mercredi 20 janvier 2021

Liturgie de la Parole 2e mercredi TO

 (sœur Bernadette)

Introduction :

Janusz Korczak, un médecin juif, a écrit à l'époque du national-socialisme : "Quelle chance que les médecins et la police ne puissent pas me dicter la fréquence de mes respirations par minute et la fréquence à laquelle mon cœur a le droit de battre".[1] Par cette réflexion, le médecin dénonce qu’un pouvoir totalitaire développe beaucoup de manœuvres pour altérer notre liberté, mais il ne peut pas tout nous enlever.  Dans l'Évangile d'aujourd'hui, cette situation est illustrée par la réaction des Hérodiens et des Pharisiens à l’égard de Jésus qui guérit l’homme à la main desséchée par compassion, par amour de son prochain. Ces ennemis de Jésus se retranchent derrière une conception rigide de la loi : « la loi, c’est la loi ». Jésus respecte la loi puisqu’au sabbat, il se rend à la synagogue comme ses contradicteurs, mais il veut leur faire comprendre que la loi ne peut exclure l’amour, la compassion, la miséricorde ! 

Dans la prière, demandée par Jésus personnellement, tendons la main emplie de toutes les choses desséchées que nous portons en nous pour qu’il nous aide à nous relever. "Dieu est surtout et à tout moment intéressé par le bien de l'homme !"[2]


Lecture : Héb 7,1-3.15-17 // Ps 109 (110) // Marc 3,1-6


Méditation :

Laissons-nous parler l’homme avec la main desséchée ?

« Seigneur, mon Dieu, je crie vers toi sans relâche ».[3] « Accomplis un signe en ma faveur ».[4] « Ouvre l’oreille à ma plainte, car mon âme est rassasiée de malheur. »[5] « Nombreux sont-ils à déclarer à mon sujet : ‘Pour lui, pas de secours auprès de Dieu !’ »[6] « Combien de temps, Seigneur, vas-tu m’oublier, combien de temps, me cacher ton visage ? Combien de temps aurai-je à supporter cette misère jour après jour ? »[7]

Combien de fois n’ai-je pas appelé Dieu de cette façon avec l’impression qu’il semblait ne pas m’entendre. Ma main est desséchée et a cessé de fonctionner il y a longtemps. Comme c’était beau quand elle était en pleine utilisation, mais cela semble bien loin. Maintenant, je ne peux ni "donner" ni "prendre" quoi que ce soit avec elle. J'ai besoin de l'aide de l'autre, et celle-ci m'est donnée à contrecœur aujourd'hui, le jour du sabbat.[8] Le monde entier me regarde avec pitié et, de manière condescendante, me tolère.

Mais aujourd'hui, c'était différent. Car le Seigneur de la Danse est entré dans la synagogue et aussitôt il y a eu une vibration dans l'air. Tout le monde est obsédé par une question : ce fauteur de troubles va-t-il violer notre saint Sabbat ? Je me croyais protégé dans le coin et je voulais être seulement un observateur dans le spectacle tout entier.

Mais Il m'a regardé comme aucun homme ne l'avait jamais fait auparavant - vraiment, Dieu seul peut regarder dans ton cœur comme cela. "Un rayon divin semblait pénétrer dans mon cœur, le faire briller. Il a adouci le tissu de mon cœur, qui s'était durci au fil des ans, incrusté et déformé.[9] Il a chanté : « Lève-toi et viens au milieu. »[10] Mon cœur s'est arrêté soudainement et s'est mis à danser lentement sur un nouveau rythme. MOI, moi l'homme à la main desséchée ? Un bon à rien ? « Je suis chassé de la vue de Dieu ! »[11] Que pourrais-je apporter de plus dans ce monde ?

Tout tournait autour de moi et je me suis laissé emporter par le rythme de la mélodie. J'ai tendu ma main desséchée et sans vie à cet homme. Cette main que j'ai toujours essayé de cacher à tout le monde, car c'est la honte de ma vie. Pourtant, personne autour de moi n'a bougé au son de cette mélodie, et pourtant il les a courtisés en dansant avec ses regards provocants, mais tendres. Pourtant, leur cœur, qui après tout était construit de la même manière que le mien, est resté sans vie et comme pétrifié. Pas un seul cœur n'est entré en vibration.[12],[13] Comment cela est-il possible ?

Alors même que je réfléchissais à cela, je sentais la partie morte de mon avant-bras ramenée à la vie "par une main d'artiste tendre et divine".[14] Ma main est devenue chaude et vivante. Je pouvais à nouveau bouger les doigts et sentir la grandissante force. Ceux qui m'entouraient ont vu ce qui se passait, mais aucun des spectateurs n'a compris. Ne s'agit-il pas de tous les chefs de synagogue qui soit connaisseurs ? Ils savent généralement ce qui est bien et ce qui est mal. Une nouvelle vie m'a été donnée et, eux, ils prévoient la mort du bienfaiteur. Qui fait le mal : ceux qui complotent un meurtre ou celui qui m'a sauvé la vie ? Comme il est écrit, "les pensées de Dieu ne sont pas nos pensées"[15]. Cela s'avère vrai. J'ai été guéri et j'aurais pu crier de joie et ils se sont tous enfermés dans la méchanceté et l'obstination. Je comprends maintenant au sens le plus profond du terme : le sabbat est le jour où l'on loue Dieu et où l'on rend grâce pour la vie qu'il nous a donnée. Désormais, je me réjouirai et « je te rends grâce de tout mon cœur et de tous mon corps, car ton amour pour moi est grand. Tu m'as arraché des ténèbres et tu as ouvert le chemin de la vie. »[16] Danse mon âme devant la face de Dieu pour toujours et à jamais.


Notre Père : Prions.


Prière de conclusion (sœur Marie-Pierre):

Dieu très bon, Béni sois-tu pour le regard de tendresse que tu portes sur le corps de Jésus cloué sur la croix, et que tu as ressuscité. Pour le regard de tendresse que tu portes sur chacun de tes enfants.

Aux Apôtres désemparés, tu as montré les plaies de tes mains afin qu’ils croient en ton Fils Jésus. Regarde les souffrances physiques et morales que portent les hommes et guéris-les. Nous te le demandons par Jésus ton Fils bien-aimé et ton Esprit Saint, dès maintenant et pour les siècles des siècles.



[1]  Janusz Korczak. Leben und Werk. Ein Leben für Kinder. Lebensworte. Kiefel/Gütersloher Verlaghaus, 2000

[2] , 8  cfr. Predigt von Antje Rinecker zum Evangelium Markus 3,1-6; Andreaskirche, 2013

[4] Psaume 85,17

[5] Psaume 87,3-4

[6] Psaume 3,3

[7] Psaume 12,2-3

 

[9] Cfr.Edith Stein; Verborgenes Leben und Epiphanie; Edith Steins Werke, Band XI

[10] Marc 3,3

[11] Jonas 2,5; Psaume 30,23

[12] Cfr. Sydney Carter, „Lord of the dance“, 1963 ;

[13] cfr. Psaume 32,15

[14] Cfr.Edith Stein; Verborgenes Leben und Epiphanie; Edith Steins Werke, Band XI

[15] Is 55,8

[16] Psaume 85,12-13

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