vendredi 17 avril 2015

afin que notre joie soit parfaite



2 Jn 8-13


Le texte (traduction : Traduction de la Bible de Jérusalem) :
« 8 Ayez les yeux sur vous, pour ne pas perdre le fruit de nos travaux, mais recevoir au contraire une pleine récompense.
 9 Quiconque va plus avant et ne demeure pas dans la doctrine du Christ ne possède pas Dieu. Celui qui demeure dans la doctrine, c'est lui qui possède et le Père et le Fils.
 10 Si quelqu'un vient à vous sans apporter cette doctrine, ne le recevez pas chez vous et abstenez-vous de le saluer.
 11 Celui qui le salue participe à ses oeuvres mauvaises.
 12 Ayant beaucoup de choses à vous écrire, j'ai préféré ne pas le faire avec du papier et de l'encre. Mais j'espère vous rejoindre et vous parler de vive voix, afin que notre joie soit parfaite.
 13 Les enfants de ta sœur Élue te saluent »

Prière (suggérée par Enzo Bianchi) :
« Notre Dieu, Père de la Lumière, tu as envoyé dans le monde ton Fils, Parole faite chair, pour te manifester à nous, les hommes.
Envoie maintenant sur moi ton Esprit Saint, afin que je puisse rencontrer Jésus-Christ dans cette Parole qui vient de toi ; afin que je la connaisse plus profondément et que, en la connaissant, je l’aime plus intensément pour parvenir ainsi à la béatitude du Royaume. Amen »

Lecture verset par verset :
Après avoir évoqué la doctrine déviante (v. 7), Jean se tourne vers les fidèles de l’Eglise et les exhorte : « Ayez les yeux sur vous ». Invitation à la vigilance, en ce temps où des séducteurs essaient de détourner les fidèles de la foi en Jésus.
La suite du verset 8 a posé question lors du partage à Hurtebise. Nous lisions dans une traduction « afin de ne pas perdre le fruit de vos œuvres », à savoir de votre agir, de vos actions. Je découvre à présent la traduction indiquée ci-dessus « pour ne pas perdre le fruit de nos travaux », comme si la perte visait l’effort de Jean dans la transmission de la foi…

(v. 9) « Quiconque va plus avant et ne demeure pas dans la doctrine du Christ… » : le terme de « doctrine » ne recouvre pas adéquatement le substantif grec didachè. On le traduirait plus justement par le mot « enseignement ».
Jean formule une nouvelle fois l’importance d’une juste doctrine, d’une foi éclairée. L’expression « aller plus avant » fait probablement allusion à des interprétations qui dépassent la révélation de Jésus, de prétendues connaissances que des hérétiques essaient d’imposer comme authentiques.
Jean y préfère « la doctrine du Christ », celle d’un Dieu amour (cfr v. 4-6), dans laquelle il convient de « demeurer ». Ce verbe est très fréquent dans le quatrième évangile. Parmi d’autres attestations, citons seulement la métaphore de la vigne et des sarments : « Demeurez en moi, comme moi en vous. De même que le sarment ne peut de lui-même porter du fruit s'il ne demeure pas sur la vigne, ainsi vous non plus, si vous ne demeurez pas en moi » (Jn 15, 4).
Demeurer en Jésus pour porter du fruit, demeurer dans l’enseignement de Jésus pour « recevoir une pleine récompense ». Par l’emploi des mots, on constate une parenté entre l’évangile et les lettres : Jean en est bien l’auteur…
« … c'est lui qui possède et le Père et le Fils » : littéralement « c’est lui qui a et le Père et le Fils ». Ce verset confirme ce que nous disions de la menace qui pesait contre l’humanité de Jésus (Jésus serait Dieu mais pas vraiment homme : v. 7). Au contraire, celui qui croit en l’enseignement a le Père et le Fils, c’est-à-dire qu’il y croit ou bien qu’il l’a au fond du cœur. Les deux interprétations ne s’excluent cependant pas…

(v. 10-11) « Si quelqu'un vient à vous sans apporter cette doctrine, ne le recevez pas chez vous et abstenez-vous de le saluer. Celui qui le salue participe à ses oeuvres mauvaises » : Je préfère considérer les deux versets car le seul verset 10 peut paraître choquant, lorsqu’on le met en parallèle avec l’enseignement de Jésus. Il est a priori difficile de comprendre un tel rejet de ceux qui pensent autrement… Rappelons-nous le contexte historique et le danger que représentaient des doctrines déviantes pour les jeunes communautés encore fragiles.
De plus, dans la culture juive, saluer quelqu’un signifie le cautionner[1], ce que le verset 11 confirme : « Celui qui le salue participe à ses œuvres mauvaises ». Au lieu de « participe », comprenons « est en communion ». De nouveau, comme je l’ai écrit ci-dessus, il ne peut pas être question de dialogue à cette époque.

(v. 12) « Ayant beaucoup de choses à vous écrire, j'ai préféré ne pas le faire avec du papier et de l'encre. Mais j'espère vous rejoindre et vous parler de vive voix, afin que notre joie soit parfaite » : la lettre est comme suspendue, dans la perspective d’une rencontre et d’un échange « de vive voix » (littéralement « de bouche à bouche »). Nous pouvons imaginer chez Jean un grand souci de la transmission de la parole et de l’expérience, lui qui a connu, fréquenté et entendu Jésus…
Et l’aboutissement d’un tel échange n’est pas d’abord d’assurer une bonne connaissance de la doctrine ou une adéquate compréhension de la révélation mais « afin que notre joie soit parfaite ». Cet objectif ouvrait la première lettre de Jean (« Tout ceci, nous vous l'écrivons pour que notre joie soit complète » : 1Jn 1, 4) et apparaît aussi dans le quatrième évangile. A travers son apôtre, Dieu nous souhaite la joie…

(v. 13) « Les enfants de ta sœur Élue te saluent » : les fidèles de l’Eglise de Jean saluent ceux qui sont les destinataires de la lettre. Nous ne savons pas précisément de quelles Eglises il s’agit, même si les conjectures évoquent Ephèse. L’essentiel est plutôt de savoir que cette lettre s’adresse à nous, aujourd’hui, et qu’elle nous est Bonne Nouvelle…



Prière :
Seigneur Jésus, par cette lettre de ton apôtre, tu veux nous apporter force et réconfort. Cette Bonne Nouvelle de ton amour, tu nous la révèles, pour qu’elle porte du fruit dans nos vies.
Pour cette joie que tu nous as promis et que tu veux déployer en nos cœurs, Seigneur Ressuscité, sois béni. Alléluia !

Sr Marie-Jean

[1] Dans les Actes des Apôtres, Paul a été salué pour être ensuite invité à prêcher : cfr Ac 13, 15 sq.

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