mardi 5 juillet 2022

Liturgie de la Parole, 14e mardi TO

 (Isabelle)

Introduction :

 La liturgie nous propose aujourd’hui deux textes parlant de récolte – c’est de saison ! Le premier est du prophète Osée (Os 8, 4-7.11-13). Qui n’a pas entendu le célèbre proverbe : « Qui sème le vent récolte la tempête ». En semant folie et vanité, on récolte le vide et la déception et, à terme, la mort.

 Le second, de l’évangile de Matthieu (Mt 8, 32-38) nous parle d’un autre type récolte. La moisson de notre Dieu : une moisson abondante, une récolte de vie. Mais les ouvriers sont peu nombreux. On présente souvent ce texte comme un appel à l’engagement, « à des bras » pour l’Eglise. Peut-être est-ce en réduire la signification. Y a-t-il des conditions particulières pour cette récolte-la, pour une telle fécondité ? Nous allons y réfléchir.

 Entrons d’abord en prière en chantant les psaumes.

 Méditation (Mt 9 32-38) :

 Dans l’évangile que nous venons d’entendre, il y a 3 séquences :

-      Un sourd-muet est transformé par le Christ. Il sort de son enfermement, devient capable d’entendre, d’écouter et de parler. Il peut habiter pleinement son existence. Porter du fruit.

-          Les foules admirent l’action de Jésus. Lui est plein de compassion pour elles. Il les trouve « désemparées, abattues, comme des brebis sans berger ». Il est là, il les accompagne.

-      Jésus s’adresse à ses disciples : « La moisson est abondante et les ouvriers peu nombreux. Priez le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers pour sa moisson ». Prière - Travail – Moisson.

 Je vais m’attarder un peu sur cette question des ouvriers, des bras pour la moisson. Je me souviens de mon enfance, de la solidarité de la famille pour aller « faner » chez mes grands-parents. Je revis nos jeux dans les meules de foin avec les cousins, les pique-niques et la bière (pour nous : la brune, celle qu’on trouve encore dans les bons monastères), le retour sur la remorque dans la paille, parfois avec précipitation à cause de la menace d’orage. Je me souviens de la joie des jours heureux. Je suis toujours fascinée lors de mes voyages par la vie des paysans dans les campagnes et leur mobilisation pour labourer, semer, récolter, conserver... le blé, le riz, le coton… J’admire le dur travail de ces familles, de ces villages, réunis, unis pour tirer le meilleur de la récolte, parfois dans des parcelles « improbables » comme on dit aujourd’hui, tant la pente est importante, la terre caillouteuse, les lots dispersés. Tous s’y mettent. A la fin, ils font la fête. Comme chez nous jadis.

 Savez-vous que pour moissonner un are, donc un carré de 10m sur 10m, pour quelqu’un qui sait y faire, il faut une heure avec une faucille, 15 minutes avec une faux. Aujourd’hui, une seule machine fauche, récolte les grains, les trie en les calibrant, et rejette les déchets entiers ou en copeaux. Elle coupe une largeur de 15-16m en une fois et déverse dans le camion qui la suit jusqu’à 100 tonnes de céréales à paille à l’heure. Deux personnes sont nécessaires pour ce travail. Deux paires de bras : une pour conduire la moissonneuse, une pour conduire le camion. Entre chauffeurs, entre ouvriers, une règle : se parler, s’écouter, se faire confiance.

 Je me dis alors que la phrase du Christ n’est guère plus adaptée à nos lieux et à notre temps ! Pour une moisson abondante, a-t-on besoin de bras nombreux ? Deux paires ne suffisent-elles pas ?

 Mais de quels bras parle notre évangile ? Des nôtres, pardi ! Eux seuls sont indispensables pour la récolte des fruits de notre quotidien, pour l’avènement du Royaume, pour porter envers nos frères la compassion et l’amour du Christ, pour « recevoir l’autre comme le Christ, avec le plus grand soin et la plus grande attention, car c’est à travers les autres qu’on reçoit le Christ » (RB 53, 15). C’est pour cela qu’il faut être au moins deux, comme doivent l’être les ouvriers de la moisson aujourd’hui : pour se parler, s’écouter, ne pas se replier sur soi-même, développer et vivre la charité fraternelle[1]. Et puis, on a besoin de l’Esprit…

 Jésus en posant un regard de compassion sur les foules, sur chacun.e d’entre nous, témoigne de la miséricorde divine. Il nous rappelle qu’il est présent et qu’il reconnaît à chacun la capacité de quitter son enfermement, d’accueillir la parole, de la faire rayonner dans sa vie. Il se tourne vers ses disciples, ceux qui lui sont proches, pour leur donner mission de porter l’amour de Dieu aux autres. C’est donc à chacun.e d’entre nous qu’il s’adresse. C’est là, le sens de cet évangile. Prions pour que nous vivions pleinement nos existences. Prions pour que nous soyons ouvriers pour la moisson de Dieu.  Prions pour que l’Esprit nous habite.

 Notre Père 

 Prions Dieu Notre Père…

 Prière finale

 Seigneur,

Ouvre nos oreilles, nos yeux et notre cœur pour recevoir ton message d’amour, et délie notre langue pour propager ta bonne nouvelle,

Couvre-nous de ta miséricorde et envoie ton esprit afin que nous trouvions l’énergie nécessaire pour te suivre et te rester fidèles,

Fais de nous des ouvriers de ta moisson, capables de développer la charité fraternelle et de participer ensemble à ton Royaume.

Nous te le demandons, par le Christ, Jésus, ton Fils, qui vit et règne avec toi dans l’unité du Saint Esprit, pour les siècles des siècles. Amen.



[1] C’est ce que disait Grégoire le Grand au sujet l’envoi des disciples deux par deux, dans une de ses homélies sur l’évangile de Luc (Lc 10, 1-9 ; Homélie 17) aux évêques réunis aux Fonds baptismaux de Latran, le 31/3/591.

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