Le chant d’entrée nous a rappelé que nous faisons
aujourd’hui mémoire d’un moine bénédictin du 8ème siècle, saint Bède
le Vénérable. Lui, il est « tombé dans la marmite bénédictine » quand
il était petit. Il est devenu érudit, il est le premier historiographe de
l’Angleterre, mais on dit aussi de lui qu’il avait une « âme de
cristal ». Sa vie s’est élevée devant Dieu comme un parfum d’agréable
odeur… Après avoir entendu la retraite de sœur Anne Lécu sur les parfums, nous
comprenons mieux ce que cela veut dire !
Résonances
« C’est présenter de multiples offrandes que
d’observer la Loi ; c’est offrir un sacrifice de paix que de s’attacher
aux commandements ». L’homme riche de l’évangile d’hier peut bien
s’appliquer ces paroles. Il a parfaitement observé la Loi, il s’est attaché aux
commandements. Pourtant, il sentait confusément que quelque chose d’important
manquait encore…
En écho à la parole de Jésus sur la richesse et le
détachement, Pierre prend la parole aujourd’hui : « Voici que nous
avons tout quitté pour te suivre ». Rappelons-nous : qu’est-ce que
Pierre a quitté ? Il a quitté ses filets et sa barque (c’est bien le même
mot qui est utilisé). Ce n’est pas autant que ce que le jeune homme riche
aurait dû lâcher, mais pour Pierre et André, c’était « tout », parce
que c’était leur moyen de subsistance. À ce moment-là, a-t-il réfléchi à une
récompense ? Non, mais peut-être qu’en cours de route, et surtout
maintenant qu’il a été témoin de cette rencontre avec l’homme riche, il se rend
compte de l’énormité de son geste, de son impulsivité du début, et il prend
peur, il cherche une compensation.
La leçon du texte est plus subtile. L’homme riche
recherche un intérêt. S’il observe les commandements, s’il demande à Jésus ce
qu’il pourrait faire de plus, c’est en vue d’obtenir quelque chose (la
vie éternelle, autrement dit une plénitude de vie qui commence dès maintenant,
une paix intérieure qu’il n’a pas encore découverte). Pour lui, la vie
éternelle est quelque chose qui se mérite… au bout d’un long parcours
d’observances. Sous l’influence de cette remarque de l’homme riche, Pierre se
demande ce qu’il va bien pouvoir mériter…
Regardons bien la réponse que Jésus adresse à Pierre
et laissons-nous surprendre. Il dit d’abord : « nul n’aura quitté, à
cause de moi et de l’évangile, une maison, des frères etc… » Il dit
« à cause de moi » et pas « pour obtenir quelque
chose ». On ne suit pas Jésus pour quelque chose, on le suit parce
qu’il est là. Sa venue est une cause qui attend une réponse. C’est
parce que Jésus est là qu’on répond à son appel, et pas pour obtenir qu’il
vienne. La suite de la phrase va plus loin. C’est une construction grammaticale
un peu compliquée. Jésus ne dit pas : « tous ceux qui auront quitté
maison, frères, sœurs etc. … à cause de
moi… recevront le centuple », mais il dit : « personne n’aura
quitté à cause de moi maison frères sœurs etc… sans recevoir le
centuple ». Il y a ici une conditionnelle négative que l’on peut traduire
simplement par « si ne pas… » ce qui donne en fait :
« personne n’a quitté maison, frères sœurs etc., à cause de moi, s’il n’a
pas reçu pas le centuple maintenant, en ce moment, maison, frères sœurs
etc… » (ou : « à moins d’avoir reçu… »).
On peut comprendre : c’est parce que le
centuple est donné qu’on lâche tout pour suivre Jésus. Le centuple n’est pas
une récompense, c’est un préalable ! Dieu est toujours premier dans le
don. Dieu ne se laisse pas vaincre en générosité : en fait toute la
générosité vient de lui et notre don n’est jamais qu’une réponse, une action de
grâce, un désir fort de lui offrir en retour quelque chose de ce centuple reçu.
À chacun de nous de s’interroger : quel est ce
centuple pour moi aujourd’hui ? Le centuple du début de ma marche avec
Jésus n’est sans doute pas le même que le centuple d’aujourd’hui. Il y a
toujours motif à rendre grâce, à essayer d’être à la hauteur de la générosité
de Dieu !
Prière
Que nos prières devant toi, Seigneur, s’élèvent comme
un encens. Que nos offrandes se glissent dans le don de ton Fils, et reçoivent
de son parfum leur bonne odeur. Que notre action de grâce devienne contagieuse
et qu’elle permette à ta grâce de se répandre dans le monde, avec délicatesse.
Nous t’en prions par Jésus…
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