vendredi 20 juin 2014

C'est par la grâce du Seigneur Jésus

Ac 15, 5-21


Le texte (traduction : Bible de Jérusalem) :
« Mais certaines gens du parti des Pharisiens qui étaient devenus croyants intervinrent pour déclarer qu'il fallait circoncire les païens et leur enjoindre d'observer la Loi de Moïse.
 6 Alors les apôtres et les anciens se réunirent pour examiner cette question.
 7 Après une longue discussion, Pierre se leva et dit : ‘Frères, vous le savez : dès les premiers jours, Dieu m'a choisi parmi vous pour que les païens entendent de ma bouche la parole de la Bonne Nouvelle et embrassent la foi.
 8 Et Dieu, qui connaît les cœurs, a témoigné en leur faveur, en leur donnant l'Esprit Saint tout comme à nous.
 9 Et il n'a fait aucune distinction entre eux et nous, puisqu'il a purifié leur cœur par la foi.
 10 Pourquoi donc maintenant tentez-vous Dieu en voulant imposer aux disciples un joug que ni nos pères ni nous-mêmes n'avons eu la force de porter ?
 11 D'ailleurs, c'est par la grâce du Seigneur Jésus que nous croyons être sauvés, exactement comme eux’.
 12 Alors toute l'assemblée fit silence. On écoutait Barnabé et Paul exposer tout ce que Dieu avait accompli par eux de signes et prodiges parmi les païens.
 13 Quand ils eurent cessé de parler, Jacques prit la parole et dit : ‘Frères, écoutez-moi.
 14 Simon a exposé comment, dès le début, Dieu a pris soin de tirer d'entre les païens un peuple réservé à son Nom.
 15 Ce qui concorde avec les paroles des Prophètes, puisqu'il est écrit :
 16 Après cela je reviendrai et je relèverai la tente de David qui était tombée, je relèverai ses ruines et je la redresserai,
 17 afin que le reste des hommes cherchent le Seigneur, ainsi que toutes les nations qui ont été consacrées à mon Nom, dit le Seigneur qui fait
 18 connaître ces choses depuis des siècles.
 19 ‘C'est pourquoi je juge, moi, qu'il ne faut pas tracasser ceux des païens qui se convertissent à Dieu.
 20 Qu'on leur mande seulement de s'abstenir de ce qui a été souillé par les idoles, des unions illégitimes, des chairs étouffées et du sang.
 21 Car depuis les temps anciens Moïse a dans chaque ville ses prédicateurs, qui le lisent dans les synagogues tous les jours de sabbat’ ».

Prière (suggérée par Enzo Bianchi) :
« Notre Dieu, Père de la Lumière, tu as envoyé dans le monde ton Fils, Parole faite chair, pour te manifester à nous, les hommes.
Envoie maintenant sur moi ton Esprit Saint, afin que je puisse rencontrer Jésus-Christ dans cette Parole qui vient de toi ; afin que je la connaisse plus profondément et que, en la connaissant, je l’aime plus intensément pour parvenir ainsi à la béatitude du Royaume. Amen »

Lecture verset par verset :
L’Evangile est résolument adressé aux païens. Nous assistons à présent aux discussions qui concernent les conditions d’entrée dans cette religion d’origine juive…
Trois discours vont nous éclairer.

(v. 5-6) Faut-il « circoncire les païens et leur enjoindre d'observer la Loi de Moïse » ? Telle est la question.
Ce rite de la circoncision remonte au temps où Israël devint un peuple. Avec Abraham, ce rite marquait l’entrée dans l’Alliance. Il était donc capital et nécessaire.
Mais l’est-il encore au temps de la jeune Eglise, en ce temps où Paul a assisté au désintérêt et à l’hostilité du peuple juif (13, 46), mais à l’accueil tout joyeux des païens ?
L’aspect communautaire de l’Eglise est déjà bien attesté : il faut débattre.

« Alors les apôtres et les anciens se réunirent pour examiner cette question… »

(v. 7-11) Pierre, figure éminente de l’Eglise, présent dès les origines, prend la parole en premier.
Nous avons déjà lu des prises de parole de cet apôtre dans les Actes. Il a une parole d’autorité parmi les frères et retrace l’événement majeur qui s’est produit :
« … dès les premiers jours, Dieu m'a choisi parmi vous pour que les païens entendent de ma bouche la parole de la Bonne Nouvelle et embrassent la foi… »
Cette annonce de la Bonne Nouvelle par Pierre aux païens n’est pas due au hasard, mais c’est une élection : « Dieu m'a choisi ».
Le résultat de cette annonce est double. Du côté des païens, l’accès à la foi et, du côté de Dieu, le don de l’Esprit :
« Dieu, qui connaît les cœurs, a témoigné en leur faveur, en leur donnant l'Esprit Saint »
Pierre met ainsi en exergue ce qui les unit, plus que ce qui les divise : « tout comme à nous… Et il n'a fait aucune distinction entre eux et nous »
Sur ce fondement de ce qui les unit, Pierre pose la question :
« Pourquoi donc maintenant tentez-vous Dieu en voulant imposer aux disciples un joug que ni nos pères ni nous-mêmes n'avons eu la force de porter ? »
Pierre nous présente une sorte de confession de foi, un aveu : lui-même ne peut observer toute la Loi…
Rappelons que l’ensemble des préceptes de la religion juive sont particulièrement nombreux[1].
Il finit alors par livrer le secret de tout chemin de foi :
« c'est par la grâce du Seigneur Jésus que nous croyons être sauvés, exactement comme eux »
Oui, le salut est une grâce, que l’on soit juif ou païen…

(v. 12) « Alors toute l'assemblée fit silence. On écoutait Barnabé et Paul exposer tout ce que Dieu avait accompli par eux de signes et prodiges parmi les païens »
Après Pierre, d’autres locuteurs prennent la parole. Le narrateur synthétise l’intervention des deux frères Barnabé et Paul, qui retracent les « signes et prodiges parmi les païens ».
Ce sommaire fait écho à la déclaration de Paul : « Paul et Barnabé prolongèrent donc leur séjour assez longtemps, pleins d'assurance dans le Seigneur, qui rendait témoignage à la prédication de sa grâce en opérant signes et prodiges par leurs mains » (14, 3). Les guérisons et les conversions de païens (13-14) se multiplient…

(v. 13-21) Un troisième discours éclaire la question. Il est prononcé par Jacques :
Après avoir résumé et avalisé le propos de Pierre (« Simon a exposé comment, dès le début, Dieu a pris soin de tirer d'entre les païens un peuple réservé à son Nom »)[2], Jacques cite le prophète Amos (9, 11-12) : « Après cela je reviendrai et je relèverai la tente de David qui était tombée, je relèverai ses ruines et je la redresserai, afin que le reste des hommes cherchent le Seigneur, ainsi que toutes les nations qui ont été consacrées à mon Nom, dit le Seigneur qui fait connaître ces choses depuis des siècles »
Ce verset est « le seul de tout l’Ancien Testament où l’invocation du nom divin est appliquée aux nations païennes »[3].
Il est capital : les païens ne remplacent pas le peuple d’Israël, peuple choisi par Dieu, mais y sont associés, pour former un unique peuple de Dieu.
Cela fait indirectement écho à la déclaration de Pierre : c’est l’œuvre de la grâce de Dieu (v. 11)…
A partir de cette citation prophétique, Jacques dégage quelques principes : « s'abstenir de ce qui a été souillé par les idoles, des unions illégitimes, des chairs étouffées et du sang ».
Ces prescriptions ne sont pas neuves, puisqu’elles sont attribuées à Moïse pour favoriser la coexistence entre Juifs et païens[4].
Ainsi, Jacques n’oppose-t-il pas les deux peuples, mais il cherche à les unir dans le respect de règles de base.

Ces principes peuvent éclairer nos tentatives de dialogues : allons-nous accentuer ce qui divise ou ce qui unit ?
Nous sommes dépositaires de la Loi : la mettrons-nous au service de la rencontre ou en ferons-nous une barrière qui éteint toute vie ?
Dieu nous fait confiance et attend notre discernement…


Prière :
Seigneur, tu as accordé ta confiance aux premières générations chrétiennes. Tout empreinte de ton Esprit, ton Eglise a écouté ton projet de salut et s’est ouverte aux païens.
A nous aujourd’hui, tu fais pareillement confiance lorsque nous voulons servir ton projet de salut et de vie. Comme Pierre, nous croyons en toi. Afin que nous découvrions ton désir pour nous et notre monde, Seigneur, envoie ton Esprit !
Amen
Soeur Marie-Jean



[1] Pour s’en convaincre, relisons le livre du Lévitique
[2] La traduction de la BJ note le nom araméen de Pierre, à savoir « Syméon ». 
[3] Pour aller plus loin, voir le commentaire de Ph. Bossuyt et J. Radermakers, Témoins de la Parole de la Grâce. Actes des Apôtres, Bruxelles, IET, 1995.
[4] Cfr Ph. Bossuyt et J. Radermakers, 1995, p. 445-449.

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