samedi 6 mars 2021

Liturgie de la Parole, 2e samedi de Carême

 (Rosy)

Introduction

Avez-vous remarqué la disparition des versets 3 à 10 de l’évangile du jour ?

Les versets 1 et 2 plantent le cadre : d’un côté les publicains et les pécheurs qui viennent écouter Jésus, de l’autre les scribes et les pharisiens, un rien jaloux, qui parlent avec mépris de Jésus : « Cet homme... »

Et, dit le verset 3, Jésus répond à leurs murmures en parabole.

Vient alors ce magnifique trio de paraboles rythmés par les mots « perdu / retrouvé » et  le « réjouissez-vous avec moi ». Nous sommes privés des deux premières : la 100e brebis et la 10e pièce de monnaie. Vient alors le 2e fils, texte qui nous est offert aujourd’hui. Nous éviterons de distribuer les rôles : celui-là c’est Dieu le Père, celui-là le pauvre pécheur que je suis, etc…

«  Dieu n’est pas un personnage de parabole,

Dieu ne tient pas en place,

Il ne se laisse pas enfermer dans les paraboles.

C’est lui qui les raconte… »

 La parabole est bien un éclairage sur ce qu’est le Royaume… elle dévoile une facette de ce grand mystère et chacun a à l’accueillir à sa façon.

Alors, aujourd’hui, je voudrais aborder cette histoire magnifique par le biais du don, du cadeau.

Préparons-nous  à l’écoute de la Parole en chantant les psaumes.

Commentaire :

Puisque j’ai choisi le fil rouge du don pour notre méditation, il me fallait bien vous apporter un petit cadeau… ! Et comme nous connaissons bien ce récit, je peux vous dire qu’il s’agit en fait du non-don, de ce qui n’a pas été offert, et qui – par son absence même – a fait tout basculer. Vous y êtes ? Oui, il s’agit de gousses du caroubier, de ces caroubes mangées par les cochons…

Prenons donc le récit :

Quelle est la première parole ? Elle est dans la bouche du cadet : « Donne-moi ». Vous voyez que je n’ai pas été chercher bien loin mon fil rouge.

Mais tout de suite la demande se pervertit : « Donne-moi ce qui me revient ». Le cadeau est donc comme déjà possédé, comme exigé. S’il s’agit d’exécuter un contrat, il n’y a plus de don, parce qu’il n’y a pas de liberté. Le point de vue est pour le moins égoïste.

On attend la réaction du père… et, en même temps, apparaît le 3e personnage. « Le père leur partagea ses biens ». Il donne, et il donne la même part à chacun.

Le cadet est parti, il dilapide tout ce qu’il a reçu au point de se retrouver dans la déchéance totale, au milieu des cochons ! Le texte traduit bien qu’il est quasi à leur niveau, lui qui rêve, non pas de manger, mais de se remplir le ventre.

Là, tout devient étrange : il voudrait se nourrir des caroubes ? Et bien, qu’il se baisse, qu’il les ramasse. Lui interdirait-on ? On dirait qu’il attend qu’on les lui offre sur un plateau d’argent… Personne ne lui en donne, il n’y a plus de don…

Mais le texte va bien plus loin : « personne ne lui donnait rien ». Voilà le drame : pas une seule personne pour lui donner à manger, mais rien d’autre non plus : ni secours, ni présence, ni tendresse : il manque de tout, surtout d’être aimé. L’absence de don le plonge dans le malheur.

La faim – elle seule est reconnue – va le remettre en route.

Et, arrivé chez son père, quel sera le premier cadeau : une tunique, une bague… ? Non ! Des baisers ! Car c’est sans doute de cela qu’il manquait le plus.

Après, oui, on pourra le revêtir des insignes de son rang, et, enfin, le nourrir.

On pourra « manger et festoyer ». Retenons bien ces deux verbes désignant tous deux la nourriture si absente dans son exil.

Alors apparaît le fils ainé. Personne n’a été le prévenir, personne non plus ne l’a invité à se joindre à la fête. Qu’auriez-vous dit en revenant ainsi et en entendant les réjouissances ? Il doit lui-même interroger un ouvrier pour se mettre au courant : quelle humiliation ! On peut comprendre sa colère.

Pendant que son père guettait le retour de son cadet, l’ainé se sentait oublié, négligé, il voudrait avoir sa place dans l’attention de son père.

A lui non plus, d’une certaine façon, « personne ne donnait rien ». Et c’est d’ailleurs le reproche qu’il fait à son père : « jamais tu ne m’as donné un chevreau » Les caroubes du cadet, le chevreau de l’ainé, tout ce qui est attendu sans être offert : c’est l’absence du don.

Finalement, le parcours des deux fils se ressemblent fameusement : l’un est parti loin sur la route, l’autre est parti loin dans sa rancœur. Chacun est revenu, mais pour de mauvaises raisons. Mais ils sont là, non pas avec ce qu’ils ont, mais avec ce qu’ils sont. Et c’est le seul cadeau qu’ils puissent faire au père et se faire l’un à l’autre : le don de leur présence.

Pourtant le père offre un autre regard : « tout ce qui est à moi est à toi. » A ces dons quémandés, il oppose la plénitude du don.

Maintenant que le fils aîné est là, maintenant que le dialogue – même chaotique - est rétabli, c’est le temps, non plus seulement de « manger et festoyer » mais de « festoyer et se réjouir ». Au-delà de la nourriture, apparaît enfin la joie, et la joie collective.

Quand ce qui était perdu est retrouvé, c’est le temps de répondre à l’invitation « réjouissez-vous avec moi. », c’est le temps d’accueillir la plénitude du don. Mais ce don-là, c’est la Vie, c’est l’Esprit, c’est l’Amour, c’est loin des caroubes !

Regardons ce jeune fils revêtu du plus beau vêtement, de la bague au doigt, des sandales aux pieds… qui expriment sa dignité retrouvée.

Et nous, de quoi sommes-nous revêtus ?

D’une couronne d’amour et de tendresse : de quoi nous réjouir !!

Introduction au Notre Père :

Jésus nous a invités à prier le Père en implorant le don du pain quotidien et celui du pardon reçu et donné. Tournons-nous ensemble vers notre Père.

Prière de conclusion :

Prions avec les mots d’Ignace de Loyola :

Donne, Seigneur, et reçois, toute ma liberté, ma mémoire, mon intelligence, et toute ma volonté. Tout ce que j'ai et possède, c'est Toi qui me l'as donné: à toi, Seigneur, je le rends. Tout est à Toi, disposes-en. selon ton entière volonté. Donne-moi, ton amour et ta grâce : cela me suffit.

Nous te le demandons avec confiance, à toi qui vis et règne avec le Père et l’Esprit, pour les siècles des siècles.


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