jeudi 29 septembre 2016

Les gens avaient peur

Esther (grec) 1
14 Puis s’approchèrent de lui Arkésaïos, Sarsathaïos et Malèséar, ministres des Perses et des Mèdes, qui se tenaient près du roi, siégeant en premier aux côtés du roi. 15 Ils lui indiquèrent, d’après les lois, ce qu’il fallait faire à la reine Astîn, attendu qu’elle n’avait pas exécuté les décisions du roi transmises par les eunuques. 16 Moukhaïos prit alors la parole en présence du roi et des ministres : « Ce n’est pas seulement le roi que la reine Astîn a bafoué, mais aussi tous les ministres et tous les gouverneurs royaux. 17 Le roi leur avait en effet rapporté les paroles de la reine et la manière dont elle lui avait répliqué. De la même façon qu’elle a répliqué au roi Artaxerxès, 18 c’est ainsi que toutes les autres dames des ministres perses et mèdes, dès qu’elles auront appris sa réponse au roi, oseront infliger un semblable déshonneur à leurs maris. 19 S’il plaît au roi, qu’il produise une ordonnance royale qui sera inscrite dans les lois des Mèdes et des Perses. Qu’il n’y ait pas d’autre procédure ! Et que la reine ne s’approche plus du roi, qui donnera son titre de reine à une femme meilleure qu’elle ! 20 Et que retentisse la loi établie par le roi, qu’il fera appliquer dans son royaume. Ainsi, toutes les femmes entoureront d’égards leurs maris, du plus pauvre au plus riche. » 21 La chose plut au roi et aux ministres. Aussi le roi agit-il suivant les propos de Moukhaïos. 22 Il envoya des lettres dans tout le royaume suivant chaque province selon sa langue, de sorte que les gens avaient peur dans leurs maisons. 

Viens Esprit Saint, habite nos consciences, nos jugements, éclaire nos décisions afin qu’elles ne portent aucun préjudice autour de nous.

Puis s’approchèrent de lui Arkésaïos, Sarsathaïos et Malèséar, ministres des Perses et des Mèdes, qui se tenaient près du roi, siégeant en premier aux côtés du roi. Ils lui indiquèrent, d’après les lois, ce qu’il fallait faire à la reine Astîn, attendu qu’elle n’avait pas exécuté les décisions du roi transmises par les eunuques : nous sommes en présence d’un demi-chapitre assez obscur, où l’auteur nous emmène dans les influences au palais, et où quantité de choses sont évoquées sans qu’il leur soit donné un contenu. Pour les besoins du récit, il fallait bien que la reine Astîn déplaise au roi et soit écartée… mais cela n’est pas dit : on ne connaît pas « ce qu’il fallait faire à la reine Astîn » !

Moukhaïos prit alors la parole en présence du roi et des ministres : alors que la chose semble claire, voici un nouvel intervenant dont on ignore tout et qui ne réapparaîtra pas. Mais plus de personnages sont nommés - et nous en avons pas mal dans ce passage – plus le récit a allure véridique.

« Ce n’est pas seulement le roi que la reine Astîn a bafoué, mais aussi tous les ministres et tous les gouverneurs royaux. Le roi leur avait en effet rapporté les paroles de la reine et la manière dont elle lui avait répliqué. De la même façon qu’elle a répliqué au roi Artaxerxès, c’est ainsi que toutes les autres dames des ministres perses et mèdes, dès qu’elles auront appris sa réponse au roi, oseront infliger un semblable déshonneur à leurs maris. S’il plaît au roi, qu’il produise une ordonnance royale qui sera inscrite dans les lois des Mèdes et des Perses : et l’incident de palais dégénère soudain en une grande menace pesant sur tous les hommes haut-placés : que leurs femmes n’en viennent à leur répliquer à l’exemple de la reine !! Quel déshonneur pour eux ! C’est ainsi que l’intérêt personnel se fait jour tout d’un coup, plus fort que l’intérêt même du royaume.

Qu’il n’y ait pas d’autre procédure ! Et que la reine ne s’approche plus du roi, qui donnera son titre de reine à une femme meilleure qu’elle ! Et que retentisse la loi établie par le roi, qu’il fera appliquer dans son royaume. Ainsi, toutes les femmes entoureront d’égards leurs maris, du plus pauvre au plus riche : pour donner force à son propos, il revient habilement au cas de la reine, pour l’élargir « généreusement » à tous les maris, quels que soient leur statut et leur richesse ! Nous percevons ainsi combien le faux-pas d’une reine assorti de la peur des puissants va se retourner contre le peuple tout entier. 

La chose plut au roi et aux ministres. Aussi le roi agit-il suivant les propos de Moukhaïos. Il envoya des lettres dans tout le royaume suivant chaque province selon sa langue : tous sont donc d’accord de se préserver du pouvoir des femmes… tout en faisant exactement le contraire puisque cela prépare la voie à Esther ! Les chemins du Seigneur….

de sorte que les gens avaient peur dans leurs maisons : le peuple, lui, est loin d’être rassuré par cet édit encourageant les femmes à « entourer d’égards leur mari » : au contraire, c’est la peur qui s’installe jusque dans l'intimité des maisons, l'intimité des couples. Mais nous ne savons pas plus le contenu de ces lettres, nous supposons seulement qu’elles doivent faire peser sur les gens la menace d’un pouvoir fort. Elles anticipent aussi d’autres séries de lettres qui seront promulguées par le roi et répandront la peur.

Seigneur Dieu, toi qui aimes tous tes enfants et veut le bonheur de tous, guide ceux qui ont à prendre des décisions, fais qu’ils le fassent sans peur ni égoïsme afin que leurs décisions soient justes.


mercredi 28 septembre 2016

Un banquet pour ses amis

Esther (grec) 1
1 C’était au temps d’Artaxerxès. Cet Artaxerxès régna sur cent vingt-sept provinces depuis l’Inde. 2 A cette époque-là, lorsque le roi Artaxerxès vint prendre place sur son trône de la ville de Suse, 3 la troisième année de son règne, il organisa un banquet pour ses amis, pour toutes les autres nations, pour les nobles parmi les Perses et les Mèdes, et pour les superpréfets. 4 Puis, cent quatre-vingts jours durant, il leur montra la richesse de son royaume et la splendeur de ses riches plaisirs.
5 Après la période de noce, le roi organisa pendant six jours, pour les nations qui se trouvaient dans la ville, un festin dans la cour du palais royal. 6 La cour avait été décorée de lin et de mousseline tendus sur des cordelières de lin et d’écarlate, sur des chevilles d’or et d’argent, sur des colonnes de marbre et d’albâtre ; il y avait des divans d’or et d’argent sur un pavement d’émeraude, de nacre et de marbre ; puis des couvertures aux broderies chatoyantes, des roses parsemées à la ronde, 7 des coupes d’or et d’argent, une timbale garnie d’escarboucles évaluée à trente mille talents. Il y avait du bon vin à profusion, que le roi lui-même buvait.8 Ce festin fut sans restriction : ainsi l’avait voulu le roi et il avait ordonné aux maîtres d’hôtel d’agir selon son désir et celui de chacun.
9 Astîn, la reine, avait également organisé un festin pour les femmes dans le palais royal, là où était le roi Artaxerxès.
10 Le septième jour, le roi était gai ; il dit alors à Haman, Bazân, Tharra, Bôrazè, Zatholtha, Abataza et Tharaba – les sept eunuques au service du roi Artaxerxès – 11 de faire venir la reine devant lui pour la faire trôner, la ceindre du diadème et montrer aux ministres et aux nations sa beauté ; c’est qu’elle était belle ! 12 Mais la reine Astîn refusa de venir avec les eunuques. Alors, vexé, le roi se mit en colère. 13 Il dit à ses amis : « C’est ainsi qu’a répondu Astîn ? Eh bien ! Statuez et jugez sur ce cas. »

Viens Esprit Saint, permets que ces récits nous apportent ta lumière sur nos chemins, qu’elle illumine toutes nos rencontres.

C’était au temps d’Artaxerxès : après le chapitre A, rajoute de la traduction grecque, voici le vrai début dans l’hébreu : « c’était au temps », on lirait presque « il était une fois… », car le style même de ce premier verset atteste bien la portée romanesque du livre.

Cet Artaxerxès régna sur cent vingt-sept provinces depuis l’Inde : puisque les héros du livre vont vivre à la Cour et être proches du roi, il faut d’abord le présenter comme un très grand souverain… ce qu’il fut sans doute.

A cette époque-là, lorsque le roi Artaxerxès vint prendre place sur son trône de la ville de Suse, la troisième année de son règne, il organisa un banquet pour ses amis, pour toutes les autres nations, pour les nobles parmi les Perses et les Mèdes, et pour les superpréfets. Puis, cent quatre-vingts jours durant, il leur montra la richesse de son royaume et la splendeur de ses riches plaisirs : les banquets vont jouer un grand rôle dans le livre d’Esther, et en voici le premier. La racine du mot employé ici relève du « boire », et on verra aussi que la boisson – et son excès – reviendront à plusieurs reprises.

Après la période de noce, le roi organisa pendant six jours, pour les nations qui se trouvaient dans la ville, un festin dans la cour du palais royal : ouf ! On en remet ! Après 6 mois de festivités et d’étalages de ses richesses, voici le roi qui décrète à nouveau 6 jours de… festins… A noter que l’hébreu dit « la totalité des gens qui se trouvaient à Suse » tandis que le grec parle ici des nations : sa visée est plus universaliste et elles seules sont donc conviées à ce nouveau festin.

 La cour avait été décorée de lin et de mousseline tendus sur des cordelières de lin et d’écarlate, sur des chevilles d’or et d’argent, sur des colonnes de marbre et d’albâtre ; il y avait des divans d’or et d’argent sur un pavement d’émeraude, de nacre et de marbre ; puis des couvertures aux broderies chatoyantes, des roses parsemées à la ronde,  des coupes d’or et d’argent, une timbale garnie d’escarboucles évaluée à trente mille talents. : la description de  la magnificence du cadre nous emporte dans un décor digne des milles et une nuits ! Mais dessine aussi le lieu où Esther va évoluer bientôt…

Il y avait du bon vin à profusion, que le roi lui-même buvait. Ce festin fut sans restriction : ainsi l’avait voulu le roi et il avait ordonné aux maîtres d’hôtel d’agir selon son désir et celui de chacun : et oui, dans ces coupes d’or et d’argent était versé du vin à profusion et le roi lui-même buvait, petite précision n’allant donc pas de soi.

Astîn, la reine, avait également organisé un festin pour les femmes dans le palais royal, là où était le roi Artaxerxès : voilà encore un autre festin, réservé aux femmes celui-là et organisé par la reine elle-même, une reine d’ailleurs complètement ignorée de l’Histoire (tout comme Esther !).

Le septième jour, le roi était gai ; il dit alors à Haman, Bazân, Tharra, Bôrazè, Zatholtha, Abataza et Tharaba – les sept eunuques au service du roi Artaxerxès –  de faire venir la reine devant lui pour la faire trôner, la ceindre du diadème et montrer aux ministres et aux nations sa beauté ; c’est qu’elle était belle ! 7 jours (à la place de 6), 7 eunuques, tout reste dans le symbolique. La beauté d’Astin ne pourra que mettre en valeur celle d’Esther…

 Mais la reine Astîn refusa de venir avec les eunuques: pourquoi ? Mystère ! Un épisode au service de la suite, une sorte de « mise en valeur » de la future reine…

Alors, vexé, le roi se mit en colère. Il dit à ses amis : « C’est ainsi qu’a répondu Astîn ? Eh bien ! Statuez et jugez sur ce cas. » : ses amis ? un titre honorifique qui aurait mérité d’être traduit autrement… A noter que ce n’est pas le roi qui juge, mais qu’il s’en remet à ses conseillers pour statuer sur le sort de cette reine qu’il s’était choisie mais qui lui a résisté et l’a mis en colère.

Seigneur Jésus, toi le roi humble et bon, tu nous invites à ton banquet, tu y rassembles tous tes amis : donne-nous de répondre avec empressement à ton invitation et de partager ta table avec tous nos frères.


mardi 27 septembre 2016

Par écrit

Esther (grec) A
12 Puis Mardochée se tint au repos à la Cour en compagnie de Gabatha et de Tharra, les deux eunuques royaux qui gardaient la cour. 13 Il les entendit alors parler de leurs machinations et chercha à savoir de quoi ils s’occupaient : il apprit qu’ils s’apprêtaient à porter la main sur le roi Artaxerxès. Il les dénonça au roi. 14 Le roi interrogea les deux eunuques qui, après avoir avoué, furent arrêtés. 15 Le roi fit mettre ces faits par écrit pour qu’on en garde mémoire ; Mardochée aussi les mit par écrit. 16Puis le roi donna ordre à Mardochée de rester au service de la Cour, et il le gratifia de cadeaux pour ce qu’il venait d’accomplir.
17 Il y avait aussi Haman le Bougaïos, fils de Hamadathos, noble du roi. Pour l’affaire des deux eunuques royaux, celui-ci chercha à nuire à Mardochée et à son peuple.

Viens Esprit Saint, apprends-nous à relire notre histoire pour y retrouver les traces de Dieu en nos vies.

Puis Mardochée se tint au repos à la Cour en compagnie de Gabatha et de Tharra, les deux eunuques royaux qui gardaient la cour. Il les entendit alors parler de leurs machinations et chercha à savoir de quoi ils s’occupaient : il apprit qu’ils s’apprêtaient à porter la main sur le roi Artaxerxès : le cadre se dessine, l’intrigue se noue… l’auteur-romancier est à son affaire. Mais toute action humaine se déroule ainsi en un contexte précis, et, dans le cas présent, il s’agit d’un complot de Cour.

Il les dénonça au roi : notre héros, Mardochée, est bien l’homme sage que nous supposions : il est disponible, sa conscience est éclairée, il se laisse guider pour accueillir le plan de Dieu sans supputer sur les conséquences pour lui-même. C’est l’homme honnête par excellence.

Le roi interrogea les deux eunuques qui, après avoir avoué, furent arrêtés : en voilà deux qui, après avoir occupé un poste de confiance, se retrouvent dans les prisons du roi : « il renverse les puissants… ». Tout le livre d’Esther va être ponctué d’élévations et de d’abaissements. Les deux eunuques sont ainsi les premiers à subir la disgrâce.

Le roi fit mettre ces faits par écrit pour qu’on en garde mémoire ; Mardochée aussi les mit par écrit : que tout ce qui fut vécu puisse servir à maintenir la mémoire. On peut supposer que la relation des faits faite par le roi n’était pas de même inspiration que celle de Mardochée… Ce dernier va être le garant d’une lecture « providentielle » des événements.

Puis le roi donna ordre à Mardochée de rester au service de la Cour, et il le gratifia de cadeaux pour ce qu’il venait d’accomplir : et voici Mardochée, si pas « élevé », au moins confirmé dans sa place auprès du roi.

Il y avait aussi Haman le Bougaïos, fils de Hamadathos, noble du roi. Pour l’affaire des deux eunuques royaux, celui-ci chercha à nuire à Mardochée et à son peuple : mais voici qu’entre alors en scène un autre personnage, qui, de son côté, symbolise les forces obscures du mensonge au service de l’arrivisme. Haman, lui aussi présent à la cour du roi, veut se venger de Mardochée. « Et de son peuple » dit le grec, mais en fait nous n’en sommes pas encore vraiment là.


Seigneur Jésus, fais que les Ecritures nous rappellent sans cesse ta présence dans l’histoire des hommes, ta présence en chacun de nos jours. 

lundi 26 septembre 2016

Une eau abondante

Esther (grec) A
9b Or, de ce cri, sort, comme d’une petite source, un fleuve large, une eau abondante.10 Une lumière se lève en plus du soleil. Alors les humbles sont élevés et dévorent les nobles.
11 Une fois éveillé, Mardochée, qui avait vu ce songe et ce que Dieu avait décidé de faire, garda cela dans son cœur et, jusqu’à la nuit, il eut le désir de le comprendre par tous les moyens.

Viens Esprit Saint, permets que notre cri parvienne jusqu’à notre Dieu, donne-nous de croire qu’il peut faire jaillir une eau abondante.

Or, de ce cri, sort, comme d’une petite source, un fleuve large, une eau abondante : ce cri est une toute petite source, c’est un cri inspiré par l’angoisse, un cri de désespoir, on s’adresse à Dieu comme ultime recours… Ce n’est pas une belle prière de confiance, c’est juste un cri. Et cet appel suffit à Dieu pour ouvrir les vannes de sa générosité, pour en faire jaillir un grand fleuve aux eaux abondantes.

Une lumière se lève en plus du soleil : ce n’est pas tout ! De l’eau, oui, et même en abondance, mais aussi de la lumière, une lumière qui apparaît et qui surpasse même celle du soleil : pas la lumière quotidienne déjà accordée aux hommes, mais une lumière nouvelles que suscite aussi ce cri.

Alors les humbles sont élevés et dévorent les nobles : « il renverse les puissants et élève les humbles… », depuis longtemps les croyants ont compris le renversement qui s‘opère du point de vue de Dieu, c’est en ce bouleversement qu’ils placent leur espoir.

Une fois éveillé, Mardochée, qui avait vu ce songe et ce que Dieu avait décidé de faire, garda cela dans son cœur et, jusqu’à la nuit, il eut le désir de le comprendre par tous les moyens : Mardochée reçoit ce songe, il l’accueille, il le « grave dans son cœur ». Il cherche à le comprendre : la parole se doit d’être méditée pour porter fruits. En quoi ce songe le concerne-t-il ? En quoi doit-il influencer son action ? Mardochée cherche à comprendre, tout au long du jour, de son éveil jusqu’à la nuit.


Seigneur Dieu, tout ton désir est de nous combler de ton eau vive et de ta lumière. Donne-nous d’être parmi les humbles que tu veux relever. Que notre prière, telle une toute petite source, monte jusqu’à toi avec confiance.

dimanche 25 septembre 2016

On crie vers Dieu

Esther (grec) A
4 Mardochée eut ce songe : 
Voici clameurs et tumulte, grondements et séisme, bouleversement sur la terre.
5 Voici deux grands dragons, ils s’avancent, prêts tous deux à lutter. Ils poussent un grand cri ; 6 à leur cri, chaque nation s’apprête au combat, de façon à faire la guerre à une nation de justes. 
7 Voici jour de ténèbres et d’obscurité, détresse et anxiété, oppression et grand bouleversement sur la terre.
8 Elle est bouleversée, la nation juste tout entière, épouvantée de ses malheurs ; on s’apprête à être anéanti, 9 on crie vers Dieu.

Viens Esprit saint, fais que la parole nous accompagne au cœur de nos craintes, au cœur de nos épreuves.

Mardochée eut ce songe : c’est ce songe qui constitue le cœur de ce chapitre « A » carrément ajouté lors de la traduction de l’hébreu au grec dans la « septante ». Dans notre Bible, « Esther » est le seul livre qui se trouve ainsi deux fois : d’une part selon l’hébreu, d’autre part selon le grec. Cette dernière version nous montre l’action de Dieu dans l’histoire de l’homme, alors que l’hébreu ne parle jamais de Dieu, tout s’y jouant par l’audace et l’astuce.

Voici clameurs et tumulte, grondements et séisme, bouleversement sur la terre : de telles descriptions sont abondantes de la Genèse à l’Apocalypse… Un songe y est toujours vu comme une forme de manifestation de Dieu.
 
Voici deux grands dragons, ils s’avancent, prêts tous deux à lutter. Ils poussent un grand cri ; à leur cri, chaque nation s’apprête au combat, de façon à faire la guerre à une nation de justes 
: si les combats entre bêtes fabuleuses sont fréquents dans les songes (cfr Daniel par exemple) il n’y a qu’ici que deux dragons (symbolisant le bien et le mal) entrent en jeu et, qui plus est, pour se combattre l’un l’autre : ainsi s’annonce la guerre entre la nation de justes et l’ensemble des peuples ennemis d’Israël.

Voici jour de ténèbres et d’obscurité, détresse et anxiété, oppression et grand bouleversement sur la terre : le ton est nettement apocalyptique, créant l’angoisse.

Elle est bouleversée, la nation juste tout entière, épouvantée de ses malheurs ; on s’apprête à être anéanti : ainsi la nation juste a conscience des menaces qui s’approchent, le peuple est petit, faible. Le texte hébreu s’en tient là avec une visée nettement nationaliste.

on crie vers Dieu : mais le grec, par ses ajoutes, lui donne une dimension religieuse très marquée : dans le malheur, dans le désespoir même, la réaction est celle du croyant qui crie vers son Dieu. Tout le peuple crie vers Dieu. Tout en gardant cette belle dimension collective, la version que nous avons choisi de lire va nous montrer comment Dieu intervient dans l’histoire des siens.

Entends, Seigneur Dieu, le cri qui monte vers toi, le cri de tous les hommes en détresse.

samedi 24 septembre 2016

Ceux qui avaient été déportés

Esther (grec) A
1 La deuxième année du règne d’Artaxerxès le Grand, le premier jour de Nisan, Mardochée eut un songe. Descendant de Jaïros, de Séméias, de Kisaïas, issu de la tribu de Benjamin, 2Mardochée était un Juif résidant à Suse ; c’était un personnage important qui servait à la Cour du Roi. 3Or il faisait partie de ceux que Nabuchodonosor, roi de Babylone, avait déportés de Jérusalem avec Jékhonias, le roi de Judée.

Viens Esprit Saint, viens ouvrir pour nous le livre que nous entamons aujourd’hui, permets que nous y trouvions de quoi suivre notre propre chemin

La deuxième année du règne d’Artaxerxès le Grand, le premier jour de Nisan, Mardochée eut un songe : nous ouvrons aujourd’hui un nouveau livre : celui d’Ester. Mais ce n’est pas l’héroïne qui nous est d’abord présentée, mais bien son cousin Mardochée. Il est en effet le deuxième personnage en importance. De par sa personnalité, sa foi, son influence, il apparaît même comme plus emblématique qu’Esther. Un peu comme Booz par rapport à Ruth, c’est lui qui va diriger l’action en faisant preuve de sagesse.

Descendant de Jaïros, de Séméias, de Kisaïas, issu de la tribu de Benjamin, Mardochée était un Juif résidant à Suse : Mardochée est considéré par l’auteur comme assez important pour être longuement présenté en fonction de son ascendance. Nous apprenons aussi que nous sommes en présence d’un récit de confrontation entre la foi juive et le monde païen, cela en raison de la déportation à Babylone.

c’était un personnage important qui servait à la Cour du Roi. Or il faisait partie de ceux que Nabuchodonosor, roi de Babylone, avait déportés de Jérusalem avec Jékhonias, le roi de Judée : voilà qui ne colle pas avec la réalité historique puisque Mardochée, ayant été déporté en 597 serait alors depuis 114 ans en exil… mais nous avons déjà rencontré bien des fois (dans le livre de Tobit par exemple) ce genre d’anachronisme dont on se souciait bien peu. Ce qui importe à notre auteur, c’est de donner une vraisemblance à son récit, lui qui écrit sans doute 3 siècles après Artaxerxès. Cependant il semble mieux connaître la Mésopotamie que la Palestine dont il ne parle pas.


Seigneur Dieu, permets que notre foi en toi reste vive, quels que soient les lieux et les circonstances de notre vie. Que cette fidélité soit notre assurance  au milieu des aléas de notre chemin.

jeudi 22 septembre 2016

Je l'ai sous mes yeux

(Chœur) 8 Nous avons une petite sœur qui n’a pas encore de seins. Que ferons-nous pour notre sœur le jour où l’on parlera d’elle ?
9 Sera-t-elle un rempart ? Nous lui bâtirons un créneau d’argent. Sera-t-elle une porte ? Nous la munirons d’une barre de cèdre.
(Elle) 10 – « Je suis un rempart, mes seins sont des tours ! Et je suis devenue à ses yeux celle qui a trouvé la paix. »
(Lui) 11 Salomon avait une vigne à Baal-Hamone : il remit la vigne à des gardiens. Chacun devait payer pour son fruit mille pièces d’argent.
12 Ma vigne, à moi, je l’ai sous mes yeux. À toi, Salomon, les mille pièces, et deux cents aux gardiens de son fruit.
13 Toi, l’habitante des jardins, des compagnons guettent ta voix. Fais-moi entendre ta voix…
(Elle) 14 Fuis, mon bien-aimé, pareil à la gazelle, au faon de la biche, sur des montagnes embaumées…

Viens Esprit Saint, permets que les mots du Cantique continuent à résonner en nos cœurs comme la voix de notre Dieu qui  nous murmure son amour.


(Chœur) Nous avons une petite sœur qui n’a pas encore de seins. Que ferons-nous pour notre sœur le jour où l’on parlera d’elle ? : qui est le chœur ici ? Le texte de le dit pas : les frères aînés, dit la TOB ; pourquoi pas les sœurs aînées, vu que dans le Cantique l’élément féminin est prépondérant (la mère est citée 7 fois et le père jamais) ?

Sera-t-elle un rempart ? Nous lui bâtirons un créneau d’argent. Sera-t-elle une porte ? Nous la munirons d’une barre de cèdre : en tous cas, ils (ou elles) se sentent mission de la protéger.

(Elle) Je suis un rempart, mes seins sont des tours ! Et je suis devenue à ses yeux celle qui a trouvé la paix : mais elle – avec son bien-aimé – se sont forte et à l’abri, se comparant elle-même à des fortifications et reprenant l’image des tours. Et à l’abri de ses murs, elle, la Sulamite, affirme vivre dans la paix.

(Lui) Salomon avait une vigne à Baal-Hamone : il remit la vigne à des gardiens. Chacun devait payer pour son fruit mille pièces d’argent : il enchaîne en parlant de Salomon (dont la racine « paix » est la même) et de son immense vigne – de son harem bien peuplé ! – trop grande pour qu’il puisse s’en occuper lui-même : il l’a confie à des gardiens et en retire ainsi profit !

Ma vigne, à moi, je l’ai sous mes yeux. À toi, Salomon, les mille pièces, et deux cents aux gardiens de son fruit : combien il préfère son Unique, sa vigne à lui, qu’il peut admirer tout à loisir (Tu es belle…). Le ton quelque peu railleur avec lequel il s’adresse à Salomon fait sourire et émeut tout à la fois tant c’est un beau témoignage d’amour.

Toi, l’habitante des jardins, des compagnons guettent ta voix. Fais-moi entendre ta voix… : car tout de suite il se détourne du grand Salomon pour s’adresser à sa bien-aimée en son jardin, il lui renouvelle sa demande « fais-moi entendre ta voix » pour son bon plaisir.

(Elle) Fuis, mon bien-aimé, pareil à la gazelle, au faon de la biche, sur des montagnes embaumées… : non, elle ne le renvoie pas ! Elle a hâte elle aussi de laisser tous les compagnons, alors elle l’encourage à fuir leur présence. Mais la comparaison avec la gazelle et le faon (symboles de l’amour) ainsi que la destination (la montagne aux parfums, et ici le plus précieux, le baume) ne laissent aucun doute sur son intention : retrouver l’intimité avec lui dans le plus intense des bonheurs. L’entente profonde et la liberté vécue par chacun des deux peut ainsi aboutir à cette béatitude.


Seigneur Dieu, tout notre désir est de demeurer avec toi, sous ton regard plein d’amour et de tendresse, d’entendre ta voix nous redire combien chacun est précieux pour toi. Garde-nous tous « sous tes yeux », comblés de joie par ta présence.

mercredi 21 septembre 2016

Comme un sceau

Ct 8
(Chœur) 5 Qui donc est celle-ci qui monte du désert appuyée sur son bien-aimé ?
(Lui)  Sous le pommier, je t’éveille, là où ta mère t’a enfantée ; là, elle t’a enfantée et mise au monde.
(Elle) 6 Pose-moi comme un sceau sur ton cœur, comme un sceau sur ton bras.
Car l’amour est fort comme la Mort, la passion, implacable comme l’Abîme : ses flammes sont des flammes de feu, fournaise divine.
7 Les grandes eaux ne pourront éteindre l’amour, ni les fleuves l’emporter. Un homme donnerait-il toutes les richesses de sa maison pour acheter l’amour, il ne recueillerait que mépris.

Viens Esprit Saint, viens Esprit d’Amour, viens nous révéler ta force et ta fidélité.

(Chœur) Qui donc est celle-ci qui monte du désert appuyée sur son bien-aimé ? « qui est-ce qui monte du désert ? » le chœur pose cette question pour la troisième fois : cela concernait d’abord le bien-aimé, puis son amie, et maintenant les voilà réunis dans la question. Les jeunes filles, témoins, marquent ainsi la progression de leur union, son approfondissement.

 (Lui)  Sous le pommier, je t’éveille, là où ta mère t’a enfantée ; là, elle t’a enfantée et mise au monde : « je t’éveille » : le mot même de la résurrection !

(Elle) Pose-moi comme un sceau sur ton cœur, comme un sceau sur ton bras : elle veut être elle-même le sceau, le sceau posé sur son cœur (c’est la première fois qu’elle parle du cœur de son bien-aimé), lieu de la tendresse, un sceau posé sur son bras, lieu de la force, un sceau qui exprime toute la permanence, la promesse de l’Alliance déjà réalisée.

Car l’amour est fort comme la Mort, la passion, implacable comme l’Abîme :
ses flammes sont des flammes de feu, fournaise divine : tant de lecteurs du Cantique – nous peut-être – ont vu dans le Bien-aimé l’image de Dieu. Et pourtant, voici dans ce vers l’unique référence au nom de Dieu, une toute petite syllabe : Yah. Et les traductions peinent à rendre présente cette allusion (divin, sacré...). Pourtant ce petit mot, forme abrégée de Yahvé, que nous redisons d’ailleurs en chantant l’Alleluia (louez Yah), n’est-il pas la clé du Cantique qui peut éclairer en retour tout le poème ?

Les grandes eaux ne pourront éteindre l’amour, ni les fleuves l’emporter : l’eau de nouveau, mais non plus comme source d’eau vive ou fontaine de jardin, mais sous forme menaçante : « les grandes eaux », celles qui recouvrent tout, celles qui détruisent. Non, affirme-t-elle, même cela, rien donc, ne peut éteindre la flamme de l’amour. Ainsi s’achève le Cantique des cantiques

Un homme donnerait-il toutes les richesses de sa maison pour acheter l’amour, il ne recueillerait que mépris : petite sentence proverbiale qui vient ici se glisser de manière un peu inattendue ; on semble avoir changé de registre, avoir quitté l’évocation poétique. Les bien-aimés du Cantique ne font pas ce genre de réflexion, jamais ils n’analysent ou moralisent. Nous sommes certainement en présence d’un ajout.


Seigneur Dieu, ton amour est un feu que nulle puissance au monde ne peut éteindre. Qu’il brûle sans fin en nos cœurs !

mardi 20 septembre 2016

Sa droite m’étreint

Ct 8
1 Que n’es-tu pour moi un frère, nourri aux seins de ma mère ? Je te rencontrerais au dehors et je t’embrasserais sans paraître méprisable !
2 Je t’emmènerai, je t’introduirai dans la maison de ma mère : tu m’enseigneras… Je t’abreuverai de vin parfumé, de ma liqueur de grenade.
3 Sa main gauche est sous ma tête, et sa droite m’étreint. LUI
4 Je vous en conjure, filles de Jérusalem, n’éveillez pas, ne réveillez pas l’Amour, avant son bon plaisir.

Viens Esprit Saint, viens nous rendre attentif à ton enseignement, viens nous faire goûter notre bonheur, viens mettre sur nos lèvres les mots de l’émerveillement.

Que n’es-tu pour moi un frère, nourri aux seins de ma mère ? Je te rencontrerais au dehors et je t’embrasserais sans paraître méprisable ! On peut s’en tenir aux contraintes sociales, mais elle ne semblait jusqu’à présent guère soucieuse du « qu’en dira-t-on » ! A 5 reprises (ch. 4 et 5), lui l’a déjà appelée sa « sœur » mais elle n’a jamais osé ce nom. Leur union étant parvenue à ce point, presque à la fin du Cantique, elle ose exprimer ce désir que son Epoux soit en même temps un frère, quelqu’un qui partage totalement sa condition, enfants d’une même mère, enfant d’un même père : « Va trouver mes frères » dira Jésus ressuscité.

Je t’emmènerai, je t’introduirai dans la maison de ma mère : tu m’enseigneras… Je t’abreuverai de vin parfumé, de ma liqueur de grenade : elle avait déjà exprimé ce souhait et le redit avec plus de certitude. C’est elle cette fois qui prend l’initiative, qui l’emmène dans la maison de sa mère, au sein d’Israël, au sein de l’Eglise, au sein de l’humanité… mais c’est lui qui est la Parole, c’est lui qui enseigne.

Sa main gauche est sous ma tête, et sa droite m’étreint : enlacée d’une infinie tendresse, elle murmure sa béatitude, elle répète inlassablement son émerveillement.

Je vous en conjure, filles de Jérusalem, n’éveillez pas, ne réveillez pas l’Amour, avant son bon plaisir : pour la 3e fois, elle conjure les jeunes filles de ne pas forcer le réveil du bien-aimé, mais, cette fois, plus besoin de biches ou de gazelles. Leur repos est celui d’une parfaite quiétude qu’elle leur supplie de respecter.

Seigneur Jésus, en toi nos cœurs reposent, toi qui t’es fait aussi proche qu’un frère. Enseigne-moi tes sentiers, toi qui es venu nous révéler le cœur de Dieu.

dimanche 18 septembre 2016

Vers moi monte son désir

Ct 7
11 Je suis à mon bien-aimé : vers moi, monte son désir.
12 Viens, mon bien-aimé… Nous sortirons dans les champs, nous passerons la nuit dans la campagne.
13 Au matin, nous irons dans les vignes, nous verrons si les pampres fleurissent, si le bourgeon s’est ouvert, si les grenadiers sont en fleurs. Là, je t’offrirai mes amours…
14 Les mandragores ont exhalé leur parfum… Et à nos portes, toutes les délices, les nouvelles comme les anciennes. Mon bien-aimé, je les ai gardées pour toi.

Viens Esprit Saint, viens nous faire entendre le désir de notre Dieu qui se porte vers chacun d’entre nous.

Je suis à mon bien-aimé : vers moi, monte son désir : troisième déclaration « je suis à mon bien-aimé » avec chaque fois une nuance apportée ; cette fois elle ne dit plus « il est à moi », il n’y a plus de possession, mais la force d’un désir ; avec étonnement, émerveillement, elle comprend qu’elle est désirée, tout comme elle désire (2,3). L’amour est réciprocité de désir.

Viens, mon bien-aimé… Nous sortirons dans les champs, nous passerons la nuit dans la campagne : comment répondre à ce désir, comment être avec lui dans cette communion qu’il demande ? C’est elle maintenant qui, pour la première fois, dit « Viens ! » Aujourd’hui elle presse elle-même son époux de partir, de passer la nuit avec elle en attendant le renaissance du jour.

Au matin, nous irons dans les vignes, nous verrons si les pampres fleurissent, si le bourgeon s’est ouvert, si les grenadiers sont en fleurs : il avait dit (6,11) descendre en son jardin voir les signes de la vie, et elle lui répond en reprenant les mêmes mots, mais cette fois pour qu’ils y aillent ensemble.

Là, je t’offrirai mes amours… : alors elle pourra faire le don total d’elle-même.

Les mandragores ont exhalé leur parfum… Et à nos portes, toutes les délices, les nouvelles comme les anciennes. Mon bien-aimé, je les ai gardées pour toi : Oui, ils peuvent vérifier, tout est en fleurs. Les fruits même sont déjà là, et les anciens comme les nouveaux, tous les délices de notre vie passés ou à venir, tous ils forment une merveilleuse corbeille. Tous ces fruits ne trouvent leur raison d’être qu’offerts. C’est pourquoi, elle les a réservés, consacrés entièrement à son bien-aimé. Ainsi pourra-t-elle répondre à son désir.


Seigneur Jésus, dans ton amour infini tu désires chacun d’entre nous, permets-nous de répondre à ton attente, de nous tourner vers toi en te présentant les fruits de notre quotidien dont tu assures la croissance.

samedi 17 septembre 2016

Reviens !

Ct 7
(Choeur) 1 Reviens, reviens, ô Sulamite ! Reviens, reviens : que nous t’admirions !
Qu’admirez-vous de la Sulamite tandis qu’elle danse comme en un double chœur ?
2 Comme ils sont beaux, tes pieds, dans tes sandales, fille de prince ! Les courbes de tes hanches dessinent des colliers, œuvre de mains artistes.
3 Ton nombril : une coupe ronde où le vin ne tarit pas. Ton ventre : un monceau de blé dans un enclos de lis.
4 Tes deux seins : deux faons, jumeaux d’une gazelle.
5 Ton cou : une tour d’ivoire. Tes yeux : les vasques de Heshbone à la porte de Bath-Rabbim, et ton nez, comme la Tour du Liban, sentinelle tournée vers Damas.
6 Ta tête se dresse comme le Carmel. Sa parure est de pourpre ; un roi s’est pris dans ces tresses. (Lui) 7 Ah ! Que tu es belle ! Que tu es douce, amour, en tes caresses !
8 Tu es élancée comme le palmier, tes seins en sont les grappes.
9 J’ai dit : je monterai au palmier, j’en saisirai les fruits. Tes seins, qu’ils soient comme des grappes de raisins, ton haleine, comme une odeur de pomme,
10 ta bouche, un vin exquis…
(Elle) Il s’écoule vers mon bien-aimé, abreuvant des lèvres endormies.

Viens Esprit Saint, donne-nous les mots du dialogue avec notre Dieu, la reconnaissance que tout vient de lui et retourne à lui.

(Choeur) Reviens, reviens, ô Sulamite ! Reviens, reviens : que nous t’admirions !  Dans son élan, elle a été en quelque sorte emportée, et voici que le chœur la rappelle en lui donnant un nom magnifique : la Sulamite (de la racine « paix »). Après la vingtaine de noms qu’elle a reçus dans le Cantique, et qui visaient essentiellement sa beauté, la voilà figure de paix, porteuse de paix.
Ce « reviens » proclamé quatre fois, peut résonner comme l’appel au retour à Dieu, à la perpétuelle « conversion » qu’il nous faut accomplir.

Qu’admirez-vous de la Sulamite tandis qu’elle danse comme en un double chœur ? : deux camps, deux chœurs, une contredanse... etc ! Multitude des traductions qui hésitent dans l’interprétation… On peut en tous cas y voir une danse qui réunit dans un même mouvement, thème de l’union dans le mouvement même…

Comme ils sont beaux, tes pieds, dans tes sandales, fille de prince ! : …et ce mouvement de tout le corps suscite l’admiration du chœur qui va la décrire dans toute sa grâce, en partant cette fois depuis les pieds qui portent le rythme…

Ta tête se dresse comme le Carmel. Sa parure est de pourpre ; un roi s’est pris dans ces tresses : oui, le roi se laisse prendre dans ses tresses ! (ses boucles, ses flots), oui, son amour va jusque là ! Thérèse d'Avila disait : « cette toute divine prison de l’amour avec qui je vis a fait de Dieu mon captif. »

(Lui) Ah ! Que tu es belle ! Que tu es douce, amour, en tes caresses ! (…) Ta bouche, un vin exquis… : et le roi est alors toute allégresse,

(Elle) Il s’écoule vers mon bien-aimé, abreuvant des lèvres endormies : les mots passent de l’un à l’autre, ce qu’ils donnent et reçoivent ne fait plus qu’un, le cœur à cœur se poursuit jusque dans le sommeil.


Seigneur Jésus, fais que nous entendions ton appel et que nous y répondions avec empressement : fais-nous revenir à toi ! Fais-nous entrer dans l’éternelle danse de ton amour !

mercredi 14 septembre 2016

Mon époux

Ct 5
8 Je vous en conjure, filles de Jérusalem, si vous trouvez mon bien-aimé, que lui direz-vous ? Que je suis blessée d’amour.
(Chœur) 9 Qu’a-t-il, ton bien-aimé, de plus qu’un autre, ô belle entre les femmes ? Qu’a-t-il, ton bien-aimé, de plus qu’un autre que tu nous adjures ainsi ?
(Elle) 10 Mon bien-aimé est clair et vermeil : on le distingue entre dix mille ! 11 Sa tête est d’or, d’un or pur. Ses boucles, d’un noir de corbeau, ondulent. 12 Ses yeux sont comme des colombes au bord d’un ruisseau qui baignent dans le lait et reposent, tranquilles. 13 Ses joues : un parterre d’arômes, des corbeilles de senteurs. Ses lèvres, des lis, un ruissellement de myrrhe. 14 Ses bras, des torsades d’or serties de topazes. Son ventre : un bloc d’ivoire, couvert de saphirs. 15 Ses jambes : des colonnes de marbre posées sur des socles d’or pur. Son aspect est celui du Liban : comme le cèdre, sans rival ! 16 Sa bouche est pur délice, tout, en lui, est désirable. Tel est mon bien-aimé ; tel est mon époux, filles de Jérusalem.

Viens Esprit Saint, mets sur nos lèvres le chant à la louange de notre Dieu.

Je vous en conjure, filles de Jérusalem, si vous trouvez mon bien-aimé, que lui direz-vous ? nouvelle interpellation des « filles de Jérusalem ». Jusqu’à présent, elle leur demandait plutôt de ne pas intervenir (« ne réveillez pas »). Cette fois elle veut leur laisser un message pour son bien-aimé. Mais les mots d’amour ne peuvent se transmettre par d’autres ! Elle s’interroge donc : « Que lui direz-vous ?»

Que je suis blessée d’amour : qu’elles témoignent seulement de sa blessure d’amour. Elle le leur avait déjà exprimé (2,5) mais cette fois elles en sont messagères : peut-être ainsi reviendra-t-il auprès d’elle ?

(Chœur) Qu’a-t-il, ton bien-aimé, de plus qu’un autre, ô belle entre les femmes ? Qu’a-t-il, ton bien-aimé, de plus qu’un autre que tu nous adjures ainsi ? : la réponse fuse sous forme d’une question, logique mais aussi sûrement ironique. Il ne leur est guère possible d’imaginer qu’un être puisse compter autant, qu’il puisse rendre « malade d’amour ».

(Elle) Mon bien-aimé est clair et vermeil : on le distingue entre dix mille ! : elle va donc leur répondre avec un plaisir non dissimulé. Elle va détailler chacun de ses traits pour montrer qu’il est supérieur à « dix-mille » c’est-à-dire à tous, même aux dieux cananéens et leurs statues d’or ! Elle veut surtout démontrer ainsi qu’il est unique, qu’il est « l’Unique ».

Tel est mon bien-aimé ; tel est mon époux, filles de Jérusalem : note de victoire et de défi qui conclut ce chant répondant à la question du chœur. Et finalement tout tient en ce mot : c’est son époux. Alors que le nom de « bien-aimé » est présent tout au long du Cantique, c’est la seule fois où elle l’appelle son époux. Cela nous rappelle le beau texte du prophète Osée (2,18) : en ce jour-là tu m’appelleras : « mon époux »
  

Seigneur Jésus, je veux te contempler longuement et reconnaître combien tu es « l’Unique ». Permets-nous de répondre à l’Alliance que tu nous offres en nous donnant à toi avec joie et gratitude.

mardi 13 septembre 2016

Il n'a pas répondu

Ct 5
6 J’ai ouvert à mon bien-aimé : mon bien-aimé s’était détourné, il avait disparu. Hors de moi, je sors à sa suite…  Je l’ai cherché : je ne l’ai pas trouvé. Je l’appelai : il n’a pas répondu.
7 Ils m’ont trouvée, les gardes, eux qui tournent dans la ville : ils m’ont frappée, ils m’ont blessée, ils ont arraché mon manteau, les gardes des remparts !

Viens Esprit Saint, donne-nous de mettre en pratique sans délai la parole qui nous est confiée aujourd’hui.

J’ai ouvert à mon bien-aimé : elle ouvre, mais au moment qui lui convient, après quelques atermoiements… Or quand le bien-aimé appelle, c’est « sans délai » qu’il faut lui répondre.

mon bien-aimé s’était détourné, il avait disparu : il s’est tenu humblement à sa porte, patiemment il a supplié, mais la porte est demeurée fermée. Alors, lui, il est passé, il s’en est allé. Silencieusement. Pas une critique, pas une plainte. A travers tout le Cantique le bien-aimé ne fera jamais un reproche à son amie. Pas plus que Jésus ne fera de reproche à celles et ceux qu’il remet debouts.

Hors de moi, je sors à sa suite…  : elle se met à courir, elle espère le rattraper, mais ce n’est pas ainsi qu’elle peut le rejoindre.

Je l’ai cherché : je ne l’ai pas trouvé. Je l’appelai : il n’a pas répondu : absence et silence pour recreuser le désir en elle, pour qu’elle s’ouvre enfin à son amour, pour qu’elle devienne capable de l’accueillir. Nous sommes de nouveau dans le « chercher-trouver » du 2e poème.

Ils m’ont trouvée, les gardes, eux qui tournent dans la ville : ils m’ont frappée, ils m’ont blessée, ils ont arraché mon manteau, les gardes des remparts ! : sur son chemin, elle se heurte à d’autres difficultés, à ces gardes qui, loin de l’ignorer comme la première fois, lui font du mal, ils la blessent, ils lui enlèvent son vêtement (voile ? manteau ?), à elle qui ne voulait même pas remettre sa tunique…

Seigneur Jésus, donne-nous de te chercher avec patience et passion : alors c’est toi qui viens à notre rencontre, c’est toi qui appelles pour que nous t’invitions. Béni sois-tu !


lundi 12 septembre 2016

J'ai ôté ma tunique

Ct 5
(Elle) 2 Je dors, mais mon cœur veille… C’est la voix de mon bien-aimé ! Il frappe !
(Lui)  Ouvre-moi, ma sœur, mon amie, ma colombe, ma parfaite, car ma tête est humide de rosée et mes boucles, des gouttes de la nuit.
(Elle) 3  J’ai ôté ma tunique : devrais-je la remettre ? J’ai lavé mes pieds : devrais-je les salir ?
4 Mon bien-aimé a passé la main par la fente de la porte ; mes entrailles ont frémi : c’était lui !
5 Je me suis levée pour ouvrir à mon bien-aimé, les mains ruisselantes de myrrhe. Mes doigts répandaient cette myrrhe sur la barre du verrou.

Viens Esprit Saint, donne-nous des oreilles pour entendre ton appel, donne-nous la promptitude pour y répondre tant qu’il est encore temps.

(Elle) Je dors, mais mon cœur veille… : ce nouveau poème, le quatrième, débute sur le passage le plus étonnant et le plus interpelant du Cantique. Nous la retrouvons chez elle, seule, et endormie. Que l’amour humain ait des hauts et des bas, nous ne le savons que trop. Mais le contraste est violent avec la fin du poème précédent où le chant avait atteint un sommet : la bien-aimée s’était donnée totalement, le bien-aimé était venu en son jardin, et avait invité le monde entier au banquet de ses noces. Une vraie fin de roman ! Elle n’est donc pas (encore) unifiée dans l’amour. « Son meilleur vin est (encore) coupé d’eau » comme disait Esaïe (1,22). Comme les apôtres lors de la transfiguration, elle est prise par le sommeil, et, comme eux, elle veut veiller… Ainsi son cœur est partagé, n’est pas encore vraiment attentif.

C’est la voix de mon bien-aimé ! Il frappe ! : cette fois, elle ne l’entend pas bondir de loin, mais perçoit un simple coup contre sa porte. Il a de nouveau surgi aussi discrètement que soudainement. C’est de nouveau sa voix qui l’émeut. Mais aussi ce coup si proche contre sa porte : « Voici, je me tiens à la porte et je frappe. Si quelqu’un entend ma voix et qu’il ouvre… (Ap 3,20)

(Lui)  Ouvre-moi : c’est toujours la première demande, la première condition.

ma sœur, mon amie, ma colombe, ma parfaite : il lui chante les plus belles louanges, il ajoute le possessif plein de tendresse, il va jusqu’à la voir « parfaite »…

car ma tête est humide de rosée et mes boucles, des gouttes de la nuit : cela ne suffit pas ! Elle ne bouge pas ! Alors il se plaint, il cherche à l’attendrir, il fait appel à sa compassion, il s’abaisse comme pour se mettre à sa hauteur, il supplie…

(Elle) J’ai ôté ma tunique : devrais-je la remettre ? J’ai lavé mes pieds : devrais-je les salir ? : réponse totalement inattendue et si décevante ! Plus les motifs invoqués sont futiles et ridicules, mieux ils traduisent toute notre difficulté à aimer qui se heurte sans cesse aux choses les plus banales. Demeurée inerte à son appel, elle ne va pas chercher très loin des excuses si vaines.

Mon bien-aimé a passé la main par la fente de la porte ; mes entrailles ont frémi : c’était lui ! : il ne répond pas… sa voix se tait, mais il cherche encore à l’émouvoir et y réussit, l’émotion la prend…

Je me suis levée pour ouvrir à mon bien-aimé, les mains ruisselantes de myrrhe. Mes doigts répandaient cette myrrhe sur la barre du verrou : le parfum est témoignage de présence, mais il devient maintenant, sur la poignée, le signe cruel de son absence. Il ne reste plus que la myrrhe…


Seigneur Jésus, tu es celui qui frappe à notre porte et qui implore son ouverture avec respect et discrétion. Tu nous invites à ta table mais tu veux aussi venir prendre place à la nôtre, prendre le repas avec nous. Puissions-nous bondir pour t’ouvrir car tel est bien notre désir le plus profond.

dimanche 11 septembre 2016

Mangez ! Buvez !

Ct 5
(Lui) 1 J’entre dans mon jardin, ma sœur fiancée : je recueille ma myrrhe et mon baume, je mange mon miel et mon rayon, je bois mon vin et mon lait.
Mangez, amis ! Buvez, bien-aimés, enivrez-vous !

Viens Esprit Saint, viens répandre tes dons au cœur de tous.

(Lui)  J’entre dans mon jardin, ma sœur fiancée : elle a dit « qu’il entre ! » et il répond « j’entre ! ». Il ne peut résister à son invitation, il s’empresse auprès d’elle.

je recueille ma myrrhe et mon baume, je mange mon miel et mon rayon, je bois mon vin et mon lait : parfums, fruits, elle a voulu tout lui donner et il l’accueille avec son offrande ; il récolte, il mange, il boit, et les redoublements solennels signifient combien la bien-aimée comble tout son désir : elle est toute suavité, toute ivresse. Ils sont à deux au banquet de l’amour.

Mangez, amis ! Buvez, bien-aimés, enivrez-vous ! : et pourtant très vite il agrandit la table… Cette invitation vient de loin dans l’Ecriture et la parcourt tout entière : « Venez, disait par exemple Esaïe (55,2), buvez du vin et du lait ! » La fête à laquelle elle le conviait devient la fête de tous, il y invite tous ses amis, qu’ils mangent, qu’ils boivent, jusqu’à l’ivresse. Même le doux nom de bien-aimé devient un pluriel pour inclure tout homme au festin de noce. « Il en va du royaume des cieux comme d’un roi qui fit un festin de noce pour son fils… » (Mt 22,2) ou encore « Heureux les invités au banquet des noces » (Ap 19,9)

Sur cette scène de joie et de rassemblement se termine le troisième poème.


Seigneur Jésus, tu nous invites à ton banquet : donne-nous de répondre promptement et avec grande joie à cette faveur immense que tu nous fais. Béni sois-tu de nous rassembler ainsi autour de toi, en ta présence.

vendredi 9 septembre 2016

Qu'il entre !

Ct 4
(Elle) 15 Je suis une fontaine des jardins, un puits d’eaux vives qui ruissellent du Liban !

16 Éveille-toi, Vent du nord ! Viens, Vent du sud ! Souffle sur mon jardin et ses arômes s’exhaleront ! Qu’il entre dans son jardin, mon bien-aimé, qu’il en mange les fruits délicieux.

Viens Esprit Saint, toi l’eau vive, toi le souffle, viens nous faire porter tes fruits.

(Elle) Je suis une fontaine des jardins, un puits d’eaux vives qui ruissellent du Liban : elle rebondit, elle reprend l’image : fontaine, source, puits d’eau vive sont synonymes pour désigner le jaillissement de l’eau vive. Jardin et source sont toujours associés dans la Bible car c’est la source qui fait la beauté du jardin.

Éveille-toi, Vent du nord ! Viens, Vent du sud ! Souffle sur mon jardin et ses arômes s’exhaleront ! : vent glacé, vent brûlant, peu lui importe, elle les convoque pour pouvoir offrir au Bien-aimé tous les parfums qu’il attend d’elle.

Qu’il entre dans son jardin, mon bien-aimé, qu’il en mange les fruits délicieux : « mon jardin », « son jardin », c’est tout un : plus elle est à lui, plus elle est elle-même. Elle s’est nourrie des pommes du pommier (son fruit est doux à mon palais) voilà que maintenant elle-même fructifie. Il faut qu’il entre en son jardin, qu’il y descende à l’instant même, qu’il en cueille les fruits délicieux – les fruits de son choix » dit la TOB. Elle a hâte de les lui offrir.


Seigneur Jésus, comme la bien-aimée qui veut offrir en abondance ce qu’elle a de plus précieux, donne-nous d’accueillir tous tes dons et de les faire fructifier selon ton attente. Nous pourrons alors te les présenter en offrande précieuse.

jeudi 8 septembre 2016

Avec moi

Ct 4
8 Avec moi, du Liban, ô fiancée, avec moi, du Liban, tu viendras. Tu regarderas du haut de l’Amana, des hauteurs du Sanir et de l’Hermon, depuis les repaires des lions, depuis les montagnes des léopards.
9 Tu as blessé mon cœur, ma sœur fiancée. Tu as blessé mon cœur, d’un seul de tes regards, d’un seul anneau de ton collier.
10 Qu’elles sont belles, tes amours, ma sœur fiancée ! Qu’elles sont bonnes, tes amours : meilleures que le vin ! L’odeur de tes parfums, une exquise senteur !
11 Un miel pur coule de tes lèvres, ô fiancée, le miel et le lait, sous ta langue ; l’odeur de tes vêtements est comme l’odeur du Liban.
12 Jardin fermé, ma sœur fiancée, fontaine close, source scellée.
13 Tes formes élancées : un paradis de grenades aux fruits délicieux, le nard et le cypre, 14 le nard et le safran, cannelle, cinnamome, et tous les arbres à encens, la myrrhe et l’aloès, tous les plus fins arômes.

Viens Esprit Saint, fais-nous entendre le chant du bien-aimé qui nous attire à lui.
  
Avec moi, du Liban, ô fiancée, avec moi, du Liban, tu viendras. Tu regarderas du haut de l’Amana, des hauteurs du Sanir et de l’Hermon, depuis les repaires des lions, depuis les montagnes des léopards : le Liban est synonyme de beauté mais aussi de terre étrangère et il veut l’attirer vers lui, hors des sommets où rodent lions et léopards, bien plus dangereux que les petits renards. Comme il se fait encourageant en répétant : avec moi, avec moi, viens…

Tu as blessé mon cœur, ma sœur fiancée. Tu as blessé mon cœur, d’un seul de tes regards, d’un seul anneau de ton collier : l’hymne à sa beauté reprend alors sur les lèvres du bien-aimé mais au lieu d’être de simple admiration, il devient maintenant chant d’ivresse et de passion. Elle s’était déjà dite « blessée d’amour » (2,5) et maintenant c’est lui qui se reconnaît ainsi.

Qu’elles sont belles, tes amours, ma sœur fiancée ! Qu’elles sont bonnes, tes amours : meilleures que le vin ! L’odeur de tes parfums, une exquise senteur ! Un miel pur coule de tes lèvres, ô fiancée, le miel et le lait, sous ta langue ; l’odeur de tes vêtements est comme l’odeur du Liban : ici encore, il reprend ses mots mêmes (1,2) en décrivant ses caresses meilleures que le vin. L’image du miel revient aussi et surtout tous les parfums.

Jardin fermé, ma sœur fiancée, fontaine close, source scellée : le maître du jardin est unique et elle ne peut se donner qu’à lui seul. Fermé, scellé, clos… l’insistance est extrême en cette triple répétition.

Tes formes élancées : un paradis de grenades aux fruits délicieux, le nard et le cypre, 14 le nard et le safran, cannelle, cinnamome, et tous les arbres à encens, la myrrhe et l’aloès, tous les plus fins arômes : le jardin recueille en lui toute la beauté du monde : fruits, fleurs, parfums, … il y a merveilleuse surabondance.

Seigneur Jésus, toi qui nous as promis « d'être toujours avec nous », permets que nous aussi nous venions à toi pour demeurer « avec toi ».


mercredi 7 septembre 2016

J'irai

Ct 4
(Lui) 1 Ah ! Que tu es belle, mon amie ! Ah ! Que tu es belle ! Tes yeux sont des colombes au travers de ton voile. Ta chevelure : un troupeau de chèvres qui dévalent du mont Galaad. 2 Tes dents : un troupeau de brebis tondues qui remontent du bain ; chacune a sa jumelle, nulle n’en est privée.
3 Comme un ruban d’écarlate, tes lèvres ; tes paroles : une harmonie. Comme une moitié de grenade, ta joue au travers de ton voile. 4 Ton cou : la tour de David, harmonieusement élevée ; mille boucliers sont suspendus, toutes les armes des braves. 5 Tes deux seins : deux faons, jumeaux d’une gazelle ; ils pâturent parmi les lis.
6 Avant le souffle du jour et la fuite des ombres, j’irai à la montagne de la myrrhe, à la colline de l’encens.
7 Tu es toute belle, ô mon amie ! Nulle tache en toi !

Viens Esprit Saint, viens nous redire par ces paroles combien est grand l’amour de notre Dieu.

(Lui) Ah ! Que tu es belle, mon amie ! Ah ! Que tu es belle ! : le thème du mariage a été explicite au verset précédent, et, dans la même ligne, voici le discours nuptial, selon la coutume très longtemps maintenue en Orient, sous la forme d’un chant de louange. « Que tu es belle » ne peut-il d’abord que répéter. Nous avons déjà entendu cette double exclamation en sa bouche (1,15) et elle sera en tout présente 9 fois dans le Cantique.

Tes yeux sont des colombes au travers de ton voile. Ta chevelure : un troupeau de chèvres qui dévalent du mont Galaad. Tes dents : un troupeau de brebis tondues qui remontent du bain ; chacune a sa jumelle, nulle n’en est privée. Comme un ruban d’écarlate, tes lèvres ; tes paroles : une harmonie. Comme une moitié de grenade, ta joue au travers de ton voile. Ton cou : la tour de David, harmonieusement élevée ; mille boucliers sont suspendus, toutes les armes des braves. Tes deux seins : deux faons, jumeaux d’une gazelle ; ils pâturent parmi les lis : puis il faut détailler avec attention et humour, mais aussi sans doute beaucoup de symbolisme dont nous ne percevons plus tout le sens.

Avant le souffle du jour et la fuite des ombres, j’irai à la montagne de la myrrhe, à la colline de l’encens : c’est exactement ce qu’elle lui avait demandé en 2,17  (Avant le souffle du jour et la fuite des ombres, toi, retourne…). Il a maintenant hâte de quitter tous les témoins de la noce, il veut se retirer avec elle, et il affirme avec détermination : « j’irai » sur cette montagne déjà si souvent citée aussi, montagne de la rencontre, monts de l’alliance. Nous voilà donc revenu à une nouvelle aurore.

Tu es toute belle, ô mon amie ! Nulle tache en toi ! : son invitation à l’accompagner va sans cesse s’entrelacer de louanges sur sa beauté comme s’il ne pouvait la quitter des yeux. « tu es toute belle » continue à résonner comme un chant ininterrompu.


Seigneur Jésus, tes paroles nous comblent de joie, car toi-même tu trouves ta joie en la beauté de ton amie. Que tes paroles sont douces, que ton regard est émerveillé ! Fais que ta créature puisse rayonner ton amour !

mardi 6 septembre 2016

Qu'est-ce ?

Ct 3
(Choeur) 6 Qu’est-ce là qui monte du désert comme une colonne de fumée odorante d’encens et de myrrhe, de tous les aromates des marchands ?
7  C’est la litière de Salomon ! Tout autour, soixante braves d’entre les braves d’Israël, 8 tous armés de glaives, entraînés à la guerre, chacun son épée à la hanche contre les terreurs de la nuit.
9 Le trône fait pour le roi Salomon est en bois du Liban ; 10 il a fait les colonnes d’argent, le toit en or, le siège de pourpre ; l’intérieur fut tapissé avec amour par les filles de Jérusalem.
11  Sortez et regardez, filles de Sion, le roi Salomon avec la couronne dont sa mère le couronna au jour de ses noces, au jour de la joie de son cœur.

Viens Esprit Saint, viens nous éclairer par la parole, viens nous aider à entrer dans le mystère de la révélation.

(Choeur) Qu’est-ce là qui monte du désert : voilà un assez long intermède chanté par le chœur entre la plainte de celle qui cherche désespérément et la nouvelle survenue de son bien-aimé. Par un flot d’images, il va nous aider à percevoir qui est celui qu’elle désire tellement. Car « lui » n’y est jamais cité.
« Qu’est-ce là ? » est la question qui ouvre le paragraphe. La TOB traduit par « Qui est-ce ? » mais c’est déjà une interprétation car il s’agit bien d’un neutre dans le texte original : qu’est-ce ? Voilà qui permet de rester dans une totale symbolique, et nous renvoie d’ailleurs à des moments d’interrogation du livre de l’Exode : c’est la même question que se posaient les Israélites devant la manne et surtout celle de Moïse devant le Buisson en flamme.

comme une colonne de fumée odorante d’encens et de myrrhe, de tous les aromates des marchands : la colonne de nuée, la présence de fumée est aussi un indice de théophanie (Ex 3,21…). « Les aromates des marchands » dit la traduction liturgique, « poudre d’importation » dit la TOB tout aussi prosaïquement... « parfums exotiques » est plus poétique et traduit de même la dimension universelle qui se veut présente ici.

C’est la litière de Salomon ! Tout autour, soixante braves d’entre les braves d’Israël,  tous armés de glaives, entraînés à la guerre, chacun son épée à la hanche contre les terreurs de la nuit : les héros qui l’accompagnent disent toute la valeur de celui qu’ils défendent.

 Le trône fait pour le roi Salomon est en bois du Liban ; il a fait les colonnes d’argent, le toit en or, le siège de pourpre ; l’intérieur fut tapissé avec amour par les filles de Jérusalem : le mot « trône » traduit ailleurs pas « palanquin » ne se trouve qu’ici dans la Bible, ce qui nous montre surtout la nature tout à fait à part de ce trône et confirme que le roi du Cantique n’a rien à envier au Salomon de l’histoire.

 Sortez et regardez, filles de Sion, le roi Salomon avec la couronne dont sa mère le couronna au jour de ses noces, au jour de la joie de son cœur : c’est ici seulement que le Bien-Aimé apparaît dans la plénitude de sa majesté : jusqu’à présent il ne régnait que dans le cœur de son Amie. Il entre dans la ville, il entre dans Sion… voilà qui nous propulse à l’entrée de Jésus à Jérusalem : « Fille de Sion, voici ton roi qui vient ! » et, en référence, à tant de passages des psaumes et des prophètes invitant les « filles de Sion » à la joie de l’arrivée du roi.


Seigneur Jésus, toute notre marche vers toi, toute notre attente, est faite d’interrogations. Tu t’approches, mais souvent nous ne pouvons le discerner. Garde-nous éveillés, vigilants, prêts à t’accueillir et te chanter lorsque tu entreras chez nous.

lundi 5 septembre 2016

Je ne la lâcherai plus

Ct 3
3 Ils m’ont trouvée, les gardes, eux qui tournent dans la ville : « Celui que mon cœur aime, l’auriez-vous vu ? »
4 À peine les avais-je dépassés, j’ai trouvé celui que mon cœur aime : je l’ai saisi et ne le lâcherai pas que je l’aie fait entrer dans la maison de ma mère, dans la chambre de celle qui m’a conçue.
5 Je vous en conjure, filles de Jérusalem, par les gazelles, par les biches des champs, n’éveillez pas, ne réveillez pas mon Amour avant son bon vouloir.

Viens Esprit Saint, donne-nous de faire nôtres les mots du Cantique dans notre quête de notre Dieu.

Ils m’ont trouvée, les gardes, eux qui tournent dans la ville : le verbe hébreu est traduit soit par « trouver » (traduction liturgique...) soit par « rencontrer » (TOB…) ce qui convient sans doute mieux pour les gardes qui ne la cherchaient pas, mais moins bien pour la quête de l’aimé.

Celui que mon cœur aime, l’auriez-vous vu ? : ici aussi on peut lire « aimer » ou « désirer ». Son désir est tel qu’elle interroge des gardes qui n’y ont rien à voir et qui ne lui répondent d’ailleurs pas.

À peine les avais-je dépassés, j’ai trouvé celui que mon cœur aime : elle les a dépassés, elle a tout dépassé, et alors elle le rencontre. Où cela ? Au fond d’elle-même ?

je l’ai saisi et ne le lâcherai pas que je l’aie fait entrer dans la maison de ma mère, dans la chambre de celle qui m’a conçue : expression de joie,… quelque peu possessive ! Comme s’il était possible de le retenir. Est-elle si sûre de sa « prise » ? Est-ce par sa propre force qu’elle s’est emparée de lui ?

Je vous en conjure, filles de Jérusalem, par les gazelles, par les biches des champs, n’éveillez pas, ne réveillez mon Amour avant son bon vouloir : nous retrouvons ce beau refrain qui concluait le premier poème (2,7), on pourrait donc situer ici aussi la fin du deuxième poème.

Seigneur Jésus, permets que notre quête soit celle de deux libertés, qu’à ta suite, notre désir nous conduise vers notre Dieu sans jamais vouloir mettre la main sur lui. Béni sois-tu pour chaque moment de rencontre.

dimanche 4 septembre 2016

Je l'ai cherché

Ct 3
1 Sur mon lit, la nuit, j’ai cherché celui que mon cœur aime ; je l’ai cherché ; je ne l’ai pas trouvé.
2 Oui, je me lèverai, je tournerai dans la ville, par les rues et les places : je chercherai celui que mon cœur aime ; je l’ai cherché ; je ne l’ai pas trouvé.

Viens Esprit Saint, viens nous apporter la patience et la persévérance dans notre quête du bien-aimé.

 Sur mon lit, la nuit, j’ai cherché celui que mon cœur aime : … elle l’a renvoyé sur les monts de l’Alliance mais ne l’y a pas suivi, elle est restée en sa chambre, elle le cherche auprès d’elle. Elle n’est plus sur son « lit de verdure » mais sur un lit de tristesse ; le bien-aimé qu’elle avait cru sien (« mon bien-aimé est à moi »), le voici qui se dérobe, qui semble ne plus entendre le son de sa voix qu’il disait si douce.

je l’ai cherché ; je ne l’ai pas trouvé : chercher… trouver… elle va répéter sans cesse ce couple de mots en ces deux versets.

Oui, je me lèverai, je tournerai dans la ville, par les rues et les places : tant qu’il était proche, elle n’a pas obéi à son appel (« lève-toi ») malgré toute la tendresse de sa voix. Maintenant qu’il est loin, son désir brûlant la fait se lever, ouvrir sa porte, sortir, courir seule en cette nuit dans les rues de la ville…

je chercherai celui que mon cœur aime : la traduction liturgique dit « celui que mon âme désire ». Tel est bien sûr la raison de sa course à la recherche de l’absent. Elle l’a envoyé sur la montagne, et elle le cherche sur les places mais la ville des hommes ne saurait le lui rendre. Il n’est ni ici ni là et personne ne peut le lui ramener.

je l’ai cherché ; je ne l’ai pas trouvé : chercher - trouver : un couple de mots présents en toute expérience spirituelle, depuis les prophètes, en passant par les mystiques, jusqu’à chacun de nous : « l’absence de Dieu » est d’autant plus vive que la quête est ardente, que l’amour est grand…

Seigneur Jésus, en t’éloignant, tu ravives sans cesse en nos cœurs notre désir de toi, qu’il nous porte à te chercher sans relâche au cœur de la prière, comme dans ta parole et dans nos frères.

vendredi 2 septembre 2016

Mon bien-aimé est à moi

Ct 2
(Choeur) 15 Attrapez-nous ces renards, ces petits renards qui ravagent les vignes, car nos vignes sont en fleurs !
(Elle) 16 Mon bien-aimé est à moi, et moi, je suis à lui, il mène paître ses brebis parmi les lis.
17 Avant le souffle du jour et la fuite des ombres, toi, retourne… Sois pareil à la gazelle, mon bien-aimé, au faon de la biche, sur les montagnes escarpées.

Viens Esprit Saint, viens purifier nos cœurs afin que nous puissions entendre l’invitation à nous donner tout au long du jour.

(Choeur) Attrapez-nous ces renards, ces petits renards qui ravagent les vignes, car nos vignes sont en fleurs : qui sont-ils ces petits renards ? Sans doute tout ce qui peut venir troubler la paix du cœur et le désir de la bien-aimée vers Lui. Cet avertissement, dont l’auteur n’est pas précisé, vient interrompre leur dialogue, se glisser au moment de l’attente de sa réponse.

(Elle) Mon bien-aimé est à moi, et moi, je suis à lui : encore un des « refrains » du Cantique mais dont les variantes sont significatives. Pour le moment elle commence par « mon bien-aimé est à moi », en quelque sorte elle se l’approprie avant de se donner elle-même.

il mène paître ses brebis parmi les lis : elle le revoit pasteur au milieu des promesses de vie. Là, parmi les lis de la vallée, c’est tout son troupeau qu’il conduit.

Avant le souffle du jour et la fuite des ombres, toi, retourne… : il a appelé au petit jour et le soleil n’est pas encore levé ; mais voici qu’étonnamment, elle ne répond pas par de tendres paroles, elle ne se montre même pas, mais elle le renvoie ! Mais où doit-il retourner ?

Sois pareil à la gazelle, mon bien-aimé, au faon de la biche, sur les montagnes escarpées : cette fin du deuxième poème anticipe déjà la fin du Cantique lui-même. Nous retrouvons l’image des versets 8 et 9 : la gazelle, le faon, bondissant sur les montagnes. C’est là qu’il est chez lui, c’est là qu’il apparaît dans toute sa splendeur, c’est là qu’elle voudrait le rejoindre, sur la montagne escarpée, la plus haute, la plus secrète, réservée à leur rencontre. Le troupeau est dans la vallée, elle est l’unique qui veut le rejoindre sur la montagne. D’autres traductions indiquent « monts séparés » ou « montagnes de l’alliance » car le mot hébreu est un nom propre inconnu dont on cherche à interpréter la racine, ce qui donne dès lors lieu à diverses interprétations.

Seigneur Jésus, garde-nous vigilants dans la prière, désireux de demeurer en ton amour. 

jeudi 1 septembre 2016

Ton visage est beau

Ct 2
13a Lève-toi, mon amie, ma gracieuse, et viens…
14 Ma colombe,
cachée au creux du rocher dans les retraites escarpées,
montre-moi ton visage,
fais-moi entendre ta voix,
car ta voix est douce
et ton visage est beau.

Viens Esprit Saint, donne-nous aujourd’hui, au travers de cette lectio, de nous laisser séduire par la tendresse de ton appel.

Lève-toi, mon amie, ma gracieuse, et viens… : le chant rebondit avec ce même refrain d’invitation

Ma colombe, cachée au creux du rocher dans les retraites escarpées : après l’invitation à regarder la nature printanière toute chargée de promesses, tous ses regards se tournent maintenant vers sa bien-aimée et il la voit telle une colombe. La colombe de pureté, de paix, de douceur. Elle s’abrite dans sa maison tel l’oiseau dans la fente du rocher de la montagne.

montre-moi ton visage, fais-moi entendre ta voix : nouvelle invitation, non plus à sortir, mais simplement à lui montrer son visage ; il se fait de plus en plus discret, délicat. Et comme elle s’est réjouie à sa voix, il souhaite entendre la sienne. « Fais-moi entendre », c’est comme une demande en cadeau.

car ta voix est douce et ton visage est beau : un des plus beaux vers du Cantique, une émouvante louange adressée à la bien-aimée. Sa voix à lui, douce aussi, lui adresse une reconnaissance vibrante de ce qu’elle est à ses yeux. Une expression de ce que nous sommes aux yeux de notre créateur.


Seigneur Dieu, rends-moi toute attentive à ta voix en ce jour puisque tu veux me révéler au travers de ces mots « la merveille que je suis » (Ps 139,14). Béni sois-tu, Seigneur, de m’avoir créée. (Ste Claire)