lundi 23 janvier 2023

Liturgie de la Parole, 3e lundi TO impair

 (Isabelle Halleux)

 

Introduction

Entre Noël et Nouvel An, mon fils Simon est venu nous présenter son nouvel ami. Vous en avez peut être entendu parler : ChatGPT. Il s’agit d’un robot de conversation, un programme informatique d’intelligence artificielle conçu pour répondre à vos questions en allant chercher des informations dans les publications sur internet. Il émeut beaucoup d’informaticiens par sa puissance. Dans le monde de l’éducation, on s’interroge : Où va-t-on si on demande à un programme de faire une dissertation à votre place ? Il faut l’interdire !

Haha ! Je me suis donc essayée à « lui » demander de me préparer l’homélie du jour, en portant attention à un verset qui m’interpelle  « Si quelqu’un blasphème contre l’Esprit Saint, il n’aura jamais de pardon, il sera coupable pour toujours » (Mc 3, 29).

Je l’ai interrogé sur les liens possibles entre ce passage de l’évangile et certains textes du Nouveau et de l’Ancien Testament, et aussi sur ce qui dit la règle de Saint Benoît sur le blasphème contre l’Esprit ! Il m’a donné des références utiles. Pour ce qui est de la règle de Saint Benoît, il a insisté sur l’importance de l’obéissance à Dieu et à ses représentants– en particulier donc à l’abbé, qui pourrait être mise en lien à l’idée de blasphème contre l’Esprit, et sur l’importance de la parole de Dieu et de la révélation de l’Esprit de Dieu, qui pourrait aussi être liée à l’idée de blasphème contre l’Esprit. Il ajoute que je pourrais certainement trouver d’autres passages en relisant la règle. Avouez que cela nous en bouche un coin !

Mais mon ami, qui est très poli, donne ses limites : il est un outil numérique, programmé pour certaines tâches, et ne se base que sur ce qui est disponible sur internet. D’après nos conversations, je pense que, pour la question qui m’intéresse, il se montre un peu « conservateur ».  Je ne vous lirai donc pas son homélie, un peu « tarte à la crème », mais vous livrerai humblement quelques éléments de ma méditation personnelle : Comment la question du blasphème contre l’Esprit donne-t-elle à réfléchir à notre propre foi, à notre relation à Dieu, à la réconciliation dans les cas les plus graves ?  

Connectons-nous à Dieu par le chant des psaumes.

 

Méditation

Dans l’évangile de Marc (Mc 3, 29), il est écrit : « Si quelqu’un blasphème contre l’Esprit Saint, il n’aura jamais de pardon. Il est coupable d’un péché pour toujours. ». Dans Matthieu (Mt 12, 32) : « Si quelqu’un parle contre l’Esprit Saint, cela ne lui sera pas pardonné ni en ce monde, ni dans le monde à venir ». Dans Luc (Lc 12, 10) : « A celui qui blasphème contre l’Esprit Saint, il ne sera pas pardonné ». Simple, clair, pas de « si », pas d’insistance sur la culpabilité, ni sur le « partout » et « pour toujours » !

Ce verset est difficile, il a été et est toujours sujet à controverse. Ce n’est pas d’abord une question de jugement du blasphème par les hommes, l’église ou la loi - rappelons-nous les tensions récentes suite à des écrits, des dessins, des déclarations jugées blasphématoires - : c’est une question à régler entre celui qui blasphème et Dieu lui-même.  En face à face.

« Celui qui blasphème ». Le texte grec de Luc utilise une tournure plutôt rare[1] dans les synoptiques que l’on peut traduire par « celui qui blasphème » mais aussi « celui a blasphémé » ou « celui qui est blasphémant ». Cela qualifie en quelque sorte un état dans lequel on est et dont on ne sort pas, de rejet permanent de la grâce et de la miséricorde de Dieu. Si tu es dans un état d’esprit tel que ton cœur s’endurcit, que tu rejettes ou que tu méprises l’Esprit de Dieu en toi, que tu dis que « Dieu n’est rien » (Ps 9b, 3-4), tu te sépares inexorablement de lui, tu t’exclus toi-même du pardon et tu ne peux être pardonné. Ce verset est la plus belle lapalissade des écritures !

« Un péché pour toujours » qui « ne sera pas pardonné ». Irrémissible à un moment donné, soit, mais Je crois sincèrement que la rédemption est toujours possible, et pour tout le monde ! Même pour les péchés réputés les plus graves, comme celui contre l’esprit. Rémissible quand l’état d’esprit a changé. Tu te « retournes », tu cherches à suivre le Christ, à vivre en Dieu, sincèrement. Dieu t’accueille !  Il se réjouit même, car il t’attendait.  Il te donne sa paix.

Pour méditer un peu plus loin en silence : Quels sont nos dos tournés à Dieu et à ses représentants dans nos communautés ? Quelles sont nos parties de cœur endurcis ? Nos rejets de l’Amour ? Nos ruptures avec le chemin montré par Jésus ? Comment établissons/rétablissons-nous la relation à Dieu ? Comment s’exprime notre fidélité ?

 

Notre Père

Avec Jésus, redisons les mots qu’il a utilisés pour parler à son Père…

 

Prière finale

Il y a tellement de joie dans le monde, dans les familles, dans les communautés quand les liens se tissent. Et il y a tant de souffrance quand les liens se rompent. Les parents, les conjoints, les enfants, les amis pleurent, impuissants. Il y a aussi beaucoup de souffrance chez ceux et celles qui coupent les ponts avec toi, Seigneur. Sans doute pleures-tu aussi.

Donne-nous ta patience et ta confiance. Nourris notre espérance. Aide-nous à être des hommes et des femmes de relation avec toi et avec les autres, nos frères et sœurs. Rends-nous avides de réconciliation. Rends-nous avides d’obéissance, avides de ta parole et de la révélation de ton Esprit. Nous te le demandons, par Jésus, ton fils, qui règne avec toi dans l’unité du Saint Esprit pour les siècles des siècles.



[1] un participe aoriste : le mot choisi pour « blasphème » peut être utilisé comme verbe ou comme adjectif.

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