Liturgie de la Parole Lundi Saint
Méditation
Évangile Jean 12, 1-11
En méditant sur le récit de Jean qui nous est donné d’entendre aujourd’hui, celui d’un événement rapporté de manière différente par les quatre évangélistes, je me demandais pourquoi il était si peu commenté. Je les ai relus avec attention et l’attitude de Marie me touche quelle que soit l’expression puissante de l’amour qu’elle manifeste pour Jésus. Qu’est-ce qui dérange ? C’est pourtant tellement beau cette perception d’un amour vrai, celui de Marie qui hérite de l’âme de Jésus.
Dans le récit de Jean, il vient contrebalancer l’attitude de Judas qui est resté le cœur fermé par rapport à tout ce qu’il a entendu et vu de Jésus quand il le suivait sur le chemin. Le « je t’aime » qui crie au fond du cœur de Marie s’est mué chez Judas en « Je te haime ». C’est l’expression de Lytta Basset que j’avais lue dans son livre « aimer sans dévorer », et elle me paraît très adéquate. Je ressens ce passage de l’amour à la haine comme une sorte de glissement de terrain dévastateur et mortel.
Que se passe-t-il à table, à Béthanie dans cette maison de l’amitié où Jésus et ses amis sont invités ? Sans doute ont-ils été conviés pour fêter l’événement qui vient d’avoir lieu : la résurrection de Lazare, le frère de Marthe et Marie.
Marie prend une livre de parfum, du vrai nard d’un grand prix. Inutile de préciser. C’est l’expression d’un amour sans mesure. Elle oint les pieds de Jésus et les essuie avec ses cheveux. Remarquez qu’il n’y a pas de larmes. Les larmes c’était pour la mort de Lazare, des larmes qui par ailleurs avaient troublé et fait frémir Jésus aux entrailles. Marie, elle a bien compris le message de Jésus : « Où l’avez-vous mis ? Déliez-le et laissez-le s’en aller. » Marie elle a déjà compris que le temps de la séparation peut être le temps du développement et du mûrissement en soi d’une présence toute différente. Elle a vécu cette expérience où ce temps de la séparation peut devenir à la fois une désappropriation et un accueil à la vie. Offrir à l’autre de se déployer pleinement et cela commence par lui rendre la liberté et la dignité auxquelles il a droit pour vivre et faire vivre.
« La maison s’emplit de la senteur du parfum » Est-ce que ça sent bon le parfum de Dieu dans nos églises ? Si ça ne sent rien c’est ennuyeux. Quand on porte Quelqu’un au-dedans de soi, on est emparfumé, et le parfum, il ne se transmet que si j’en suis imprégné. De toute évidence, la souffrance n’est pas bonne mais c’est le parfum, le nectar qui en sort qui est magnifique.
C’est toute la différence entre Judas et Marie et elle est terrible. Judas est scandalisé, il est habité de forces obscures. Il a oublié les bons moments vécus et ce qu’il a reçu. Il faut bien réaliser le décalage entre le geste d’amour « gratuit » de Marie et le « calcul mental » que fait cet homme. Il est en train de s’occuper des pauvres alors qu’il ne les aime pas, il s’en fout. Le geste de Marie est inacceptable pour Judas. C’est du gaspillage.
Quand pourrons-nous comprendre que notre bonheur se trouve dans l’acte de se réjouir du bonheur de l’autre !
Que cette chapelle sente bon le parfum de Dieu, le parfum de Celui qui vous habite et vous fait vivre. Il s’agit de rendre Dieu heureux en étant heureux soi-même.
Bonne semaine Sainte.
Raymond