(sœur Marie-Raphaël)
Ouverture
Hier, nous étions à Cana pour un repas de noces.
Aujourd’hui, il sera encore question de l’Epoux et du vin nouveau. Nous faisons
aussi mémoire de saint Antoine le grand, le champion du désert… Lui qui jeûnait
beaucoup, lui le grand ascète, qu’aurait-il pensé des lectures
d’aujourd’hui ? Mais il était passionné, il était fou de Dieu, il
connaissait la sobre ivresse de l’Esprit saint ! Avec lui, prolongeons la
joie du banquet en plongeant dans le bon vin de la parole de Dieu !
Résonances
-
Pourquoi n’as-tu pas obéi
à la voix du Seigneur ?
-
Mais j’ai obéi à la
voix du Seigneur !
-
Les Seigneur aime-t-il
les holocaustes et les sacrifices autant que l’obéissance à sa parole ?
On assiste, dans la première lecture, à la fin de la
royauté de Saül, la goutte qui fait déborder le vase et qui amène Dieu à se
repentir de l’avoir fait régner sur Israël. Quel est l’enjeu ?
Dans ce qui précède, Dieu a demandé solennellement à
Saül, par l’intermédiaire de Samuel, d’aller combattre Amalec. Il lui a enjoint
de vouer à l’anathème tout ce qui lui appartient. Tout : « l’homme
comme la femme, l’enfant comme le nourrisson, le bœuf comme le mouton, le
chameau comme l’âne ». L’anathème, c’est vraiment une destruction totale,
radicale. De la part de Dieu, cela nous paraît révoltant. Qu’est-ce qui se
cache derrière cet ordre brutal ?
Il est permis de lire ce récit dans un sens
allégorique. Amalec a « barré la route à Israël au moment de la sortie
d’Egypte ». Ainsi, Amalec représente ce qui empêche d’accéder à la pleine
liberté de l’alliance. Pour permettre au peuple d’entrer dans l’alliance, Dieu
demande à son roi d’exterminer radicalement Amalec, d’exterminer radicalement
l’obstacle à la liberté. Or, que se passe-t-il ? Saül remporte facilement
la victoire, il extermine bien tout le peuple, mais il capture vivant Agag, le
roi d’Amalec. Il épargne aussi le meilleur du petit et du gros bétail. De
connivence avec le peuple (qui ne veut pas voir se perdre un si beau butin), il
décide d’épargner le meilleur et de ne vouer à l’anathème que ce qui est sans
valeur et de moindre qualité. La lecture allégorique saute aux yeux. Quand Dieu
nous demande d’éradiquer le mal à la racine, il suppose que nous supprimerons d’abord
et surtout ce qui en est la cause. Si la victoire contre le mal épargne le
prince du mal, cette victoire est une défaite. Dieu leur demande de ne faire
aucun butin, de tout vouer à l’anathème, mais ils laissent au contraire la
victoire leur tourner la tête au point de retomber dans la convoitise. Or,
c’est précisément la convoitise qui les empêche d’accéder à la pleine liberté
de l’alliance !
Quand vient le prophète pour mettre le doigt sur cette
désobéissance, ils essaient de se justifier, de se dépatouiller en arguant
qu’ils avaient justement l’intention de les offrir à Dieu en sacrifice et que
c’est pour cela qu’ils les avaient épargnés. Mensonge grossier qui ne fait
qu’en rajouter. On verra à la fin du chapitre à quel point Dieu est dégoûté des
manigances de Saül.
Il y a un lien que l’on peut faire avec l’évangile. On
demande à Jésus pourquoi ses disciples ne jeûnent pas… Les pratiques d’ascèse,
comme le jeûne, à l’instar des sacrifices et holocaustes de l’ancienne
alliance, peuvent être vécus comme des moyens pour se rapprocher de Dieu. Mais
ces moyens peuvent aussi aboutir à un résultat opposé, à une plus grande
distance d’avec Dieu, en servant de prétexte à la convoitise et à l’orgueil.
Que dit Jésus ? En parlant de la présence de l’Epoux, je pense qu’il nous
invite à remettre au centre ce qui doit l’être : la rencontre avec Dieu,
la présence de Dieu, la joie de cette présence qui est semblable à la joie des
épousailles. Plutôt que de se braquer sur ce qui est permis / défendu,
considérer le don, la grandeur du don qui nous est fait, pour ne jamais
oublier de nous réjouir et de rendre grâce. Passer résolument du côté du vin
nouveau !
Prière
Seigneur, tu es l’Epoux dont la présence nous apporte
la plénitude de la joie. Viens encore nous manifester ta gloire ! Tu
offres le vin nouveau de ton alliance : fais de nous des outres neuves
capables de te recevoir. À ceux qui se laissent engluer dans la morosité de la tristesse,
donne le vin de ta joie. À ceux qui se durcissent dans le mépris, donne la
douceur de ton Esprit. À ceux qui veulent te servir avec droiture, donne
l’ivresse de la générosité. Toi qui…
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