mercredi 9 février 2022

Liturgie de la Parole, 5e mercredi TO

 (Isabelle)

Introduction

La première lecture du jour (1 R 10, 1-10) est magnifique ! Un vrai film hollywoodien se déroule devant nos yeux : La Reine de Saba rend visite à Salomon avec toute son escorte et tous ses présents. Elle lui pose des énigmes pour éprouver son intelligence et sa sagesse - malheureusement, on ne nous dit pas lesquelles. « Tu surpasses en sagesse et en magnificence la renommée qui était venue jusqu’à moi ! Béni soit le Seigneur qui t’a montré sa bienveillance en te plaçant sur le trône d’Israël ». Et elle s’en retourne dans son royaume, impressionnée.

 Nous entendrons la suite du chapitre 7 de l’Evangile de Marc qui, hier, nous donnait une bonne entrée en matière sur ce qui va nous interpeller aujourd’hui. Rappelez-vous : aux pharisiens et aux scribes qui l’interrogeaient parce que les disciples prenaient leur repas avec des mains impures, Jésus citait Isaïe : « Ce peuple m’honore des lèvres, mais son cœur est loin de moi. C’est en vain qu’ils me rendent un culte ; les doctrines qu’ils enseignent ne sont que des préceptes humains. ». Le Christ ajoutait, à l’adresse des pharisiens : « Vous aussi, vous laissez de côté le commandement de Dieu, pour vous attacher à la tradition des hommes ». L’évangile se poursuit aujourd’hui, en donnant la raison de l’impureté de l’homme : « Tout ce mal vient du dedans de lui-même ! ».  Pas de l’extérieur !

 Avant de méditer cette Parole de Dieu, entrons en prière avec le chant des psaumes.

 

Méditation (Mc 7, 14-23)

« Rien de ce qui est extérieur à l’homme et qui entre en lui ne peut le rendre impur.
Mais ce qui sort de l’homme, voilà ce qui rend l’homme impur ». « Le mal vient du dedans de lui-même ».

Le Christ était juif. Il connaissait bien les prescriptions de la Torah (« mitzvot ») qu’il fallait suivre pour être pur et accéder Dieu ! Les plus connues sont les 10 commandements, bien sûr. Et il y a 603 autres prescriptions positives (« tu feras ») et négatives (« tu ne feras pas »), parmi lesquelles les ablutions rituelles, les incompatibilités alimentaires et les obligations culinaires un peu surprenantes que les juifs connaissent encore aujourd’hui. Jésus pratiquait sans doute avec assiduité ces prescriptions depuis qu’il était petit.

On a entendu hier que certains disciples négligeaient les ablutions rituelles ; cela gênait beaucoup les pharisiens car tout le système était basé sur l’obéissance à ces règles d’inspiration divine. Elles garantissaient la pureté du juif car impur, « contaminé », « mélangé », il ne pouvait prétendre à rencontrer Dieu. Etaient « impurs chroniques » les lépreux et les étrangers. Des infréquentables, des intouchables. Tous les hommes n’auraient donc pas accès à l’expérience de Dieu ? A sa miséricorde ? A la communauté des croyants ? A cause de sa naissance ? Ou faute de pratiques rituelles ? Aujourd’hui, pour la plupart de nos contemporains, c’est impensable - quoique … ! Pour le Christ, c’était inacceptable de limiter l’accès à son Père ! « Vous laissez de côté le commandement de Dieu, pour vous attacher à la tradition des hommes. », disait-il aux pharisiens.

Dans cet évangile, nous voyons Jésus clarifier les choses et ouvrir des perspectives pour tous. Il s’exprime face à la foule, composée sans doute de toutes sortes de personnes, pures et impures. Il rejette, ou en tout cas minimise, les règles de purification instituées. Il insiste sur ce qui empêche vraiment la rencontre avec le Seigneur : l’homme lui-même, avec ses « pensées perverses » qui empêchent la relation vraie avec les autres, avec soi-même et avec Dieu. Jean Cassien le redisait autrement, avec peut-être des mots plus proches de notre vécu quotidien que « vol, meurtre, adultère, débauche, etc.». Je cite : « Ne connaître ni l’envie, ni la colère ; n’agir point par frivolité ; ne pas chercher son intérêt propre ; ne tenir point compte du mal ; et le reste : n’est-ce pas offrir continuellement à Dieu un cœur parfait et très pur, et le garder intact de tout mouvement de la passion ». Cela ressemble bien aux instruments de l’art spirituel de la Règle (RB, ch. IV, 22-31).

 Le Christ met en effet en avant, indirectement d’accord, l’essence même de la chrétienté : la pureté du cœur de l’homme comme seul critère d’accès au divin. Le cœur. Je cite ici le pape François aux JMJ en 2015 : « le cœur, le centre des sentiments, des pensées, et des intentions de la personne humaine, le résumé de l’être humain dans sa totalité et dans son unité de corps et d’âme, dans sa capacité d’aimer et d’être aimé. Dieu ne regarde pas les apparences, mais le cœur (1S 16, 7) ;  on peut dire que c’est à partir de notre cœur que nous pouvons voir Dieu et dialoguer avec lui.  Chacun doit ainsi apprendre à discerner ce qui peut polluer son cœur, se former une conscience droite et sensible, capable de « discerner quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, ce qui est capable de lui plaire, ce qui est parfait (Rm 12, 2) ».  Anselm Grün parle de « se fondre en Dieu ». J’aime bien l’expression. « Une écologie humaine qui nous aide à respirer l’air pur qui vient des belles choses, de l’amour vrai, de la sainteté ». Pureté du cœur. Calme intérieur.

 Rabbi Simlaï, contemporain d’Origène au IIIe siècle, affirmait qu’Amos (Amos 5:4) avait réduit les mitzvot, ces innombrables commandements de la Torah, à un seul : « Cherchez moi, et vous vivrez ». Quel beau résumé ! C’est la base de la vie en Dieu, pour tout homme ! C’est la base de la vie monastique ! Un travail permanent de conversion, de purification intérieure par la réconciliation avec soi-même et avec les autres.

Jésus, dans cet évangile, nous dit-il autre chose ?

Oraison

Dieu notre Père, aide-nous à être « les gardiens de notre cœur et de nos passions » (Evagre le Pontique), à descendre au fond de notre réalité, à la transformer en prière et à trouver ce lieu de paix dans lequel tu demeures en nous et nous en toi. Nous te le demandons, par Jésus Christ, ton fils notre Seigneur.

 

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