(Arthur)
Isaïe
55,1-11 ; 1 Jean 5,1-9 ; Marc 1,7-11
Chères Sœurs et assimilés, j’imagine… que vous imaginez… que je vais brièvement commenter cet extrait de l’évangile de Marc. Eh bien, ce ne sera pas le cas, au risque de peut-être vous décevoir. Mais alors, que votre déception soit brève. Et je suis en effet certain que vous avez déjà entendu et lu tant de commentaires du baptême de Jésus par un homme que Luc définit comme étant lui-aussi un enfant né de manière miraculeuse. C’est le fils né d’Elisabeth et de Zacharie…mais quand même aussi un peu de Dieu, parce que, sans son intervention à lui, Jean ne serait jamais venu au monde ! Je vous cite 2 versets du 1er chapitre de Luc : Ils étaient tous deux justes aux yeux de Dieu et ils suivaient toutes les lois et les commandements du Seigneur. Mais ils n'avaient pas d'enfant, car Élisabeth ne pouvait pas en avoir et ils étaient déjà âgés tous les deux. Un ange du Seigneur apparut alors à Zacharie, qui se tenait à la droite de l'autel où on brûlait de l'encens et qui lui dit : « Dieu a entendu ta prière : Élisabeth, ta femme, te donnera un fils auquel tu donneras le nom de Jean. »
Puisque
je vois que vous êtes déjà en train de surmonter votre déception, c’est sans
scrupule que je vais m’attarder quelques minutes sur le superbe texte de la
première lecture. La concurrence de l’évangile aidant, c’est un texte qui est
très peu commenté. Qu’il puisse être attribué au prophète Isaïe du 8e siècle ou
plutôt à certains de ses disciples en exil à Babylone au 6e siècle, peu nous
importe ici. Par contre, ce qui me paraît important, c’est que nous nous
laissions interpeller par ce beau texte et le programme qu’il propose. Un
programme toujours valable pour que nous aussi, au 21e siècle, puissions
ressembler un tant soit peu à ce Dieu qui rêve depuis toujours du bonheur des
humains. C’était aussi le programme de Jésus…
Cette
parole du Seigneur nous dit, aujourd’hui encore,
Vous
tous qui avez soif, venez, voici de l’eau !
Même
si vous n’avez pas d’argent, venez acheter et consommer,
venez
acheter du vin et du lait sans argent, sans rien payer.
Epoustouflant
! Ce texte dit depuis plus de 25 siècles que Dieu ne veut pas être rémunéré
pour ses cadeaux, que l’eau est un bien commun qui n’est pas commercialisable !
Et que cette affirmation émane du pays de Juda au 8e siècle ou de Babylone au
6e, c’est une invitation qui garde tout son sens aujourd’hui.
Ce
n’est qu’en juillet 2010, il y a à peine 10 ans, et après plus de 15 années de
débats sur la question, que l’Assemblée Générale de l'ONU a reconnu comme étant
un des droits humains l'accès à une eau de qualité et à des installations
sanitaires. Je vous cite le texte de la résolution de compromis rédigée par la
Bolivie et votée par 122 pays alors que 41 autres se sont abstenu : "le
droit à une eau potable propre et de qualité et à des installations sanitaires
est un droit de l'homme, indispensable à la pleine jouissance du droit à la
vie".
Vous
tous qui avez soif, venez, voici de l’eau !
Même
si vous n’avez pas d’argent, venez acheter et consommer.
Et
malgré cette proclamation, aujourd’hui, en 2021, 884 millions de personnes,
soit près de 77 fois l’ensemble de la population belge, n'ont toujours pas
accès à une eau potable de qualité. Plus de 2 milliards 600 millions, le 1/3 de
la population mondiale, ne disposent pas d'installations sanitaires de base.
Environ 2 millions de personnes, pour la plupart des jeunes enfants, meurent
chaque année des suites de maladies causées par une eau impropre à la
consommation et à l'absence de sanitaires. Parmi ces millions de personnes qui
n’ont pas accès à l’eau potable, 263 millions doivent se déplacer à plus de
trente minutes aller-retour jusqu’au plus proche point d’eau potable, tâche
très lourde physiquement et le plus souvent prise en charge par les femmes. 423
millions de personnes boivent l’eau d’un puits ou d’une source d’eau non
protégé des contaminations. 159 millions de personnes captent leur eau de
boisson dans une rivière, un lac ou un canal d’irrigation, au risque d’une
contamination par les produits chimiques et les matières fécales.
Je me souviens comme si c’était hier de la réflexion scandalisée de Marie-Claire, une amie qui travaillait comme ingénieur forestier dans différents pays sous-développés : me voyant me laver les mains en laissant couler l’eau du robinet au lieu de mettre un peu d’eau dans l’évier : mais Arthur, c’est dégueulasse de gaspiller ainsi l’eau potable ! On voit bien que tu ne vis pas dans les pays pauvres ! Je n’ai jamais oublié ce cri qui date d’au moins 30 ans.
Je me demande parfois si l’Etat d’Israël n’a pas définitivement rayé des Écritures ces versets d’Isaïe. Rappelez-vous que leur fameux mur a été construit en incluant les puits du côté juif, empêchant ainsi leur accès aux populations palestiniennes. Ils refusent de connecter les villages au réseau d’eau alors que dans le même temps l’approvisionnement aux colonies israéliennes est amplement assuré, colonies illégales au regard du droit international. De la sorte, la consommation d’eau des Palestiniens atteint à peine 70 litres par personne et par jour, soit une quantité bien inférieure aux 100 litres minimum par personne recommandés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). La consommation d’eau des Israéliens, par personne et par jour, est quatre fois supérieure.
Vous
tous qui avez soif, venez, voici de l’eau !
Même
si vous n’avez pas d’argent, venez acheter et consommer,
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire