vendredi 21 mai 2021

Liturgie de la Parole, 7e vendredi du Temps Pascal

 (Rosy)

Introduction :

Nous voici invités, une fois encore, à entrer au cœur d’un de ces passages au style littéraire le plus étonnant et le plus émouvant des évangiles : le dialogue entre Jésus et une autre personne. Chaque fois, la surprise, l’inattendu, l’imprévisible sont au rendez-vous.

Encore un peu, on se sentirait de trop, tant c’est un moment d’intimité, parfaitement accordé à l’interlocuteur. La Samaritaine, Nicodème, le couple d’Emmaüs… connurent ce moment privilégié qui fait basculer une vie.

Je m’en tiendrai donc à l’évangile et à ses trois questions qui semblent quasi identiques.. et pourtant…. Un seul mot revient tel quel, un tout petit mot : « mes », oui, dans ce passage, il s’agit avant tout du troupeau de Jésus. Ce sont donc les agneaux qui vont nous servir de fil rouge.

Tournons-nous d’abord vers le Seigneur en chantant les psaumes.

 

Méditation :

Quelle journée et que d’émotions… La soirée les a trouvés noyés de tristesse. Alors Simon-Pierre se lève et déclare : je vais pécher…

On t’accompagne, répondent les 5 ou 6 autres tout aussi désœuvrés. Mais les filets restent vides et le moral au plus bas.

Quelqu’un sur le rivage enfonce le clou en leur demandant à manger, en les appelant « enfants » et en leur disant de jeter à droite !

Puis tout bascule : C’est Jésus, il amorcé le repas, et les voilà reportés au bon vieux temps…

La quiétude s’installe.. ; ils sont fortifiés par les poissons et surtout par le pain partagé.

C’est à ce moment que Jésus se lève et fait signe à Simon ; ils s’éloignent à deux  le long du rivage… voilà qui rappelle à Simon ce moment, il y a bien 3 ans, où Jésus l’a déjà retiré de ses filets… voilà qui nous évoque sans doute aussi certains souvenirs personnels…

Pour ce moment fondamental – car il s’agit bien d’un fondement, d’une fondation – Jésus n’a pas choisi un lieu sacré : ni temple ou synagogue, ni montagne ni même cénacle.

Le lieu de la rencontre est pourtant aussi un espace sacré : c’est la nature, la beauté de la mer, la grandeur du ciel…

Et Jésus y va de ses questions, mais de manière très déroutante.

3 questions où Jésus – ou Jean – joue des synonymes.

Les traducteurs les ont, soit ignorés – comme la traduction liturgique – ou bien agrémentés avec fantaisie.

Sans en faire l’étude comparée, en souligner quelques touches peut nous éclairer.

Mais d’abord, pourquoi « Simon » ? A-t-il démérité par son triple reniement, et faut-Il sa triple profession de foi pour retrouver son rôle de « roc » pour ses frères ? Peut-être…

La première question commence bien : m’aimes-tu plus que ceux-ci ?

Voilà Jésus qui se met à faire des comparaisons, l’évaluation des mérites tant qu’on y est…

Mais qu’a dit Jésus ?

-         M’aimes-tu plus que les autres ne m’aiment ? La réponse est impossible et Simon ne tombera pas dans le panneau…  alors ?

-         M’aimes-tu plus que tu n’aimes les autres ? … là, nous sommes en pleine RB qui nous dit de ne rien préférer au Christ.

Les trois questions portent sur l’amour… mais ce n’est pas le même amour…

Jésus commence par parler d’agapè, cet amour désintéressé, inconditionnel, fidèle... C'est le plus élevé des 3 types d'amour dans la Bible. Agapè décrit entre autre l'amour de Jésus pour son Père et pour ses disciples. 1 Corinthiens 13 donne une description de l'amour agapè.

Pierre lui répond avec le mot philia, l'amitié naturelle ou l'affection fraternelle que nous éprouvons à l’égard d’un ami ; tout simplement « l’amour fraternel ». On pourrait dire qu’il répond un peu à côté, qu’il n’adhère pas complètement, ou qu’il ne s’en sent pas capable ?

Ce qui est remarquable, c’est que, à la 3e et dernière fois, Jésus rejoint Simon, et parle lui aussi de philia. Jésus qui connaît nos faiblesses et nous y rejoint pour nous entraîner avec lui.

Simon va acquiescer en répétant : « toi, tu sais » et la 3e fois, « toi, tu sais tout, toi tu sais donc que je t’aime ». Un bel exemple de prière chaque fois que nous hésitons à nous adresser au Seigneur, « puisqu’il sait déjà tout ». Oui, nous pouvons lui raconter nos vies, implorer son aide, c’est même ce qu’il nous commande : « Tout ce que vous demanderez.. »

Mais le triptyque n’est pas complet puisque, chaque fois, il y a la conclusion de Jésus. Trois expressions différentes, avec une seule constante : le possessif « mes ». Ce me semble le mot clé : c’est d’abord du troupeau de Jésus qu’il s’agit. La liturgie parle de berger ou de pasteur mais ce mot ne se trouve pas en grec. Jésus est d’ailleurs le seul bon berger.

On traduit aussi par « pais mes brebis » Ce qui est grammaticalement faux car ce verbe est intransitif, on ne pait pas quelque chose ! Quant au grec, il emploie deux verbes différents… comme il a deux mots pour les membres du troupeau… les agneaux puis les brebis.

L’important est que Jésus confie son troupeau à un homme, Simon, là au bord du lac, mais aussi à chacun de nous. Chaque chrétien est à la fois membre et responsable du troupeau, selon la volonté de Jésus.

Ainsi Simon est établi comme gardien du troupeau qui n’a qu’un seul pasteur, un seul guide, celui qui connait ses agneaux et que ses brebis connaissent.

 La traduction de Chouraqui aide à synthétiser tout cela :

« Simon fils de Jean, m’aimes-tu plus que ceux-ci ? »

Il lui dit: « Oui, Seigneur, toi, tu sais que je te chéris. »

Il lui dit: « Pais mes agneaux. »

 

Il lui dit encore, une deuxième fois: « Simon fils de Jean, m’aimes-tu ? »

Il lui dit: « Oui, Seigneur, toi, tu sais que je te chéris. »

Il lui dit: « Conduis mes ovins. »

 

Il lui dit une troisième fois: « Simon fils de Jean, me chéris-tu ? »

Pierre s’attriste de ce qu’il lui demande pour la troisième fois: « Me chéris-tu ? 

Il lui dit: « Seigneur, toi tu sais tout. Toi, tu sais donc que je te chéris. »

Jésus‘ lui dit: « Pais mes ovins. »

Simon, alors, est appelé à être le serviteur de tous. C’est à ce titre que Jésus lui répète le « suis-moi » initial, qu’on peut tout aussi bien traduire par « accompagne-moi » ou encore « viens avec moi ». Comment le reçoit-il ? Ce qui est sûr, c’est que Jésus devra encore le lui répéter une dernière fois… mais cela c’est pour demain.

 

Introduction au Notre Père

Nous qui sommes attendus au cœur de cet amour agapè qui unit le Père et le Fils, redisons avec confiance la prière que Jésus lui-même nous a apprise.

 

Prière:

Seigneur, rends-nous attentifs à ta Parole, à ces mots qui ne s’adressent qu’à nous, à chacun et chacune. Nous qui sommes de ton troupeau, sur qui se déploie ta tendresse, donne-nous le souci de nos frères et sœurs. En répondant à ton appel, en t’accompagnant, nous sommes auprès d’eux les messagers de ta Bonne Nouvelle. Toi le seul vrai berger, rassemble-nous en ton amour, toi qui es vivant, avec le Père et l’Esprit, aujourd’hui et pour toujours.


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