dimanche 31 août 2025

Liturgie de la Parole 22e dimanche Année C

L’humilité est un chemin permettant d’aimer l’autre pour lui-même

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 14,1.7-14.

Homélie.

      Lorsque je prépare une homélie, un de mes premiers réflexes est de me poser la question : « En quoi ce texte d’Évangile est-il une Bonne Nouvelle pour moi  aujourd’hui? » Cette question est comme une clé pour ouvrir le texte.  (montrer une clé )
Mais parfois, la clé grince un peu.  C’est le cas aujourd’hui.  Dans un premier temps Il m’a été difficile de découvrir une Bonne Nouvelle dans ce passage d’évangile et ensuite de vous la partager.  Mais pourtant il y a une bonne nouvelle à dénicher dans ce texte.  J’y reviendrai à la fin de mon homélie.
      
      L’Évangile est le livre qui dévoile le vrai visage de Dieu.  Çà c’est une Bonne nouvelle.  Mais quel est donc le visage de Dieu que je peux trouver dans cette parabole que nous venons d’entendre ?
Nous y voyons que Jésus, prend son repas chez un chef pharisien, responsable des autres.  Comment plusieurs pharisiens chef présentent-ils Dieu dans les synagogues et sur les places publiques ?  Il est un Dieu d’une pureté et d’une rigidité exemplaires, un Dieu de gloire et de majesté.  Dieu est quelqu’un à qui on doit plaire en respectant scrupuleusement la Loi dictée à Moïse.  En dehors de lui, rien n’existe. Devant lui, nous ne sommes pas grand-chose.
      Je me demande en quoi un tel Dieu me concerne.  Il est insaisissable, il est impossible de le connaître et donc de l’aimer.  Je ne peux que me soumettre à sa Loi en tremblant devant Lui et en me culpabilisant.  En effet, comment éprouver de l’amour pour un être si distant, si lointain, si mystérieux.
Ce Dieu, comme les dieux de plusieurs mythologies (notamment les mythologies grecques et romaines ayant cours dans le pays de Jésus), a servi très longtemps le pouvoir politique des pharisiens en maintenant les petits dans la peur et la soumission.
      Ces images de Dieu sont une injure au Dieu de l’Évangile.  Jésus « pite » dans la fourmilière.  Il ouvre une voie accessible à tous y  compris pour ceux qui sont à la marge tels ceux qui sont cités dans la seconde partie de l’évangile.  Jésus choisit le cadre d’un repas pour le faire.  Jésus utilise souvent le cadre d’un repas pour nous dévoiler des choses essentielles. ( Ex. : la 1° place à table, Cana, Béthanie, dernière Cène,….)
      La grande nouveauté de Jésus, - que les pharisiens n’admettront jamais -  et qui lui a coûté la vie, c’est de rapprocher Dieu de l’Homme et d’introduire l’Homme dans la famille de Dieu.  Ce Dieu, Jésus l’appelle : « Abba », « papa » et il l’identifie à l’Amour.  L’amour de Dieu pour nous est inouï, miséricordieux et gratuit.  J’en prendrai d’autant plus conscience si je fais preuve d’humilité devant Lui.  En effet, adopter l’attitude d’humilité me permet de développer une plus grande profondeur  dans mes relations avec les autres et aussi avec Dieu.  J’irais jusqu’à dire que seule la personne humble peut vraiment aimer l’autre pour lui-même.
      Naturellement cela change tout.  Dieu n’est plus un extraterrestre, un  martien mais il devient un familier, un partenaire. On peut  même Lui dire « Tu ».  C’est ce que nous faisons par exemple en récitant le Notre Père.
      Suite au message de Jésus, ce n’est plus l’Homme qui s’anéantit devant Dieu mais c’est Dieu qui s’abaisse devant l’Homme.  C’est Dieu qui se met sur le côté pour mettre l’Homme au centre. Il adopte l’attitude d’humilité.
      Alors que Jésus aurait eu le droit de « revendiquer le rang qui l’égalait à Dieu »comme le dit saint Paul aux Philippiens,  ( Ph 2,6-8) Jésus a choisi de se mettre à la dernière place comme dans la parabole de ce jour. Dans la scène du lavement des pieds, le jour avant sa crucifixion, (Jn 13,1-11) nous voyons Jésus en tablier, Jésus à genoux aux pieds des hommes, Dieu lavant les pieds sales de l’humanité..  « Je suis au milieu de vous, à la place de celui qui sert.  (Lc 22, 27)  Cela résonne en moi comme bonne nouvelle.  Et je suis heureux de vous le partager.  (Montrer la seconde clé) 
      Je comprends que ce bouleversement radical de l’image que beaucoup de croyants se font de Dieu les indispose.  Ils s’indignent de voir Dieu perdre la place d’honneur.
Mais ne serait-ce pas à nous maintenant de lui rendre la politesse en lui disant comme dans la parabole de ce jour : Viens, Seigneur, prends la première place à table.  Nous en serons heureux parce que notre foi est le reflet de l’amour du Christ. 

Abbé Fernand Stréber, Hurtebise, di.31/08/25


P’tit rawett’ : DIEU A-T-IL DES POUX ?

    Un rabbi fut un jour sidéré en entendant quelqu’un prier. Non seulement ce que disait l’homme était absurde.  Par surcroît, il insultait Dieu !
    « - Laisse-moi m’approcher de toi, mon Dieu, implorait l’homme.  Je promets de laver ton corps quand il sera sale. Si tu as des poux, je t’en débarrasserai. Je te confectionnerai de belles chaussures. Personne ne prend soin de toi, mon Dieu. Quand tu seras malade, je t’apporterai un remède. « 
    Le rabbi n’y tint plus :- « Tais-toi ! cria-t-il. Arrête de débiter des sornettes. Te rends-tu compte de ce que tu dis ? Dieu a-t-il des poux ? A-t-il besoin de toi pour se soigner ? Qui t’a appris cette prière blasphématoire ? »
    - « Personne, répondit l’homme. Je suis pauvre et ignorant, on ne m’a rien enseigné. Je ne parle que de ce que je connais. Les poux m’accablent, alors je me dis qu’ils doivent aussi déranger Dieu.  Ce que je mange me donne des aigreurs. Dieu en souffre peut-être aussi. J’ai pris mes propres expériences pour en faire une prière. Mais si tu peux m’apprendre quelque chose de mieux, je t’en serai reconnaissant. »
    Le rabbi lui enseigna une belle prière. L’homme s’inclina devant lui et le remercia. Le maître était très satisfait, convaincu d’avoir accompli une bonne action. Il leva les yeux au ciel pour voir si Dieu était content de lui. Or Dieu était furieux !
    « - Je t’ai donné pour mission d’amener les gens vers moi, tonna-t-il, et voici que tu éloignes un de mes meilleurs dévots. Ce que tu lui as appris n’est pas une prière. La prière n’a rien à voir avec la Loi.  Elle est amour. L’amour est sa propre loi, il ne lui en faut aucune autre.

Midrash juif.



samedi 30 août 2025

Liturgie de la Parole 21e samedi TO-I Ste Jeanne Jugan : 30 août 2025

Introduction

Le jour est mémorable !
Je voudrais combiner les différents axes de cette journée.
D’abord, la rencontre des « amis d’Hurtebise » et le thème choisi « L’espérance ».
Ensuite, les lectures de la liturgie de ce samedi, sans omettre la Mémoire de la Vierge Marie.
Enfin, je souhaite honorer celle que le martyrologe cite en ce 30 août, une femme chère à mon cœur, Sainte Jeanne Jugan, la véritable fondatrice des Petites Sœurs des Pauvres, qui naquit en 1792 à Cancale, en Bretagne.
Je vais ainsi essayer de faire un tuilage de tout ceci, car, en fait, tout s’harmonise bien !
Comme le disait Jeanne Jugan : « En tout, partout, en toute circonstance, je répète : Dieu soit béni ! »
Déposons nos intentions et celles de notre monde… dans le chant des Psaumes.

Méditation

« Vous avez appris vous-mêmes de Dieu à vous aimer les uns les autres, et c’est ce que vous faites… ».
Ce conseil de Paul aux Thessaloniciens convient parfaitement à Sainte Jeanne Jugan !
Sa congrégation correspond à un déploiement de grande charité.
En effet, l’aventure a commencé très humblement, quand Jeanne avait 47 ans.
Elle menait avec deux autres femmes une sorte de vie commune, rythmée par la prière.
Dans ses allées et venues, elle remarquait la misère d’une quantité de pauvres gens.
À son époque, sans sécurité sociale, sans hospice, les rues de Saint-Servan comptaient un grand nombre de miséreux et de vieillards abandonnés.
Pendant l’hiver 1839, Jeanne écouta son cœur et eut l’intuition d’accueillir une première pauvre femme, paralysée et aveugle.
Elle l’installa dans sa propre chambre et grimpa au grenier pour dormir.
Puis une autre pauvre femme fut accueillie.
Jeanne se mit alors à quêter auprès des familles qu’elle connaissait.
Et de jeunes personnes, entraînées par son exemple, vinrent offrir leur service et se joignirent aux trois femmes valides.
Jeanne aimait contempler l’amour de Dieu, révélé dans les cœurs de Jésus et de Marie.
Elle s’ouvrait ainsi à la source du grand amour qui allait remplir sa vie et qui, par elle, se répandrait sur le monde.

La petite Communauté, avec son projet de vie, trouva un soutien en la personne d’un jeune vicaire de la paroisse, l’Abbé Le Pailleur, qui devint leur conseiller.
C’est alors que la communauté chercha un lieu plus grand.
Et ce fut le grand bond en avant : une vraie cascade de fondations !
En 1851, on comptait 300 sœurs, 15 maisons, 1500 vieillards logés et secourus.
Jeanne se montrait infatigable : les contacts pour recueillir les dons, la quête, les fondations…
Jeanne a une confiance immense ! Elle disait : « Dieu nous aidera ; c’est Son œuvre ».
Une telle expansion lui valut la reconnaissance de l’Académie.

Écoutons l’Évangile : « Un homme qui partait en voyage appela ses serviteurs et leur confia ses biens. À l’un il remit une somme de cinq talents, à un autre deux talents, au troisième un seul talent, à chacun selon ses capacités »
Lors de sa jeunesse, Jeanne déclina le mariage en déclarant à sa mère : « Dieu me veut pour lui. Il me garde pour une œuvre qui n’est pas encore connue ».
Tel était le talent qu’elle reçut.
Mais cette grande œuvre, l’Abbé Le Pailleur se l’appropria.
Il se donna à lui-même le titre de véritable fondateur et se fit reconnaître comme Supérieur général de la Congrégation.
Jeanne Jugan – Sr Marie de la Croix – fut alors évincée du Conseil, réduite à l’inaction, au silence et à la solitude.
Elle est envoyée à la campagne de Saint-Pern, non dans le quartier des autorités de la Congrégation, mais avec les novices.
Pendant 27 ans, elle est tellement oubliée que son entourage finira par croire qu’effectivement elle n’était pas la fondatrice ni la première Petite Sœur des Pauvres.
Alors même que tout lui était injustement retiré, elle trouva la paix et la sérénité en ayant fondé sa vie sur cette plénitude intérieure que nul ne pouvait lui ravir.
Elle se laisse façonner par Dieu en faisant un bon usage des événements qui peuvent nous purifier et nous libérer.
Elle partage aux novices et aux postulantes son expérience des humiliations ; elle leur dit : « Il faut être comme un sac de laine, qui reçoit la pierre sans résonner ».
Cette « œuvre inconnue (que Dieu lui gardait) », ce serait Jeanne elle-même.
Il ne s’agissait plus pour elle de faire une œuvre, mais de consentir à devenir elle-même l’œuvre de Dieu.
À la fin de sa vie, elle déclara à l’Abbé Le Pailleur, avec un engouement cachant probablement une grande souffrance : « Vous m’avez volé mon œuvre, mais je vous la cède de bon cœur ! ».

En cette Mémoire de la Vierge Marie, écoutons les derniers mots de Jeanne Jugan :
« Ô Marie, ma bonne mère, venez à moi. Vous savez que je vous aime et que j’ai bien envie de vous voir ! ».
Elle s’éteint en 1879 : la Congrégation comptait 2.400 Petites Sœurs.

Marie Jamet, associée à ses débuts, rétablira la vérité en confessant sur son lit de mort : « On m’avait dit d’agir ainsi… ».
Une enquête est ouverte : Jeanne Jugan est réhabilitée. Elle fut canonisée par Benoît XVI.

Prenons un temps de silence et rendons grâces à Dieu pour cette belle figure de sainteté, foyer d’amour et d’humilité…

Temps de silence

Notre Père 

 « Il faut être bien petites devant le bon Dieu, disait Jeanne… Tenez-vous devant le bon Dieu comme une petite grenouille… ». À son intercession, entrons, avec Jésus, dans la prière des enfants de Dieu…

Bénédiction 

Que le Dieu de l’Espérance nous bénisse et nous garde…

Sr Marie-Jean Noville



vendredi 29 août 2025

Liturgie de la Parole 29 août Martyre de saint Jean-Baptiste 

Lectures : Jérémie 1, 17-19 ; Psaume 70, 1-2.3-4a.5-6ab.15ab et 17 ; Marc 6, 17-29

Méditation

Tiré de la réflexion :  "Prions en Église" 
Nous célébrons la fête de la naissance au ciel de saint Jean-Baptiste et la réception des sacrements du salut. 

Jean le Baptiste : homme juste et saint. 
Hérode protégeait Jean, il aimait l’écouter, et à la fois Hérode en avait peur. Cependant, Jean est emprisonné pour avoir dit aux puissants qu’ils ne sont pas au-dessus de la morale, mais Hérode qui le craint, ne souhaite pas aller plus loin, c’est sa réputation mal placée et son souci de préserver sa réputation qui vont l’entrainer au-delà de la limite qu’il s’était fixée. Orgueil, pouvoir etc…
« Demande moi ce que tu veux dit Hérode à la fille d'Hérodiade. « La tête de Jean le Baptiste » répondit celle-ci.
Les manipulateurs qui sont capables d’attendre leur heure finissent généralement par obtenir ce qu’ils veulent des esprits divisés. 
Jean a eu le tort de rappeler ses devoirs de juifs à un prince régnant sur la Galilée et la Pérée en référence à la loi de Moise. Jean Baptiste dénonce la perversité calculatrice des gens du pouvoir. Voilà Hérode bien divisé.

 
Ce passage sur Hérode (6,14-29) se situe entre l’envoi des Douze (6,7-13) et leur retour (6,30). Marc a ainsi placé au cœur de la mission des apôtres, le martyr du Baptiste qui incarne ainsi le risque pris par les serviteurs de l’Évangile depuis Jésus jusqu’à ses disciples de tout temps.
Être serviteur comme Jean-Baptiste.
Prendre conscience que nous sommes habité d’ombres et de « lumières » 

Être serviteur de l’Église aujourd’hui n’est pas une évidence. Quel est alors notre mission et notre juste place dans ce monde en mutation ? Quelle place le Seigneur nous appelle t’il à prendre ?
Servir l’Église ne signifie pas seulement remplir des fonctions où accomplir des tâches. C’est nous mettre au service de Dieu, au service des autres. C’est accepter d’être signe et témoin de l’espérance thème demain de "la journée des amis"; c’est oser l’évangile avec simplicité, humilité, fragilité et surtout avec la certitude que le Seigneur conduit son peuple et nous précède.
Il y a des défis divers, et en tant que maman j’en connais. Cela me demande de la lucidité et du courage d’oser nommer que le Seigneur fait partie de ma vie…
Il y a des risques, le risque d’incompréhension, de rejet…risque de découragement, de moquerie etc… le risque du pouvoir et ainsi d’oublier l’essentiel…
Cependant Il y a surtout en nous le chemin de l’espérance. Notre place est celle d’être témoin fidèle dans cette « Vie » que Jésus nous propose, enraciné dans la prière, enraciné dans son « OUI », en lien et ensemble. 

Musique : El SHADDAI  
Brigitte le 29 août 25

mercredi 27 août 2025

Liturgie de la Parole 21e mercredi TO-I

Méditation

Je vous propose la méditation écrite par Sœur Marie-Christine en 2021,le lendemain de l'élection comme Prieure de Mère Marie-Jean: occasion de prier pour elle.  

https://partage-de-lectio.blogspot.com/2021/08/liturgie-de-la-parole-21e-mercredi-to.html
 

 lien pour la photo:

http://www.associationdemarie.org/blog/wp-content/uploads/2018/02/que-la-parole-de-dieu-senracine-1024x683.jpg 

mardi 26 août 2025

Liturgie de la Parole 21e mardi TO-I

Accueil : 1 Thessaloniciens 2, 1-8

Commentaire : Matthieu 23, 23-26

Jésus, Maître de vie, avait proclamée les promesses faites par Dieu, promesses qui concernent l’alliance de Dieu avec son peuple. Cette alliance est un engagement qui se manifeste dans la proclamation des béatitudes, autrement dit la proclamation du Royaume de Dieu offert à tous. Jésus en proclamant les béatitudes, par ses Paroles de vie engage à la fois son Père et lui-même.  Nous voyons et découvrons combien l’écoute de sa Parole qui est Bonne Nouvelle nous fait connaître, à la fois Jésus, sa fidélité à son Père et son Royaume, nous voyons aussi la cohérence dans ce qu’il fait par rapport à ce qu’il dit. 
Dans ce même Évangile de Mt au Ch 15, Jésus avait déjà proclamé « Avec vos traditions vous avez tué la tradition de Dieu » (cf. Matthieu 15,6). Jésus voit et dénonce ce qui ne va pas.
Alors, et parce que c’est nécessaire, l’extrait de l’Évangile de Mathieu que nous venons d’entendre vient mettre en évidence cette pédagogie de Jésus, une manière d’éduquer comme le ferait un père et une mère pour leurs enfants parce qu’ils les aiment.  
Jésus reconnaît nos qualités mais dénonce nos incohérences ; il dénonce l’hypocrisie quand nous agissons de manière contradictoire par rapport à ce que nous disons ; quand il n’y a pas cette harmonie qui fait coïncider l’intérieur avec l’extérieur.
Être dans la vérité c’est harmoniser notre cœur avec nos pensées et nos actes. Vivre dans la vérité c’est combattre l’hypocrisie. C’est ce que Jésus dénonce : la duplicité du cœur.
Un cœur qui se fourvoie au point d’être en contradiction avec le commandement d’amour essentiel qui traverse la bible comme un fil rouge : « Aimer vous les uns les autres comme je vous ai aimé » (Jean 15,12 ; cf. 13,34) ce qui revient à dire « Aimer Dieu et son prochain comme soi-même » (cf. Matthieu 22,37-38). Dans l’Évangile de Jean Jésus dit « Celui qui écoute ce que je dis et fais ce que je fais, celui-là il m’aime. Or celui qui m’aime sera aimé de mon Père » (cf.Jean 14,21)
Finalement, si Jésus relève ce qui est bon et non négligeable dans la connaissance des paroles de vie, il faut entendre son invitation à laisser tomber toute forme de religiosité maladive. Les commandements qui sont des paroles de vie sont là pour nous amener à Jésus, pour recevoir les leçons du Maître de manière à servir dans la nouveauté de l’Esprit-Saint. L’Esprit-Saint qui est Esprit de Vérité, de justice, de Paix et de Vie.
Le Christ avec sa vitalité, c’est-à-dire son Esprit-Saint, devient la Loi Vivante. Il est Celui qui nous précède et accompagne, par pure grâce disons nous, pour la mise en pratique de toutes ses inspirations. Choisir d’être vraiment chrétien ce n’est donc pas d’être irréprochable par rapport à des pratiques religieuses et des intentions qui sont bonnes mais c’est mettre le seul accent de sa vie sur la pratique d’intimité permanente avec Jésus-Christ.
 
C’est dramatique de voir confondre la religion avec une morale préfabriquée, faite d’obligations et d’interdits qui, loin d’engager à vivre Jésus-Christ, amène à l’oublier et à donner l’impression qu’être chrétien c’est essentiellement faire ou ne pas faire des choses. « La lettre tue, l’Esprit fait vivre » disait St-Paul dans sa 2ème lettre aux Corinthiens (2 Co 3,6).  Il s’agit de bien éprouver ce que représente psychologiquement cette mise à mort et cette mise en vie.  
A quoi cela nous sert de venir prier à la chapelle si, à la maison ou en communauté, je suis toujours de mauvaise humeur, si je ne respecte pas celle qui partage ma vie, si je ne tiens pas compte des autres et ne partage pas avec ceux qui ont besoin de mon aide, si je dis du mal des autres et propages des rumeurs non fondées, si je dénonce l’injustice sans m’impliquer vraiment… Le vrai service de Dieu c’est le service de l’homme.
Jésus est cet homme, l’Emmanuel, venu nous libérer de ce qui nous asservit pour faire de nous des fils et des filles de Dieu, pour nous ouvrir les portes du Royaume de Dieu. 

Raymond le 26 aout 25


lundi 25 août 2025

Liturgie de la Parole 21e lundi TO-I

Médiation de Sœur Scholastique du Carmel Saint Joseph

https://www.carmelsaintjoseph.com/sermons/matthieu-23-13-22-5/  

« Frères, n’oubliez pas cette parole de réconfort, qui vous est adressée comme à des fils : Mon fils ne néglige pas les leçons du seigneur, ne te décourage pas quand il te fait des reproches. Quand le seigneur aime quelqu’un, il lui donne de bonnes leçons ; il corrige tous ceux qu’il reconnait comme ses fils. » Hébreux 12,5-6
La deuxième lecture d’hier, nous incité à tendre l’oreille aux leçons du seigneur dans lesquelles nous trouvons la source de réconfort pour notre marche. C’est en cela où nous sommes et nous devenons davantage pèlerin d’espérance.
« Malheureux êtes-vous, guide aveugles »
Dans l’évangile de ce jour, nous rencontrons jésus qui n’est pas du tout tendre dans ses paroles face aux scribes et pharisiens qu’il juge « d’hypocrites ».

« Hypocrisie et dissimulation », ©CSJ  

Et il prononce les paroles de malédictions…
Hypocrite vient du grec ancien « hupokritês » qui signifie « acteur » ou « celui qui répond » et décrit ainsi l’idée de jouer un rôle ou d’agir de manière non sincère.
Nous sommes ici dans « les jeux de rôle » et « le faire semblant ». Quelques caractéristiques découlent de l’attitude de l’hypocrite : dissimulation de la vérité, contradiction entre les paroles et les actes, intérêt personnel, fausse piété ou vertus… L’hypocrite porte les masques et vit en dehors de lui-même. Quel esclavage ! Quel malheur !

Le cri de jésus dans cet évangile rejoint l’hypocrisie en nous et autour de nous et nous appelle à quitter le camp de malheureux pour accueillir le bonheur qu’il nous propose à travers une vie authentique, vrai et simple. Qui facilite à l’autre l’accès au salut et s’accrocher à ce qui est plus important dans sa relation avec Dieu et avec les autres.
Saint Augustin, en se concentrant sur la simplicité de Dieu, affirme que l’hypocrisie va à l’encontre de cette simplicité divine. L’hypocrisie se détourne de la vraie paix qui est l’union avec Dieu.


dimanche 24 août 2025

Liturgie de la Parole 20e Dimanche Année C

Commentaire

Je vous propose les deux commentaires de Sœur Myrèse sur ce blog pour  Luc 13, 20-23

 http://lhomeliedudimanche.unblog.fr/2019/08/18/la-porte-etroite/ 

Image: (lien ci-dessus) Si vous avez un jour le bonheur d’aller à Bethléem, vous verrez l’étrange entrée de la basilique de la Nativité : une porte si basse qu’il faut se courber – voire se casser en deux pour les plus grands – si on veut la passer. C’est bien sûr un écho de notre parabole d’aujourd’hui (Luc 13, 22-30), qui appelle à l’humilité pour entrer dans le royaume des cieux.

https://partage-de-lectio.blogspot.com/2012/11/faisant-route.html

Faisant route

Et il passait par villes et villages, enseignant et faisant route vers Jérusalem.
Luc 13, 22

Viens Esprit de vie, donne-moi d’accompagner Jésus sur sa route.
Viens Esprit, enseigne-moi sur le chemin de la vie
Viens Esprit de feu, oriente mes pas, vers la Pâque de Jésus

Et il passait par villes et villages,
Jésus fait route. Il est missionnaire itinérant sur les routes de Palestine. Il passe non seulement par les villes, mais aussi par les villages. Aucun n’est écarté du chemin. Les anciens ont souvent présenté la vie comme un chemin. Et la décision morale comme le choix entre deux voies (voir par exemple le psaume 1). Pour Jésus il ne semble pas y avoir la moindre hésitation, comme si la voie était unique. Luc 9, 51 nous avait signalé la ferme résolution de Jésus quant au choix du chemin.

enseignant
Jésus marche, mais aussi il enseigne. Il n’est plus fait mention ici de guérisons, d’exorcismes, mais d’enseignement. Comme s’il y avait une certaine urgence. Qu’enseigne-t-il ? Luc nous a donné plusieurs fois l’occasion de nous mettre à l’écoute des paroles de Jésus, il ne le refait pas ici. Mais il nous laisse entendre combien la parole de Jésus est importante, combien sa mission lui est comme un impératif.

et faisant route vers Jérusalem
Depuis le chapitre 9,51 Luc nous parle du chemin de Jésus, vers Jérusalem. Un chemin qu’il a pris résolument. Il est en route vers sa Pâque, et entraîne ses disciples sur ce chemin.

Seigneur, conduis-moi sur ce chemin.
Donne-moi de partager ta passion, ton don total de toi-même, pour notre salut, pour le salut de l’humanité entière.
Seigneur, que ma vie soit une marche à tes côtés, à l’écoute de ta Parole. 
 

 Par la porte étroite

Quelqu’un lui dit alors : « Seigneur, sont-ils peu nombreux les sauvés ? » Il leur dit : « Luttez pour entrer par la porte étroite, parce que beaucoup, je vous le dis, chercheront à entrer et n’en seront pas capables. »
Luc 13, 23-24

Viens Esprit de force et de persévérance
Viens Esprit de désir et d’amour

Quelqu’un lui dit alors :
Quelqu’un… cela peut être toi, ou moi, ou… qui vient à Jésus pour l’interroger ? Nous sommes sur la route de Jérusalem, où Jésus s’apprête à affronter l’opposition, à connaître le rejet, la mort. Qui marchera avec lui ?
 « Seigneur, sont-ils peu nombreux les sauvés ? »
La question du salut est importante. Qui ne souhaiterait être sauvé ? Combien seront sauvés ?  C’était paraît-il une question fort débattue à cette époque. Mais est-ce là la bonne question ?  

 Il leur dit : « Luttez pour entrer par la porte étroite,
Jésus plutôt que de répondre de manière chiffrée à la question, réponds par une exhortation : luttez… Le verbe grec sous-jacent, sera le même que celui utilisé plus loin, pour dire l’agonie de Jésus à Gethsémani. Luttez, la vie avec Jésus n’est pas de tout repos, il n’y a pas d’avenue bien tracée, mais une porte étroite. Jésus ne veut pas rendre le chemin difficile, mais il constate qu’il est difficile. Il nous invite, nous encourage. Ne t’étonne pas si le chemin est malaisé, si le passage est resserré. Lutte seulement avec persévérance, pour marcher avec Jésus.

 parce que beaucoup, je vous le dis, chercheront à entrer et n’en seront pas capables. »
Beaucoup désirent le salut, la vie heureuse. Mais il faut encore que ce désir nous pousse en avant, il faut encore que la recherche soit décidée. La vie tournée vers le Père, la vie du disciple de Jésus nécessite non seulement un désir, mais une décision, une force résolue.
Seigneur, tout est grâce, tout est don, mais en même temps, tout est livré entre nos mains. Tu ne veux pas nous donner le salut, nous l’imposer, sans qu’il n’y ait de notre part, désir, lutte pour marcher sur ton chemin. Tu nous as créés libres, co-artisan de notre salut. 

Viens Seigneur, lutte avec moi, pour que je marche avec toi ! Viens me dépouiller de tout ce qui entraverait mon passage par cette porte étroite.
Viens Seigneur, sois ma force et mon courage, que mon désir de toi, l’emporte sur toute peur, sur tout découragement, sur toute faiblesse.  

Sr Myrèse écrits les 9 et 10 novembre 2012

samedi 23 août 2025

Liturgie de la Parole 20e samedi TO-I

Le hapax du jour : καθηγητής (Mt 23, 10)

Lectures : (Ruth 2, 1-3.8-11 ; 4, 13-1) – Psaume 127 - (Matthieu 23, 1-12)

Commentaire 

Quand Aimé Césaire invente le mot « négritude » (1), il accomplit ce que la poésie peut faire de plus puissant : il nomme l’expérience, la souffrance, la mémoire des peuples africains et afro-descendants, avec un mot tout ce qui a d’unique et de nouveau. Avec ce mot, il ne décrit pas seulement une réalité et une identité jusque-là non désignées : il la nomme, l’appelle à l’existence, la fait surgir de la conscience collective, pour donner dignité et avenir. C’est ce qu’on appelle « un hapax poétique fondateur ». Il sort de la bouche du poète et devient vie, mouvement, libération. 
Quand Matthieu écrit « Ne vous faites pas donner le titre de maîtres, car vous n’avez qu’un seul maître, le Christ » (Mt 23, 10), il n’utilise pas le mot « didaskalos » qui veut dire « maître, enseignant, celui qui enseigne la loi ou la doctrine ». Il n’utilise pas non plus « kyrios »,  « maître, seigneur », le titre de respect que l’on donne à une autorité divine. Il utilise un mot inédit, un mot qui n’apparaît qu’une seule fois dans l’Écriture : "katēgētēs " (καθηγητής).
Avec ce « katēgētēs», Matthieu nomme ce qui n’a jamais été nommé de Jésus dans l’environnement juif : Jésus est celui qui accompagne sur le chemin vers Dieu. Lui seul. Ce n’est pas la pratique de la Torah qui conduit à Dieu, n’en déplaise aux pharisiens et aux scribes ! C’est la relation avec Dieu, en Jésus, Christ. 
« Ne vous faites pas donner le titre de maître », de katēgētēs, dit-il, n’ayez pas cette posture intérieure, car le Christ ressuscité est le seul capable de faire vraiment cheminer un croyant. C’est l’expérience vécue par les disciples d’Emmaüs : une rencontre qui conduit à Dieu. 
Et c’est là mon lien avec le hapax poétique fondateur d’Aimé Césaire : le hapax de Matthieu appelle à la reconnaissance de ce qui est, qui était, mais n’était pas vraiment exprimé, voire compris. Il fait surgir cette réalité de l’expérience individuelle et collective des disciples et des foules. Il leur donne ainsi dignité et avenir en Dieu. Le mot qui sort de la bouche de l’évangéliste devient vie, mouvement, libération. 
 

Cela peut sembler évident, mais avons-nous vraiment saisi ce que katēgētēs implique ?
    - Seul le Christ est l’ultime référence qui conduit la vie spirituelle d’un autre. Matthieu (Mt 23, 10) met en cause tout monopole humain sur la direction spirituelle. Que vivons-nous ?
    - Il y a maître et maître, maître et guide, magister et katēgētēs … Saint Jérôme, dans la Vulgate a traduit « katēgētēs» par « magister ». Cela a nourri pendant plus d’un millénaire tout la conception pédagogique et académique de l’autorité doctrinale chrétienne que nous connaissons (« le Magistère de l’Église »). Alors que le mot grec parlait du rôle de guide spirituel du Christ – ce qui est resté en Orient -, nous vivons dans un monde doctrinal ecclésial propre à l’Occident. 
Je vous laisse réfléchir à deux questions : 
Quand nous avançons dans notre vie spirituelle, dans le silence de notre cœur, à qui remettons-nous nos pas?? Laissonsnous le Christ, notre unique maître, notre guide intérieur, nous accompagner avec humilité et liberté??
Dans notre service aux autres, comment assumons-nous notre mission, notre engagement?? Cherchonsnous à suivre ou à faire suivre les règles, les directives ou les traditions, ou laissonsnous le Christ guider notre cœur, pour agir librement et pleinement, avec authenticité et amour??

Isabelle le 23 août 25

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(1) Aimé Césaire (1939) – Cahier d’un retour au pays natal



vendredi 22 août 2025

Liturgie de la Parole 20e vendredi TO-I

Ouverture

L’amour a beaucoup de noms. Tendresse et affection, bonté, douceur, patience, pardon, fidélité, loyauté, service, persévérance, disponibilité… Les deux textes de ce jour nous parleront d’amour. Aimer, c’est choisir. Aimer, c’est croiser le divin et l’humain. Entrons dans l’intelligence des Écritures en chantant les psaumes.

Résonances

Aimer, c’est choisir. Telle est une des leçons du livre de Ruth. Après les histoires sombres et meurtrières du livre des Juges, le livre de Ruth vient comme un soulagement, une respiration, une bulle d’air pour sortir de l’impasse et reprendre le fil de l’histoire du salut. Reprendre le chemin d’Abraham…
A la manière d’Abraham, Ruth quitte son pays, sa parenté, ses dieux, pour aller vers un pays inconnu. Mais à la différence d’Abraham, Ruth n’est pas seule. Elle accompagne Noémi, elle s’attache à elle et, par le fait même, à son peuple, à son Dieu. « Où tu iras, j’irai ; où tu t’arrêteras, je m’arrêterai ; ton peuple sera mon peuple et ton Dieu sera mon Dieu ». Par son audace, par la finesse de son intuition, par la justesse de son attitude, Ruth va permettre à Noémi et à sa famille de sortir de l’impasse mortifère de la stérilité. Pour elle, aimer, c’est choisir, et choisir, c’est s’engager dans la fidélité. Les sentiments, l’affection, soutiennent l’amour, mais la durée dans l’alliance est le résultat d’un choix libre et d’une volonté. La réponse de Dieu sera merveilleuse : fécondité d’une lignée qui donnera naissance au Messie.
Dans le même registre de l’amour, pour répondre à la question du scribe sur le grand commandement, Jésus nous donne une leçon d’exégèse. Observons comment Jésus lit l’Écriture. À la manière des rabbins, il rapproche des versets bibliques qui se ressemblent ou se raccrochent par un mot-clé : « tu aimerais ». Dt 6,5 et Lv 19,18.
Jésus ne fait pas que rapprocher ces deux versets, il les superpose, afin qu’ils s’éclairent l’un par l’autre, et qu’ensemble ils n’en fassent plus qu’un. En préparant cette célébration, je me suis inspirée d’une homélie de François Cassingéna-Trévedy. Il écrit : « Prenant en main, prenant par cœur la Torah, Jésus met deux versets bout à bout, comme un artisan, et voilà que un plus un font un et qu’une seule Torah est laissée à notre contemplation comme à notre mise en œuvre… » (1).
Jésus conclut : « de ces deux commandements dépend toute la Loi, ainsi que les Prophètes ». Plus littéralement : « est suspendue toute la Loi… ». François Cassingéna-Trévedy fait ici, à son tour, un rapprochement inattendu : un rapprochement avec le corps du Christ suspendu à la croix : « Le corps de la Torah est suspendu à l’articulation à la croisée de l’amour de Dieu et de l’amour du prochain, comme le corps de Jésus est suspendu à la croix. Charpentier de la Torah, Jésus croise l’amour de Dieu et l’amour du prochain, Jésus croise les deux montants de l’amour et, finalement, se met lui-même à cette croisée » (2).
En Jésus, aimer, c’est croiser l’humain et le divin. Son amour humain pour nous est divin. Son amour divin pour nous est humain. Comme lui, nous pouvons aimer Dieu en aimant le prochain, et donner ainsi au prochain l’amour de Dieu lui-même. Et nous pouvons, en aimant le Christ, aimer à la fois Dieu et le prochain. Ainsi, l’amour devient la voie royale de notre ressemblance avec Dieu.
Prière
Seigneur, tu nous appelles à avancer sur la voie royale de l’amour, à choisir la fidélité à ton alliance, à croiser concrètement l’humain et le divin. Béni sois-tu de nous y devancer. Accueille notre désir de te suivre et consolide nos bonnes intentions. Que ton Esprit tisse sur notre monde la toile souple et solide de ton amour d’alliance toujours renouvelé, toujours vivant.

Sœur Marie-Raphaël écrit le 25 août 2023

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(1) François Cassingéna-Trévedy, Sermons aux oiseaux, Ad solem, 2009, p. 230.
(2) Id. p. 231

jeudi 21 août 2025

Liturgie de la Parole 20e jeudi TO-I

Lectures :  Juges 11, 29-39a, Matthieu 22, 1-14

Introduction

Dans le livre des Juges, Jephté nous apprend qu'avant de promettre quelque chose, il faut réfléchir. L'Esprit de Dieu s'empare de lui... Est-ce qu'il lui commande de franchir la frontière des fils d'Ammone ? C'est ce que Jephté fait en tout cas. Il promet à Dieu de tuer la première personne qui sortira de sa maison si Dieu lui permet de vaincre les fils d'Ammone. N'est-ce pas un peu facile de promettre quelque chose qui ne touchera pas à sa personne ? Il n'imaginait pas que la première personne, ce serait sa propre fille. « Hélas ma fille, j'ai parlé trop vite devant le Seigneur, tu m'accables, tu fais mon malheur » (elle n'avait pourtant rien promis, elle).
Quelle parfaite obéissance à son père, de la part de cette fille « puisque le Seigneur t'a vengé de tes ennemis, traite-moi selon ta parole ».
Dans l'évangile de Mathieu, Jésus compare le Royaume à un roi qui célèbre les noces de son fils. « Beaucoup sont appelés, mais peu sont élus » dit-il... Cette phrase est-elle une « bonne nouvelle ?
Avant d'y réfléchir, chantons les psaumes en rendant gloire à Dieu qui nous aime par-dessus tout.

Commentaire

Nous sommes donc invité(e)s à un banquet, à une fête joyeuse, nous sommes fait(e)s pour le bonheur. La vie est-elle une fête ? Jésus ne le dit pas, il dit que nous sommes invités à la noce, à un mariage d'amour entre lui et nous. Nous pouvons nous retrouver dans chacun des personnages de cette noce que Jésus raconte. 
Le banquet est prêt, nous sommes invités, il nous espère mais il nous arrive d'être ceux ou celles qui n'entendent pas l'appel. Il nous arrive d'être concentré(e)s sur autre chose « l'un à son champ, l'autre à son commerce » mais ceux qui maltraitent les serviteurs, qui sont-ils ? « Les autres, le camp des purs parmi les purs de la religion, … des intégristes, ceux qui pensent détenir la vérité de Dieu dans leur doctrine et qui ne veulent surtout pas la mettre en questionnement... nous ne sommes pas immunisés contre ce risque » .(1)
Dieu nous appelle aussi par ses serviteurs, nous recevons le témoignage d'autres personnes
Et nous nous trouvons parfois à la croisée des chemins, devant plusieurs routes qui s'ouvrent devant nous, il faut alors chercher, s'interroger « ce sont les personnes qui ont faim et soif de ce qui pourrait nourrir leur capacité à voir clair et à se décider ».(1)
Et cet invité qui n'a pas l'habit de fête, qui est-il ? Il ne s'est pas préparé, il n'a pas compris que c'était une grande fête, un festin hors de l'ordinaire. « Il n'a pas joué le jeu, il représente ce qui peut être tordu, incohérent dans notre vie et notre attitude avec les autres et vis-à-vis de Dieu ». (1)  Il n'avait pas revêtu le Christ.
Il garde le silence, il n'a peut-être pas vraiment envie de rester, s'il s'était excusé, s'il avait demandé pardon pour ce manquement, le maitre l'aurait peut-être accueilli et revêtu du vêtement adéquat.
Nous sommes donc comme toutes ces personnes citées dans ce texte, nous sommes parfois occupées à autre chose, nous sommes à la croisée des chemins, nous sommes aussi les serviteurs. Dieu appelle la multitude, il appelle les bons comme les méchants, il appelle le bon et le mauvais qui est en nous. « A part l'intégriste et le tordu, il n'y a rien d'autre en nous qui pourrait gêner Dieu... A force de nous appeler, d'ouvrir devant nous des bifurcations nouvelles, ...Dieu nous aide à grandir en grâce, en force et en sagesse » (1)
Dieu nous appelle, le royaume est ouvert à tous mais il faut pour y entrer, un état d'esprit, symbolisé par le vêtement de noces. « Toi qui aimes la vie, toi qui veux le bonheur, réponds en fidèle ouvrier de l'évangile et de sa paix... » (2)

Invitation au Notre Père

Prions Dieu notre Père avec les mots appris par Jésus.

Danièle le 21 août 25

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(1) Commentaire du Pasteur Marc Pernot

(2) https://www.chantonseneglise.fr/chant/91/ecoute-la-voix-du-seigneur




mercredi 20 août 2025

Liturgie de la célébration du Jubilé de Sœur Jean-Baptiste (Suite)

 Accueil et homélie de Mgr Joseph de Metz-Noblat

Mot d’accueil

C’est avec une joie particulière que nous nous retrouvons ce midi, pour chanter ensemble la gloire de Dieu et rendre grâce pour cinquante années de profession monastique de Sœur Jean-Baptiste.
Je ne suis pas l’évêque de Namur, (rires) certains pourraient le croire. Pour ceux qui ne me connaîtraient pas, je suis Mgr Joseph de Metz-Noblat, évêque de Langres, en France. Il s’avère que Sœur Jean-Baptiste et moi nous nous connaissons depuis presque quarante-cinq ans. Elle m’a connu, jeune séminariste, assistant à la vie de l’Abbaye d’Oriocourt, participant aux offices, du temps de feue Mère Jeanne d’Arc, qui repose ici, si mes souvenirs sont exacts, et pour laquelle nous avons évidemment une petite prière. Et quand j’ai été ensuite ordonné prêtre, j’ai pris l’habitude de venir régulièrement à l’Abbaye d’Oriocourt pour une journée de désert. Le désert porte fruit, d’ailleurs nous savons que c’est cela à quoi la vie monastique nous appelle, car elle est une vie au désert, nous l’entendrons d’ailleurs tout à l’heure dans la première lecture. 
Rendre grâce pour cinquante années, c’est regarder bien sûr tout ce qui a été beau durant ce temps, mais c’est aussi reconnaître la pauvreté de notre existence. Nous ne pouvons pas tenir dans la vie humaine, dans la vie chrétienne, dans la vie monastique, nous ne pouvons pas tenir sans la force même de Dieu. Bien au-delà de nos mérites, c’est le Seigneur qui nous donne la capacité de la fidélité. 
Voilà pourquoi au début de cette célébration nous nous tournons humblement vers Lui pour demander sa miséricorde, afin que, par le don de son amour, il nous stimule encore, jusqu’à la fin de nos jours, dans cette fidélité.

Homélie

Je suis sûr que vous entendez régulièrement cette réflexion, à propos de la vie religieuse : des sœurs infirmières, oui, des sœurs enseignantes, pourquoi pas, mais des moniales, à quoi ça sert ? Combien de fois, entend-on ainsi le bon peuple se poser de graves questions sur l’utilité d’une vie monastique.
Et voilà que les lectures que nous avons entendues donnent le sens au mot. Dans le livre d’Osée : « mon épouse, je vais la conduire au désert, et je lui parlerai au cœur ». L’épouse, c’est l’épouse de Dieu, le peuple de Dieu, c’est l’Église. L’épouse, c’est aussi chaque âme en particulier, chaque fidèle. Et puis plus particulièrement, il y a cet appel à une vie dans le désert, qui est une vie consacrée. En fait, ceux qui bénéficient de cet appel portent l’ensemble de l’Église. Et, en portant l’ensemble de l’Église, ils permettent à toute l’Église de comprendre ce cœur à cœur avec le Seigneur.
La célèbre instruction (1) Cor Orans, que vous connaissez par cœur, mes sœurs, dans laquelle il y a deux trois paragraphes qui sont excellents, le reste étant peut-être un peu trop juridique, dit : « La vie des moniales contemplatives, engagées dans la prière d’une manière très spéciale, afin de garder le cœur constamment tourné vers le Seigneur, dans l’ascèse et dans le fervent progrès de la vie spirituelle, n’est rien d’autre qu’une tension constante vers la Jérusalem céleste, une anticipation de l’Église eschatologique, dirigée vers la possession et la contemplation du visage de Dieu. La communauté d’un monastère de moniales, placée comme une ville au sommet d’une montagne, et comme une lampe sur un lampadaire, quoique dans la simplicité de sa vie, représente visiblement le but vers lequel marche toute la communauté ecclésiale. Ardente dans l’action et consacrée dans la contemplation, elle avance, sur les chemins d’aujourd’hui, les yeux fixés sur la récapitulation future de tout dans le Christ. (2) »

Nous l’avons entendu, dans le livre d’Osée et dans la lettre de saint Paul, qui nous disait encore : « recherchez les réalités d’en haut ».  Cela nous dépasse complètement. Il faut bien reconnaître que ce n’est pas par nos propres moyens, que nous sommes capables de vivre une telle orientation. Je vous le disais à l’instant en nous préparant dans la célébration pénitentielle, que seul le don de Dieu nous permet de vivre une telle disposition du cœur. Seul le don de Dieu nous permet de réaliser que nous ne la vivons pas d’abord pour nous, mais que c’est pour toute l’Église que nous la vivons. Seul le don de Dieu nous permet de comprendre que, à travers l’Église, c’est le monde entier qui est orienté vers le Père. Et qu’ainsi il y a comme une imbrication des différents étages de notre existence, qui nous entraîne à vivre cette contemplation, ce face à face. Il nous est bon de nous en souvenir de manière à ne pas, à un moment ou à un autre, tomber dans l’acédie ou dans une forme de routine, car nous savons très bien que vivre au même endroit pendant des années, cela peut conduire à une forme de routine. Raviver sans cesse l’appel de Dieu, c’est réentendre cet appel à nouveaux frais.

Et voilà qu’un jubilé est l’occasion pour nous de réentendre cet appel. Même si nous sommes de simples fidèles, nous comprenons que cet appel s’adresse à tous ; le monde entier est appelé à rentrer dans la contemplation de la face de Dieu. D’ailleurs le psaume (3) le demande : « mon âme a soif du Dieu vivant, quand le verrais-je face à face ? » Mais si tout le monde est appelé, quelques-uns, quelques-unes vont le montrer déjà en anticipation.
Vivre dans l’eschatologie n’est jamais tout de même quelque chose de facile, parce que, à la fois, nous devons garder les pieds sur terre et avoir le cœur dans le ciel.
Heureusement, il y a la vie communautaire. La vie communautaire est une grâce… ou une épreuve. On sait bien que la vie communautaire, mais dans une famille aussi, dans toute famille, la vie familiale n’est jamais un petit nuage, mais au contraire, elle est le lieu à la fois d’amour, d’affection et parfois de grandes tensions malheureusement. En fait la vie monastique prend bien son sens dans cette vie communautaire qui en est le support. Et vous, mes sœurs, vous avez la grâce, la chance, de bénéficier de la Règle que votre père saint Benoît vous a laissée. Saint Benoît, dont on connaît l’expérience fructueuse, a permis que la finalité de la vie contemplative puisse être concrétisée dans la manière de vivre en commun. 

Cinquante ans de profession. Sœur Jean-Baptiste, vous pouvez vous réjouir évidemment de ces cinquante années passées. Peut-être sont-elles passées plus vite que vous ne le pensiez. Je ne sais pas quel était votre état d’esprit il y a cinquante ans quand vous avez prononcé les premiers vœux en disant au Seigneur : « Me voici ». C’est vrai que, quand on a vingt ans, cinquante ans cela paraît très, très loin ; et puis, cinquante ans après, on se dit que c’était avant-hier seulement. 
Ces cinquante ans n’ont pas été cinquante ans sur un petit nuage. Il y a eu, certes, des grands temps, des temps de grâces, des moments forts, qui vous ont permis, vous ont relancée sans cesse dans cette fidélité au Seigneur. Et puis il y a eu des temps d’épreuve. Je pense que votre abbatiat n’a pas été si simple que cela. Je fais une petite parenthèse à propos du pape : je ne sais pas si vous avez vu (ici certainement pas, mais les fidèles) le film « Conclave (4) ». Dans ce film, on a l’impression que tous les cardinaux n’ont qu’une envie, c’est de devenir pape ! Je peux vous dire que les cardinaux, ils n’ont qu’une envie, c’est que l’autre devienne pape, et que celui qui est choisi, il se dit : « mais qu’est-ce que j’ai fait au Bon Dieu pour qu’il m’arrive une chose pareille ?! » De fait, dans les responsabilités qui nous incombent, nous pouvons nous demander : « qu’est-ce que j’ai bien fait au Bon Dieu ? » Justement, c’est Lui, c’est encore Lui qui nous permet de vivre la fidélité et d’assumer la responsabilité qui est la nôtre, avec les faiblesses humaines. Il y a d’ailleurs, et il faudrait la re-méditer, la belle lettre d’Aelred de Rievaux, sa prière, au moment où il a été élu comme abbé. Il y dit, en substance : « mais Seigneur, qu’est-ce qu’il t’a pris ? Ou tu veux mon malheur, ou tu veux le leur. Donc, puisque, ils m’ont choisi comme abbé, eh bien, c’est Toi le sera ! » Et il a cette très belle formule : « Apprends-moi à partager les faiblesses des faibles… » Il faut reprendre aussi les recommandations de saint Benoît dans sa Règle, sur la manière de se tenir de l’abbé. 

Donc un moment de joie et d’épreuve. Puis, il y a eu pour vous, Sœur Jean-Baptiste, cette rude épreuve qu’a été la décision de devoir fermer la communauté d’Oriocourt, et qui reste, effectivement, toujours un souvenir difficile. Mais, le grain de blé, pour produire du fruit doit mourir. Et là, vous êtes entrée vraiment dans la compréhension de la Passion du Seigneur et de sa Résurrection. Car la Résurrection n’est pas la réanimation, n’est pas même la réincarnation. Souvent nous confondons. Spontanément, nous espérons que ce qui meurt va reprendre vie comme c’était avant. Or, la vie de ressuscité que nous propose le Christ est une vie qui est transcendée, une vie en esprit dans le Seigneur. La résurrection, ça n’est pas simplement le fait d’avoir retrouvé un peu de monde, ou même de s’être transplanté, c’est la mort totale à soi-même, pour entrer dans la Vie. Et c’est ce que vous avez appris, là, dans cette épreuve qu’a été la fermeture ; peut-être aussi continuez-vous à l’apprendre. Et chacun de nous a à comprendre que c’est dans l’abandon de soi que nous trouvons la véritable vie. « Celui qui veut garder sa vie la perdra, celui qui la perd à cause de moi et de l’Évangile, la trouvera. (5) »

Longue, longue entrée, mais, rassurez-vous… Alors que saint Antoine, fondateur de la vie monastique, mort centenaire, s’apprêtait à passer de vie à trépas, un des moines qui étaient là lui dit : « père, tu peux t’en aller tranquillement. » Saint Antoine a répondu : « Ah non, c’est dommage, je commençais seulement à me convertir ».
Alors, puisse plaire à Dieu, Sœur Jean-Baptiste, que, avec autant de vie dans le désert que saint Antoine, vous puissiez aussi dire : « je commençais seulement à me convertir ». Parce que finalement c’est un long chemin. Je m’arrête simplement en citant Sœur Geneviève Gallois dans sa célèbre Vie du petit saint Placide, à propos de la prière : « Prier, dit le Seigneur, c’est passer ta vie à passer dans la mienne »

Nous avons demandé, dans la prière d’ouverture, que sa vie devienne la vôtre. Il y a une osmose qui se fait petit à petit. En fait, quand notre vie sera totalement prise dans la sienne, nous ne nous en rendrons même pas compte, tellement nous serons dans sa joie.
Alors finalement, à quoi servent les moniales ? Ce que nous pouvons bien sûr répondre à ceux qui vous entourent : l’utilité des moniales n’est pas une utilité matérielle, elle vient d’utilité profonde, spirituelle, car grâce à la vie monastique, nous anticipons déjà la joie en Dieu. Malgré les faiblesses, malgré les bassesses, malgré tout ce qui fait notre humanité de chair et de sang, voilà que nous sommes tous appelés à entrer dans la plénitude. Le chemin que vous nous montrez, mes Sœurs, le chemin que vous nous montrez, Sœur Jean-Baptiste plus particulièrement en ce jour, au bout de cinquante ans de vie monastique, est un chemin qui descend ; car nous savons que l’échelle des moines, n’est pas une échelle qui monte, mais c’est l’échelle de l’humilité, c’est donc une échelle qui descend. Que ce chemin nous stimule dans notre propre désir de conversion. Que nous aussi nous puissions rendre grâce, en prenant sur nous le joug que le Christ nous donne. Nous irons allègrement : son joug est en effet facile à porter et son fardeau léger. Amen.

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(1) Instruction de la Congrégation pour les Instituts de Vie consacrée et pour les Sociétés de vie apostolique sur la vie contemplative féminine (Pâques 2018)
(2) Instruction Cor orans §§ 158 et 159
(3) Psaume 41/42, 3
(4) Film d’Edward Berger, sorti en France le 4 décembre 2024
(5) Marc 8, 35