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vendredi 25 juillet 2025

Liturgie de la Parole 25 juillet fête de saint Jacques 

Évangile : Matthieu 20, 20-28

Homélie 

      Souvent, je me suis demandé si saint Jacques, le jour de sa fête, avait du plaisir à s'entendre rappeler cet épisode qui n'est peut-être pas vraiment à son honneur. Certes, la liturgie a eu la délicatesse de préférer au récit de Marc la version de Matthieu, qui met la demande sur le compte de sa mère, ce qui le dédouane un peu. Mais Jésus ne s'y trompe pas et ce n'est pas la mère qu'il interroge ensuite, mais ses deux fils : "Pouvez-vous boire la coupe que je vais boire ?"
      
      La requête des apôtres Jacques et Jean peut surprendre. Si elle exprime une simple tendance à la course aux honneurs, elle a quelque chose de ridicule. Mais elle pourrait avoir une autre portée, beaucoup plus sérieuse et aussi plus tragique. Elle pourrait signifier une grave contradiction entre deux manières de concevoir la mission de Jésus. Jean-Baptiste leur avait promis un Messie qui allait mettre de l'ordre, opérer un grand nettoyage, amasser le grain dans son grenier et brûler la paille. Et Jésus trouve qu'il vaut mieux laisser l'ivraie pousser avec le bon grain. Jean-Baptiste leur avait annoncé que la cognée se trouvait déjà à la racine des arbres et que tout arbre qui ne portait pas de fruit allait être coupé et jeté au feu. Et Jésus échange la cognée contre la bêche : il creuse à la racine des arbres pour y mettre du fumier et leur laisser une chance.
      
      La démarche de Jacques et de Jean, qui survient juste après la troisième annonce de la Passion, signifie à tout le moins qu'ils ne sont pas sur la même longueur d'ondes que Jésus. "Vous ne savez pas ce que vous demandez". Je vous parle de moqueries et de crachats, de flagellation et de mort, et vous me demandez des trônes de gloire ! Vous voudriez être l'un à ma droite et l'autre à ma gauche, mais ces places sont préparées pour d'autres." Et en effet, quand l'annonce de la Passion se réalise, on crucifie avec Jésus deux bandits, l'un à sa droite et l'autre à sa gauche : voilà pour qui ces places sont préparées.
      
      Luc, qui a beaucoup d'estime pour les apôtres, a l'habitude de les ménager, de leur chercher des excuses, de corriger les anecdotes où ils apparaissent trop stupides. C'est ainsi qu'il a passé sous silence cette démarche de Jacques et de Jean. Mais il a mis en scène les deux mêmes apôtres dans un autre récit. Quand Jésus part pour Jérusalem, des Samaritains refusent de l'accueillir. Devant ce refus, les disciples Jacques et Jean intervinrent : "Seigneur, veux-tu que nous ordonnions que le feu tombe du ciel pour les détruire ?" Mais Jésus se retourna et les interpella vivement. En lisant ce récit de Luc, on peut comprendre pourquoi Jacques et Jean espéraient siéger aux côtés de Jésus. De leur part, c'est une preuve de courage, de détermination. Ils sont prêts à boire la coupe de leur maître. Mais ils n'ont pas les mêmes vues que lui, ils ne partagent pas son "programme". En voyant Jésus qui est bon avec tout le monde, pardonne aux pécheurs et supporte l'adversité, ils craignent que, quand il aura pris le pouvoir, il l'exerce avec trop de mollesse. Ils se disent que Jésus devra être entouré par des conseillers plus fermes, à l'occasion plus expéditifs, et qu'ils sont de l'étoffe dont on fait les bons ministres, intègres et rigoureux.
      
      Jésus, qui aimait donner des surnoms, appelait ces deux apôtres "les fils du tonnerre". C'était leur reprocher, avec un brin d'ironie, de mal habiter leurs vrais noms, car Jean veut dire le Seigneur fait grâce et Jacques, Dieu protège. Dieu n'a que faire de leurs conseils de gouvernement. Il n'est pas celui qui menace et foudroie, mais celui qui protège et fait grâce.

      Frère François, moine de Wavreumont 25 juillet 25


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