(sr Myrèse)
Introduction : Pourquoi y-a-t-il si souvent un joueur de flûte à la
crèche ? Pourquoi beaucoup de figures qui entourent la naissance de Jésus
sont-elles des personnes âgées ? Zacharie, Elisabeth, Syméon, Anne ?
même Joseph selon la tradition apocryphe serait un vieillard. Quand Dieu fait
toutes choses nouvelles, il semble tout reprendre à l’origine, non pour
défaire, non pour abolir, mais pour rejoindre et avec son intuition première, son
projet créateur construire avec nous un monde beau, une nature belle et bonne,
une humanité belle et bonne, fraternelle. La racine de Jessé a fleuri,
l’arbre donne enfin son fruit. Ouvrons nos yeux, prenons tout ce qui en
nous est vieux, pour le laisser saisir à nouveau, pour nous laisser renouveler
par ce Dieu venu partager notre humanité, pour nous donner part à sa divinité.
Après l’Evangile : voilà un évangile que vous avez encore en mémoire, nous
l’avons lu ce dimanche. Dimanche dans une version plus longue, vous aurez la
suite demain. Fernand nous l’a commenté abondamment. Vous pouvez vous remémorer
la manière dont il a fait défiler devant nos yeux tous ces personnages – pour
la plupart d’un certain âge – qui entourent la naissance de Jésus. Je voudrais
vous en ajouter un. Une plutôt. Elle nous vient d’une tradition déjà ancienne,
un évangile de l’enfance apocryphe, arménien. Si ces écrits ne sont pas reçus
comme canoniques, cela ne veut pas dire qu’ils n’ont aucun message à nous
délivrer. Et cette tradition ancienne, d’une dernière visiteuse à la crèche, a
été reprise dans un conte de Noël des frères Tharaud, écrivains, membres de
l’académie française, décédés respectivement en 1952 et 53. Je livre ce conte à
votre méditation :
C’était à
Bethléem au point du jour. L’étoile venait de disparaître, le dernier pèlerin
avait quitté l’étable, la Vierge avait bordé la paille, l’enfant allait dormir
enfin. Mais dort-on la nuit de Noël ?… Doucement la porte s’ouvrit, poussée,
eût-on dit, par un souffle plus que par une main, et une femme parut sur le
seuil, couverte de haillons, si vieille et si ridée que, dans son visage
couleur de terre, sa bouche semblait n’être qu’une ride de plus.
En la voyant, Marie prit peur, comme si
ç’avait été quelque mauvaise fée qui entrait. Heureusement Jésus dormait !
L’âne et le bœuf mâchaient paisiblement leur paille et regardaient s’avancer
l’étrangère sans marquer plus d’étonnement que s’ils la connaissaient depuis
toujours. La Vierge, elle, ne la quittait pas des yeux. Chacun des pas qu’elle
faisait lui semblait long comme des siècles. La vieille continuait d’avancer,
et voici maintenant qu’elle était au bord de la crèche. Grâce à Dieu, Jésus
dormait toujours. Mais dort-on la nuit de Noël ?…
Soudain, il ouvrit les paupières, et sa mère
fut bien étonnée de voir que les yeux de la femme et ceux de son enfant étaient
exactement pareils et brillaient de la même espérance. La vieille alors se
pencha sur la paille, tandis que sa main allait chercher dans le fouillis de
ses haillons quelque chose qu’elle sembla mettre des siècles encore à trouver.
Marie la regardait toujours avec la même inquiétude. Les bêtes la regardaient
aussi, mais toujours sans surprise, comme si elles savaient par avance ce qui
allait arriver. Enfin, au bout de très longtemps, la vieille finit par tirer de
ses hardes un objet caché dans sa main, et elle le remit à l’enfant. Après tous
les trésors des Mages et les offrandes des bergers, quel était ce présent ?
D’où elle était, Marie ne pouvait pas le voir. Elle voyait seulement le dos
courbé par l’âge, et qui se courbait plus encore en se penchant sur le berceau.
Mais l’âne et le bœuf, eux, le voyaient et ne s’étonnaient toujours pas. Cela
encore dura bien longtemps.
Puis la vieille femme se releva, comme
allégée du poids très lourd qui la tirait vers la terre. Ses épaules n’étaient
plus voûtées, sa tête touchait presque le chaume, son visage avait retrouvé
miraculeusement sa jeunesse. Et quand elle s’écarta du berceau pour regagner la
porte et disparaître dans la nuit d’où elle était venue, Marie put voir enfin
ce qu’était son mystérieux présent. Ève (car c’était elle) venait de remettre à
l’enfant une petite pomme, la pomme du premier péché (et de tant d’autres qui
suivirent !) Et la petite pomme rouge brillait aux mains du nouveau-né
comme le globe du monde nouveau qui venait de naître avec lui. (Jérôme et Jean
Tharaud, cités dans Contes et récits de Noël, Atelier, 1995 p 63 sv)
Ainsi, la présence de ces vieillards
dans les récits d’enfance de Jésus, nous disent quelque chose de profond, de
très profond… Celui qui vient de naître, ce tout petit que Syméon accueille
dans ses bras, est cette lumière qui brille dans les ténèbres, et qu’aucune
ténèbre n’a su au long des siècles arrêter. Ainsi Syméon a bien raison de voir
dans cet enfant, qui repose entre ses bras, la lumière des nations, le salut
préparé à la face des peuples. Ce salut est pour toi aussi. Tu peux avec Eve,
rapporter tes pommes… et les déposer. L’enfant est là. Et s’il est encore si
faible, trop faible pour triompher de tout mal, ne t’en fais pas. Si d’aventure
le serpent a suivi Eve, si d’aventure, il menace l’enfant, les bergers ont
laissé auprès de l’enfant, un joueur de flûte… qui par son Souffle enchante, et
détourne le serpent… voyez en Lui, celui qui ne pouvait abandonner son Fils à
la mort, le Père et son Souffle, son Esprit venus accompagner l’incarnation de
Celui qui ne fait qu’un avec eux.
Invitation
au Notre Père : Jésus par
ta naissance, tu nous rejoins là où nous sommes, et tu nous tournes vers le Père,
avec toi, nous voulons redire la prière des enfants de Dieu
Prière
conclusive : (d’après une hymne
CFC — CNPL)
Père des siècles du monde,
la naissance de ton Fils en notre histoire, transfigure nos tourments en
douleurs d’enfantement où déjà surgit ta gloire. Père, tu as vu le mal et la
souffrance, tu as vu notre humanité chancelante, et tu nous as donné ton Fils,
il est le Vrai soleil du jour nouveau, et il perce la nuit profonde. Avec
Syméon, Anne, Zacharie et Elisabeth, Eve et Adam, nous chantons notre
délivrance. Aujourd’hui encore illumine tous les cœurs, restaure par la
naissance de ton Fils, la création. Et tandis que ce Noël nous réenchante,
aide-nous à devenir un peuple nouveau, fraternel et solidaire. Nous te le
demandons
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