(Isabelle)
Introduction
Bonjour
à tous, en ce 2e vendredi de carême.
Je
vous livre les titres donnés par l’AELF aux deux lectures que la liturgie nous
propose aujourd’hui : Première lecture, du livre de la Genèse : «
Voici l’expert en songes qui arrive ! Allons-y, tuons-le ! » (Gn 37,
3-4.12-13a.17b-28) ; Deuxième lecture, de l’Evangile de
Matthieu au chapitre 21 : « Voici l’héritier : venez ! Tuons-le ! » (Mt
21, 33-43.45-46) !
Quelle violence ! On se
sent invité à être témoins de quelque chose d’insupportable.
L’actualité ne nous aide pas à
faire passer la pilule. Notez que je ne me sens pas vraiment mieux si je rappelle
les descriptifs que nous utilisons pour faire comprendre rapidement de quoi va
parler : Joseph vendu par ses frères et la parabole des vignerons
homicides. Joseph sera épargné. Le fils ne le sera pas. Comment appréhender ces
histoires terribles ?
L’Evangile de Matthieu se conclut par deux versets (22-23) du psaume 117, que nous savons être un psaume de louange : « La pierre qu'ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d'angle : c'est là l'œuvre du Seigneur, la merveille devant nos yeux ! » Une ouverture pour une méditation nous permettant de dépasser l’effroi …
Avant d’explorer la parabole
relayée par Matthieu, entrons en prière en chantant les psaumes.
Méditation Mt 21, 33-46
Dans cette parabole, on peut
chercher à identifier qui est qui, pour essayer d’en comprendre la portée !
Les apôtres et les théologiens nous en donnent les clés : le maître, c’est
Dieu, la vigne c’est le peuple de Dieu, les serviteurs envoyés par le maître auprès
des vignerons sont les prophètes, et le fils envoyé est le Messie, le Christ. La
parabole nous est habituellement présentée ainsi comme une allégorie de la
passion.
Pour
essayer de la mettre davantage en lumière dans nos esprits, relisons Isaïe 5,
1-7 où il est aussi question d’une vigne.
« Mon ami avait une vigne sur un coteau
fertile. Il en retourna la terre, en retira les pierres, pour y mettre un plant
de qualité. Au milieu, il bâtit une tour de garde et creusa aussi un pressoir.
Il en attendait de beaux raisins, mais elle en donna de mauvais. (…)
Pouvais-je faire pour ma vigne plus que je n’ai fait ? J’attendais de
beaux raisins, pourquoi en a-t-elle donné de mauvais ?
Eh bien, je vais vous apprendre ce que je ferai de
ma vigne : enlever sa clôture pour qu’elle soit dévorée par les animaux,
ouvrir une brèche dans son mur pour qu’elle soit piétinée. J’en ferai une pente
désolée ; elle ne sera ni taillée ni sarclée, il y poussera des épines et
des ronces ; j’interdirai aux nuages d’y faire tomber la pluie. La vigne
du Seigneur de l’univers, c’est la maison d’Israël. Le plant qu’il chérissait,
ce sont les hommes de Juda. Il en attendait le droit, et voici le crime ;
il en attendait la justice, et voici les cris. »
La
parabole racontée par le Christ commence
de la même manière mais ici, à l’inverse de la vigne d’Isaïe, la sienne est
féconde. Ce ne sont pas les fruits qui posent problème au maître, mais les
vignerons, à qui il a confié le domaine en fermage. Cela ne lui pose pas
problème à cause de leur manque de compétences, mais à cause de leur « infidélité
au projet », c’est-à-dire leur volonté première de s’approprier le domaine.
Ils se comportent donc comme si la vigne était à eux, et vont jusqu’à tuer le
fils du maître pour être sûrs de prendre définitivement la main dessus.
Le
maître du domaine, confiant, envoie ses serviteurs pour récolter le fruit du
fermage. Il les dépêche une fois, deux fois, même plusieurs fois d’après Marc (Mc
12, 1-9). Sans succès. Alors il envoie son fils, non pas pour sévir contre les
vignerons, mais pour le représenter, vraiment dans le but de récolter le fruit.
On voit que le maître n’abandonne pas. Il espère ce qui était prévu, conclu. La
parabole nous montre la persévérance du maître envers sa vigne.
Cette
manière de faire peut changer notre façon de voir : il ne s’agit pas pour le
maître de se débarrasser des vignerons et de recommencer de la même façon avec
d’autres, comme le suggèrent les grands prêtres, mais il s’agit de « s’organiser »
pour récolter les fruits. A défaut – ou en plus ? – il va jusqu’à donner la
vigne à « une nation qui lui fera produire des fruits ». Ce qui aurait
pu sembler être une défaite du maître marque le début d’une victoire
extraordinaire : la vigne ne sera pas détruite même si le fils, l’héritier
a été tué. Elle ne sera pas détruite, alors que les vignerons ont voulu faire
main basse dessus. Elle ne sera pas abandonnée par le maître : elle sera
donnée et donnera du fruit ailleurs, autrement.
Elle
se développera et fructifiera avec ceux qui bâtiront sur « la pierre
qu'ont rejetée les bâtisseurs, la pierre devenue la pierre d'angle : c'est là
l'oeuvre du Seigneur, la merveille devant nos yeux » (Ps 117, 22-23 ;
Mt 21, 42). Les actes des Apôtres (4, 11) nous indiquent que la pierre d’angle,
celle sur laquelle l’édifice tient debout, sans laquelle tout s’effondre, c’est
Jésus, sans qui il n’y a pas de salut. La première lettre de
Pierre (1 Pierre 2, 6-7) nous propose d’être les pierres vivantes de cet
édifice. Le royaume est dans nos mains.
Je vous propose de méditer sur
ceci : Et si, au lieu d’appeler cette parabole « la parabole des
vignerons homicides », ce qui est plutôt désespérant, nous parlions dorénavant
de « la parabole de la persévérance de Dieu », ou de « la
parabole du Royaume qui se déploie » ? Ne rejoindrions-nous pas le
psaume 117 auquel le Christ fait référence, ce psaume qui fut
probablement chanté à la Dédicace du second temple de Jérusalem, dans lequel on
remercie Dieu pour l’érection du nouveau temple et pour la joie de la fête d’un
royaume où on accueille ceux qui arrivent, ceux qui attendaient et ceux qu’on
n’attendait pas ? Avec cette parabole, ne continuons-nous pas à entrer
avec joie dans le mystère pascal ?
Notre
Père
Avec Jésus, la pierre d’angle
sur laquelle nous appuyer, nous redisons ensemble …
Oraison
Seigneur,
nous te remercions pour ta persévérance à faire advenir de grandes choses en
nous et à nous soutenir pour porter des fruits. Pardonne nos comportements de
vignerons infidèles et aide-nous à nous accueillir le sacrifice du Fils que tu as
envoyé pour notre salut. Aide-nous à œuvrer à la construction de ton royaume,
dans la diversité de nos vies et de nos cultures. Nous te le demandons, par
Jésus le Christ, qui vit et règne avec toi et le Saint Esprit, pour les siècles
des siècles. Amen.
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