(sœur Marie-Christine)
DOROTHÉE DE GAZA
L'enseignement
qu'il y donna à ses moines nous est transmis par ses Instructions où l'ascèse du désert est présentée
avec une simplicité et un sens du réel remarquables.
En
supportant le simple mot de votre frère, vous pouviez donc éteindre le petit
charbon, avant que n'apparaisse le trouble. Mais même ce trouble, vous pouvez
encore l'apaiser facilement, lorsqu’il vient de se produire, par le silence,
par la prière. Si, au contraire, vous continuez à faire de la fumée,
c'est-à-dire à exalter et à exciter votre cœur
en pensant : « Pourquoi m'a-t-il dit cela ? Moi aussi, je peux lui en
dire ! », l'afflux et le choc des pensées, pourrait-on dire, travaillant et
échauffant le cœur, provoquent la flamme de l'irritation... Voilà donc venue
l'irritation. Si vous voulez, vous pouvez l'éteindre encore, avant qu'elle ne
devienne colère. Mais si vous continuez à vous troubler et à troubler les
autres, vous faites comme celui qui jette des morceaux de bois dans le foyer et
active le feu : c'est alors qu'ils deviennent des charbons. Et c'est la
colère...
Si à l'origine du trouble, dès
qu'apparaissent la fumée et les étincelles, on prend les devants en s'accusant
soi-même, avant que ne jaillisse la flamme de l'irritation, on reste en paix.
Mais si, l'irritation une fois provoquée, on ne se calme pas, et qu'on persiste
dans le trouble et l'exaltation, on ressemble à celui qui fournit du bois au feu
et continue de le faire brûler, jusqu'à ce qu'il devienne de belles braises. Et
de même que les braises devenues charbons et mises de côté, subsistent des
années sans pourrir, même si on jette de l'eau dessus, ainsi la colère qui se
prolonge devient de la rancune...
Vous savez maintenant ce qu'est le
premier trouble, ce qu'est l'irritation, ce qu'est la colère et ce qu'est la
rancune. Voyez-vous comment d'une seule parole on parvient à un si grand mal ?
Si dès le début on avait jeté le blâme sur soi, si on avait supporté patiemment
la parole de son frère, sans vouloir se venger, ni répondre deux ou même cinq
paroles pour une seule, et rendre le mal pour le mal, on aurait pu échapper à
tous ces maux. Aussi, je ne cesse de vous le dire, arrachez vos passions tant
qu'elles sont jeunes, avant qu'elles ne se soient fortifiées en vous et que
vous n'ayez à peiner. Car autre chose est d'arracher une petite plante, autre
chose de déraciner un grand arbre.
Instructions, VIII, 89-91 : « Sources Chrétiennes » n° 92, Le Cerf, Paris 1963, p. 309-311.
„Lectures chrétiennes pour notre temps” : © 1971 Abbaye d'Orval, Belgique
fiche D 24
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