dimanche 9 décembre 2012

Si quelqu'un vient à moi

Des foules nombreuses faisaient route avec lui, alors s’étant retourné il leur dit : « Si quelqu’un vient à moi sans haïr son père et sa mère, et son épouse, et ses enfants, et ses frères et ses sœurs, et encore sa propre vie, il ne peut pas être mon disciple.
Luc 14, 25-26

Viens Esprit de Dieu, viens brûler mon cœur au feu de ton amour
Viens Esprit de Dieu, viens me donner d’aimer Jésus et d’aimer tout être en lui.

Des foules nombreuses faisaient route avec lui,
Nous avons quitté la maison du Pharisien, et les propos de table qui s’y sont tenus. Jésus est à nouveau en route, en chemin. Et voici qu’il est accompagné non seulement par les disciples mais aussi par des foules nombreuses. C'est-à-dire des personnes qui lui sont plutôt favorables, qui devinent en lui une source nouvelle. Certains peut-être voudraient s’engager plus avant avec lui mais n’ont pas encore opéré le choix décisif… Cela suffit-il de marcher avec lui pour être disciple ? Voici que Jésus prend la parole :

 alors s’étant retourné il leur dit : « Si quelqu’un vient à moi sans haïr son père et sa mère, et son épouse, et ses enfants, et ses frères et ses sœurs, et encore sa propre vie, il ne peut pas être mon disciple.
La formule est directe, totale, rude ! Venir à Jésus est un premier pas, mais il doit être accompagné d’un mouvement intérieur, il doit être l’expression d’un choix, d’une liberté, d’une disponibilité.

Faut-il haïr tous les humains pour suivre Jésus, et tout spécialement ses proches ? le propos choque, révolte… Voyons ce qu’il veut nous dire. Tout d’abord une première explication vient d’un texte araméen ou hébreu sous-jacent, pour cette langue les nuances ne sont pas de mise. Pour dire préférer tel personne, on dira qu’il faut haïr les autres. On peut déjà alors se réconcilier un brin avec la formule. Il ne s’agit pas de haïr ses proches, mais de préférer Jésus. Mais on peut tenter aussi de comprendre la radicalité de la marche avec Jésus. Il s’agit d’ordonner ses priorités, ses relations, mais aussi d’une certaine manière de s’en libérer. Sortir du ghetto familial, des relations encore marquées de non liberté, d’emprise, etc… pour apprendre avec Jésus à bâtir des relations nouvelles, des relations marquées par une réelle autonomie des personnes, une vraie liberté, car un amour vrai n’implique-t-il pas une vraie liberté ?

Jésus reconnaît enfin que pour être son disciple, il faut un choix libre de la personne, il faut un choix délibéré de faire de Jésus le premier servi, le premier écouté,… Cela n’implique pas de mépriser les autres, mais de situer chaque relation à sa juste place au sein d’une vie de disciple.

Seigneur, apprends-moi le tout quitter pour toi, apprends-moi l’amour juste, vrai et profond, de tout être, en lien avec toi.

Seigneur, libère-nous de tout lien de servitude, fais-nous entrer dans des relations justes, qui disent notre attachement à toi, qui le reconnaissent, l’honorent.

Seigneur, sois le premier élan de mes jours.

1 commentaire:

raymond a dit…

"Pars vers toi-même, de ton pays, de ta famille et de la maison de ton père, vers la terre que je te ferai voir".(Gn 12,1)
Ces paroles adressées à Abraham sont à rapprocher de celles que je lis ici dans l'évangile de Luc.
Mais ce qui est puissant dans les versets 25-26 du ch.14 de Luc, c'est la haine qui est conditionnée à l'amour !
C'est aussi à rapprocher du "je te haime" bien cerné par Lytta Basset dans son livre "aimer sans dévorer"
Elle décrit "le passage de l'épée" comme une nécessité et c'est bien de cela dont il s'agit dans cette parole de Jésus à toutes ces "foules nombreuses" qui le suivent.

Voilà ce qu'elle dit : "Tel est toujours l'enjeu essentiel : se séparer au sens de se différencier... C'est l'antidote au fameux "mon enfant ou mon conjoint, ma mère, mon père, est tout pour moi". Comment sait-on que l'épée est passée ? On devient capable d'envisager la mort de son proche, la perte définitive de son bien : on est décidé à vivre quand même malgré la douleur. On a renoncé au pouvoir laissé à autrui sur sa propre vie et, du même coup, à son propre pouvoir sur lui.
Pourquoi faudrait-il "haïr"? Langage réaliste : quand on a idolâtré quelqu'un et qu'on en prend conscience, c'est souvent la haine qui déferle. Certes, toutes les nuances existent - hostilité, rejet, indifférence glacée, allergie à la personne - pourvu que le lien de dépendance soit coupé avec chacun des proches, là où le risque de fusion-dévoration est le plus grand. Mais pourquoi haïr sa propre personne? Parce qu'il en est ainsi : quand on est dévasté par la haine, on finit souvent par se détester soi-même.
Personnellement je trouve cette parole de Jésus déculpabilisante. Elle est adressée à ceux et celles qui sont déjà en chemin, attirés par une autre manière d'aimer : "si quelqu'un vient à moi...", si quelqu'un avance ver un "moi" libre d'aimer, il commencera par l'amère liberté de haïr, "il ne peut pas" faire autrement. En termes familiers, cela fait partie du programme ! Rude apprentissage : être "disciple" de Jésus, apprendre quelque chose de lui, ce serait consentir à ce que la haine fasse partie de l'amour, soit une étape inévitable vers le véritable amour... Ici on voit le coût élevé de la démarche : on est averti que la traversée de la haine ne sera pas une solution de facilité."
(Lytta Basset, Aimer sans dévorer, p.104à 106)