(Sœur Marie-Raphaël)
Ouverture.
En ce samedi du temps ordinaire, comme le chant
d’entrée nous l’a rappelé, nous vivons ce temps d’écoute de la Parole en
compagnie de la Vierge Marie. Et ce sera la Marie des noces de Cana, celle qui
suggère à son fils qu’on ne peut concevoir une fête de mariage sans bon
vin ! Ce serait une fête sans joie. Mais en quoi consiste la joie de
Dieu ?
Résonances
Durant huit semaines, en ce temps ordinaire, nous
entendons les prophètes. Cette semaine, c’était le prophète Amos, dont nous
entendons aujourd’hui la fin. Amos est un prophète plutôt décapant, pas très
réjouissant : il dénonce les péchés d’Israël, en particulier l’idolâtrie.
Mais il termine dans une très belle vision d’espérance. À quoi bon, en effet,
dénoncer le péché, si ce n’est pour suggérer à quel point Dieu met en nous son
espérance : l’espérance d’un retour à l’Alliance ! Dans sa vision, Amos
parle de vin nouveau. « Les montagnes laisseront couler le vin
nouveau, toutes les collines en seront ruisselantes ». Ce sera le signe de
la joie retrouvée, lorsque le peuple, après l’exil, pourra à nouveau cultiver
sa terre et en recueillir le fruit. Or, Jésus est venu nous apporter cette
joie.
Jésus est encore attablé dans la maison de Matthieu,
avec ses disciples et des publicains et d’autres pécheurs. Les pharisiens
scandalisés sont venus lui demander pourquoi il mange ainsi avec des gens de
mauvaise réputation et Jésus leur a répondu : « ce ne sont pas les
gens bien-portants qui ont besoin du médecin, mais les malades ».
Maintenant, ce sont les disciples de Jean Baptiste qui s’approchent avec
perplexité. Plus encore que les Pharisiens, ils sont les champions de l’ascèse.
Ils voient que Jésus et ses disciples font peu de cas du jeûne… leur question
nous rejoint peut-être dans notre pratique de la vie chrétienne. Quel sens
donner à l’ascèse ? Jésus leur parle de noces, d’un vêtement neuf, de vin
nouveau. Sa parole est volontairement énigmatique : pour nous obliger à
réfléchir.
Qu’est-ce que le jeûne ? Non pas l’ascèse pour
l’ascèse, mais le signe d’un manque, d’une absence de l’époux. Je ne peux
éprouver ce manque que si j’ai d’abord expérimenté sa présence et la joie qu’il
procure. Cette parole de Jésus aux disciples de Jean-Baptiste en Matthieu fait
penser à un passage de l’évangile de Jean où il est également question de Jean
Baptiste et de l’époux. Il dit à ses disciples : « celui à qui
l’épouse appartient, c’est l’époux ; quant à l’ami de l’époux, il se tient
là, il entend la voix de l’époux et il en tout joyeux. Telle est ma joie :
elle est parfaite. Lui, il faut qu’il grandisse et moi que je diminue. »
Jean-Baptiste, champion de l’ascèse, n’est pas un
grincheux ! Il est plein d’une joie parfaite qui est liée à son amitié
avec l’époux. Il se réjouit de la joie de l’époux et de l’épouse.
Peut-être que c’est cela aussi que Jésus invite à
comprendre dans l’évangile de Matthieu. S’il est attablé avec ses disciples,
s’il prend part à un festin dans la maison de Matthieu, n’est-ce pas pour
montrer à tous les grincheux que Dieu préfère la joie du repentir à la bonne
observance des parfaits ? Tel est le vin nouveau, telle est l’espérance de
Dieu. C’est un vin nouveau qui fermente, qui fait gonfler les outres.
Pourtant il dit aussi : « des jours
viendront où l’époux leur sera enlevé. Ce jour-là, ils jeûneront ». Signe
que la fête n’est pas encore définitive, qu’il lui faudra passer par une
épreuve, qu’il nous faudra tous passer par un manque, un jeûne inévitable. Le
véritable festin messianique ne pourra pas faire impasse sur la Croix.
Demandons à Dieu de faire de nos vies des outres
neuves, adaptées à son vin nouveau. Demandons-lui de faire de nous des amis de
l’époux, qui se réjouissent de lui laisser toute la place. Demandons-lui de
nous revêtir du vêtement des noces, de nous faire entrer dans l’alliance, de
nous réjouir de sa joie et de nous laisser convertir à sa fête.
Prière
Seigneur, tu nous invites à entrer dans ton alliance
comme dans une fête. Béni sois-tu pour l’espérance, ton espérance, qui rebondit
en toi chaque fois que les pécheurs se détournent du mal pour accueillir ta
grâce. Donne-nous d’entrer dans ta joie : entre dans nos vies à la manière
d’un vin nouveau qui fait éclater nos résistances. Transforme-nous de
l’intérieur, fais-nous grandir à la ressemblance de ton Fils, l’époux qui nous
introduit dans la vie éternelle, pour les siècles des siècles.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire